Le recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, s’est inquiété ce jeudi d’une « stigmatisation » des musulmans au nom de la lutte contre l’islamisme, tout en appelant les pouvoirs publics à la « cohérence », après la publication d’un rapport sur le sujet.
La Grande mosquée « a toujours défendu une vision de l’islam compatible avec la lettre et l’esprit des principes de la République », et « toujours refusé que l’islam soit dévoyé à des fins politiques visant à fracturer la communauté nationale », affirme le recteur dans un communiqué.
𝐂𝐎𝐌𝐌𝐔𝐍𝐈𝐐𝐔𝐄́ | La Grande Mosquée de Paris a pris connaissance des informations contenues dans le #rapport « Frères musulmans et islamisme politique en France » soumis au président de la République Emmanuel Macron lors d’un conseil de défense et de sécurité nationale et… pic.twitter.com/FKdkKMeSxL
— Grande Mosquée de Paris (@mosqueedeparis) May 22, 2025
Mais « elle refuse aussi que la lutte légitime contre l’islamisme ne devienne un prétexte pour stigmatiser les musulmans et servir des agendas politiques particuliers », ajoute le texte, en déplorant « la construction d’un problème musulman et l’élaboration insidieuse d’un discours discriminatoire de plus en plus décomplexé ».
Musulmans de France (MF) visé par un rapport
Chems-eddine Hafiz réagissait à un rapport sur l’islamisme politique présenté ce mercredi en Conseil de défense, qui met en garde contre un entrisme « par le bas », au niveau local et associatif, mené par les Frères musulmans. Le rapport cible notamment Musulmans de France (MF), qui a succédé en 2017 à l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), et est présenté comme « la branche nationale » des Frères musulmans en France.
Or, Musulmans de France « maintient historiquement une relation privilégiée avec la Grande Mosquée de Paris » et entretient « des liens très étroits » avec « une quinzaine » de ses mosquées, affirme le texte que l’AFP a pu consulter. À propos de ce « dialogue », Chems-eddine Hafiz souligne que « ce sont les pouvoirs publics qui ont choisi de faire de l’UOIF d’abord, et de Musulmans de France ensuite, un acteur important de l’islam en France, et de l’inviter à la table de la République ».
En 2003, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, avait fait entrer l’UOIF dans le Conseil français du culte musulman (CFCM) naissant, avant de se rendre à son grand rassemblement annuel du Bourget. En 2020, Musulmans de France avait fait partie des instances reçues par Emmanuel Macron dans l’optique d’un futur conseil national des imams chargé de labelliser leur formation.
« Il est curieux de s’étonner que la Grande Mosquée de Paris puisse être simplement l’un des interlocuteurs de cet acteur légitimé par les institutions républicaines depuis de longues années », ajoute le recteur, qui « appelle les responsables politiques à faire preuve de cohérence » et met en garde contre toute « surenchère politicienne » dans le débat.