La famille royale du petit émirat gazier a offert un Boeing 747-8, estimé à 400 millions de dollars par des experts et dépeint par des médias américains comme un «palace dans le ciel».

L’annonce ne faisait plus de doute. Les États-Unis ont officiellement accepté ce mercredi un Boeing offert par le Qatar pour être utilisé comme l’avion présidentiel, l’Air Force One. «Le secrétaire à la Défense a accepté un Boeing 747-8 du Qatar conformément à toutes les règles et réglementations fédérales, a déclaré Sean Parnell, porte-parole en chef du Pentagone, dans un communiqué relayé par le New York Times et ABC News. Le ministère de la Défense s’efforcera de garantir que des mesures de sécurité appropriées soient prises en compte pour un avion utilisé pour transporter le président des États-Unis.»

Ce cadeau de la famille royale de l’Émirat est estimé à 400 millions de dollars par des experts et dépeint par des médias américains comme un «palace dans le ciel». Il pourrait s’agir du bien le plus onéreux jamais offert au gouvernement des États-Unis. Ce don pose la question de potentiels conflits d’intérêts, d’autant que la Constitution américaine interdit aux dépositaires de l’autorité publique d’accepter des cadeaux «de la part d’un roi, d’un prince ou d’un État étranger».

Rappelant cette règle constitutionnelle, des sénateurs démocrates – Cory Booker, Brian Schatz, Chris Coons et Chris Murphy – ont dénoncé dans un communiqué conjoint ce cadeau, assurant qu’il «crée un conflit d’intérêts évident, soulève de graves questions de sécurité nationale, invite à l’influence étrangère et sape la confiance du public dans notre gouvernement». Le sénateur Chris Murphy a même promis de bloquer toute vente d’armes future à un «pays qui fait des affaires personnelles directes avec Trump».

«Ils nous donnent un avion gratuitement»

Interrogé par un journaliste, Donald Trump avait assuré la semaine passée qu’il n’utiliserait pas l’avion à des fins personnelles après son mandat. «Vous devriez avoir honte de poser cette question», avait-il répondu à un journaliste. «Ils nous donnent un avion gratuitement. Je pourrais dire “non, non, non, ne nous le donnez pas, je veux payer un milliard de dollars ou 400 millions de dollars, ou quoi que ce soit d’autre”. Ou je pourrais dire, “merci beaucoup”», a-t-il continué. «C’est un beau geste venant du Qatar. Je suis très reconnaissant. Je ne suis pas du genre à refuser une telle offre. Je pourrais être une personne stupide et dire “Non, nous ne voulons pas qu’on nous donne un avion très cher”», avait ajouté le président américain, avant de faire étape au Qatar la semaine passée dans le cadre d’une tournée dans le Golfe.

Le recours à un avion offert par une puissance étrangère suscite par ailleurs de vives inquiétudes en termes de sécurité: Air Force One est conçu pour servir de centre de commandement mobile pour le président en cas d’attaque contre les États-Unis. Le président américain a assuré qu’à la fin de son mandat, il offrirait cet «Air Force One» à sa future bibliothèque présidentielle, à la manière d’un de ses prédécesseurs, Ronald Reagan.

Trump mécontent de Boeing

Le dirigeant républicain souhaitait remplacer les deux avions présidentiels actuels, des Boeing 747-200B entrés en service en 1990 sous George Bush père. Depuis son retour au pouvoir, Donald Trump a pesté contre les coûts de maintenance importants de ces appareils. Plus tôt cette année, le président américain a indiqué que «des alternatives» étaient à l’étude concernant le futur Air Force One, faisant part de son mécontentement face aux retards pris par l’avionneur Boeing.

Le géant américain de l’aérospatial avait en effet signé en 2018 un contrat de fourniture de deux avions 747-8 avant fin 2024 pour 3,9 milliards de dollars, équipés pour transporter le président américain. Mais des modifications du projet, notamment réclamées par Donald Trump lors de son premier mandat, la faillite d’un sous-traitant ainsi que la pandémie de Covid-19 et les problèmes d’approvisionnement qui ont suivi ont repoussé ce calendrier. Le milliardaire possède un avion privé surnommé «Trump Force One» qu’il a utilisé pour sillonner les États-Unis lors de sa campagne présidentielle.