L’Union européenne va réexaminer son accord d’association avec Israël.

EMMANUEL DUNAND / AFP

L’Union européenne va réexaminer son accord d’association avec Israël.

GAZA – Un véritable changement de ton. Alors qu’Israël intensifie son offensive à Gaza et limite encore l’entrée de l’aide humanitaire sur le territoire palestinien, l’Union européenne (UE) a annoncé mardi 20 mai le réexamen de son accord d’association avec Tel Aviv. Une première étape vers une possible suspension du texte.

Cet accord, ratifié en 1995 et entré en vigueur en 2000, vise à faciliter le dialogue politique et les échanges commerciaux entre le vieux continent et l’État hébreu. Au regard de la situation à Gaza, c’est son article 2 qui interroge les pays membres. Celui-ci prévoit que « les relations entre les parties, ainsi que toutes les dispositions de l’accord lui-même, sont fondées sur le respect des droits de l’Homme ».

Mardi soir, depuis Bruxelles, 17 États membres, dont la France, ont voté pour que l’UE vérifie si Israël respecte bien cet article. Neuf pays, parmi lesquels l’Allemagne et l’Italie, s’y sont opposés.

Cette annonce intervient dans un contexte de regain de tensions à Gaza. Lundi 19 mai, le Premier ministre israélien a réaffirmé son intention de prendre le contrôle de la totalité de la bande de Gaza, après plusieurs jours de frappes intensives. La veille, l’exécutif israélien a annoncé la levée du blocus humanitaire imposé depuis deux mois. Mais les quantités d’aide autorisées à entrer dans l’enclave palestinienne ont été jugées largement insuffisantes par l’ONU plusieurs dirigeants internationaux.

« Un marqueur fort »

Ce vote « est un marqueur fort, qui exprime l’isolement accru d’Israël sur la scène internationale », estime David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), spécialiste du Moyen-Orient.

Il ne s’agit cependant pas d’une demande nouvelle. Dès février 2024 – quatre mois après l’attaque du 7 octobre et le début de l’offensive à Gaza – le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez et son homologue irlandais de l’époque Leo Varadkar avaient demandé l’évaluation en urgence du respect des obligations d’Israël en matière de droits de l’Homme. En vain.

« Objectivement, la situation à Gaza est devenue tellement catastrophique sur le plan humanitaire que l’Union européenne se sentait dans l’obligation de réagir », analyse David Rigoulet-Roze.

Concrètement, si la Commission européenne établit qu’Israël ne respecte pas l’article 2 de l’accord, plusieurs options sont envisageables : une suspension totale de l’accord, une suspension du volet politique ou une suspension du volet commercial. L’UE peut aussi décider de ne pas prendre de sanction.

Pour une suspension totale ou une suspension de la partie politique, un vote à l’unanimité est exigé. Or, « l’Union européenne est loin d’avoir une position unifiée sur le sujet, comme l’a montré le vote de mardi », souligne Emmanuel Dupuy, président de l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE). « D’importants partenaires commerciaux d’Israël comme l’Allemagne ou l’Italie y sont opposés », ajoute ce spécialiste des questions de Défense.

Des effets limités

Pour une suspension du versant commercial du partenariat, seul un vote à la majorité qualifiée est demandé. Cela nécessite que 55 % des États membres expriment un vote favorable, soit 15 États sur 27. Les États membres qui soutiennent la proposition doivent également représenter 65 % de la population totale de l’UE.

Une telle mesure aurait « des conséquences considérables sur l’économie israélienne puisque l’Union européenne est son premier partenaire commercial », pointe David Rigoulet-Roze. Selon les chiffres de la Commission, en 2024, 28,8 % des exportations israéliennes étaient dirigées vers l’Europe et 34,2 % de ses importations en provenaient.

Mais pour Emmanuel Dupuy, cette mesure ne pourrait rester que « symbolique ». D’abord, un tel processus « prendrait plusieurs mois », rappelle-t-il. Par ailleurs, « Israël a les capacités de s’appuyer sur d’autres partenaires commerciaux que l’Union européenne », explique l’expert.

Mais surtout, « ce type de mesure a peu de chance de faire plier Benjamin Netanyahu, qui prend très peu en compte les positions européennes », décrypte David Rigoulet-Roze. « À l’inverse, cela risquerait d’accentuer la défiance d’Israël vis-à-vis de l’Europe », considère le géopolitologue.

Dans la foulée du vote des 27, Israël a d’ailleurs averti que « les pressions extérieures ne (le) détourneront pas de sa voie pour défendre son existence et sa sécurité ».

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