Selon les 106 dégustateurs (œnologues, sommeliers, journalistes et experts internationaux) du concours des Vinalies Internationales, qui ont eu à départager 2684 échantillons venus de France mais aussi d’autres pays viticoles du monde entier, le meilleur rosé du monde est varois. Il est élaboré par la famille Baccino, « père et filles », au sein du domaine de La tulipe noire, sis à La Crau.
« C’est une récompense extrêmement rare et prestigieuse, qui vient valider tout le travail fait en famille depuis des décennies », se réjouit Alain Baccino.
Depuis des décennies, c’est peu dire: voilà cinq générations que la famille Baccino, arrivée de Ligurie en 1880, cultive des vignes sur le territoire, entre Pierrefeu et Cuers. Alain et son épouse Véronique président aux destinées du domaine des Peirecèdes depuis 1991. Et ont embarqué naturellement leurs deux filles, Audrey et Leslie, dans l’aventure viticole familiale, en acquérant aussi en 2009 le domaine La Tulipe Noire, à La Crau. « Il nous fallait nous développer, il faut tout de même nourrir trois familles, sans compter le personnel… Et ça a été un vrai coup de cœur, un terroir magnifique. À l’époque, les banques nous suivaient à 100% aussi… Quatre ou cinq ans après, nous n’aurions plus pu le faire ».
Si les deux domaines ne sont distants que de quelques kilomètres, les deux terroirs diffèrent, « notamment en raison de l’influence de la mer, plus forte à la Tulipe noire qu’à Peirecèdes », résume Audrey.
« Une belle promotion pour toute la profession »
La famille prend aussi un plaisir évident à élaborer ses cuvées, de la vigne à la cave. « Pour le rosé de Peirecedes, on travaille avec un assemblage de cépages emblématiques de Provence: grenache, cinsault et syrah. Tandis qu’à La Crau, on travaille beaucoup avec du tibouren, qui est un cépage craintif et difficile, mais qui peut exprimer des arômes extraordinaires. »
Si les deux domaines font la part belle à ses rouges et blancs – « on est à environ 55% de la production en rosé, c’est peu en Provence » – la famille n’en reste pas moins une fervente défenseure du vin rosé. « Il a longtemps été décrié, mais à tort. C’est un vin difficile, exigeant, mais qui quand il est bien fait exprime une palette aromatique incroyablement vaste », s’enthousiasme Audrey. « D’ailleurs, malgré les idées que certains s’en font, un bon rosé s’apprécie aussi à merveille avec un fromage à pâte molle, un plat d’hiver, etc. »
Cette passion du bon produit, et un fonctionnement familial bien éprouvé (lire plus loin) atteint une forme d’apogée et de consécration en 2025, avec cette palme. « Avec cette récompense, on peut affirmer qu’on fait le meilleur rosé du monde dans le Var! C’est une belle promotion pour toute la profession », se réjouit Alain qui, avec son épouse et ses filles, a bouclé un cru de rosés 2024 multirécompensé: pas moins de 14médailles en tout. « Par exemple, on a présenté trois cuvées au concours général agricole, à Paris, et elles sont toutes les trois revenues avec l’or! »
L’engagement d’Alain Baccino est bien connu du monde agricole varois. Il a notamment présidé la chambre d’agriculture de 2007 à 2019.
Des talents complémentaires
Dans la famille Baccino, les talents de tous se complètent: « Alain supervise principalement le travail des vignes, et 50 hectares au total, intégralement en bio, ce n’est pas une mince affaire », explique Véronique. « Audrey celui de la cave, ainsi que la commercialisation, et Leslie la partie administrative, dont on n’imagine mal la lourdeur… Évidemment, chacun est également polyvalent pour aider les autres… On est tous vignerons! »
« Et si certains gros domaines dépensent des millions en marketing et en communication, chez nous, le marketing, c’est maman! », s’amuse Leslie.
Toute la famille entretient une volonté constante d’innovation, d’expérimentation, dans tous les domaines. « C’est enthousiasmant, intellectuellement, de se challenger en permanence, et cela participe aussi à maintenir un haut niveau de qualité ».
Cela se voit dans la gamme de vins (rosés de garde, vin effervescent « mais avec une méthode spécifique permettant de bien conserver les aromatiques de Provence », vendanges tardives…), mais aussi dans les produits du terroir, l’accueil d’expositions, de séances de cinéma en plein air… « Et cette année, on se lance dans l’œnotourisme avec l’ouverture de plusieurs gîtes. C’est un développement qui fait sens dans la région », note Véronique. « Et c’est aussi un outil pour poursuivre notre développement et diversifier nos revenus, ce qui devient incontournable », poursuit Alain.
Audrey a enfin « quelques idées de vinifications différentes à expérimenter ces prochaines années », sans en dire davantage: « On a nos secrets! »
Un quart de siècle d’engagement
Alain Baccino est bien connu du monde agricole varois. « Je me suis consacré à l’action collective durant 24 ans, dont 12 en tant que président de la chambre d’agriculture, de 2007 à 2019 ». Là, il a « toujours poussé les vignerons varois à améliorer la qualité de leurs vins. Il est donc important que je montre l’exemple moi-même », Il a aussi mené plusieurs batailles, « notamment celle contre l’autorisation du coupage du rouge et du blanc. pour faire du rosé, pour laquelle l’Europe nous a entendus. Ou encore celle contre la ligne à grande vitesse… »
Retiré des affaires depuis six ans, « j’ai alors pu me consacrer intégralement à mes domaines. Ces récompenses du travail familial ont ainsi une saveur toute particulière aujourd’hui ».