Paradis pour footballeurs en semi-retraite payés à coups de millions, l’Arabie saoudite, qui organisera la Coupe du monde en 2034, a tout de l’enfer pour ceux qui travaillent à la réalisation de cet événement planétaire ! C’est ce que révèlent de nombreux rapports qui s’accumulent et mettent en cause le peu de cas qui est fait des droits des travailleurs, et plus largement des droits humains, dans ce pays du Moyen-Orient. Après l’organisation au Qatar, en 2022, qui était très loin d’être exempte de tout reproche, et alors que, pour la Coupe du monde 2026 et tout particulièrement au Mexique, comme le rappelait dans nos pages (voir l’Humanité du 31 mars 2025) Jean-Pascal François, secrétaire fédéral de la CGT construction, des observateurs internationaux ont été empêchés de visiter les sites par la Fédération internationale de football (Fifa), il semblerait qu’au nom du tout-puissant foot business, on ferme encore une fois les yeux sur les droits humains.
« On va assister à un Qatar bis »
Ainsi Human Rights Watch (HRW) a publié il y a quelques jours un rapport dénonçant les violations du droit des travailleurs immigrés en Arabie saoudite, dans le cadre de l’organisation de la Coupe du monde 2034. « L’Arabie saoudite est un environnement de travail extrêmement dangereux », estime HRW, qui souligne aussi le regard biaisé et la responsabilité de la Fifa dans la supervision de la construction des stades. Le rapport s’appuie sur des entretiens de 31 familles d’ouvriers décédés sur des chantiers provenant du Bangladesh, d’Inde et du Népal et âgés de 23 à 52 ans, ou encore sur trois témoins directs d’accidents mortels. De nombreux travailleurs immigrés seraient morts d’accidents du travail qui auraient pu être évités. Pis : « La majorité de ces morts n’est pas classée comme accident du travail, ce qui prive les familles d’indemnités. Et, quand cela est possible, le processus pour être indemnisé est long et harassant. Il y a eu des électrocutions, des décapitations, des écrasements », continue Michael Page, directeur adjoint de HRW pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
Mais fallait-il s’attendre à autre chose ? Jean-Pascal François, qui retournera au Mexique courant juillet, n’est pas tombé de sa chaise à la parution des rapports : « On va assister à un Qatar bis, ce qui ne m’étonne pas. Pour l’instant tout est fermé là-bas. Nous ne pouvons pas y aller. Et ce qui est grave, c’est que la Fifa n’a retenu aucune leçon du passé. »
Déjà en octobre 2024 des organisations de défense des droits humains, des organisations de supporters de football et des syndicats avaient tiré la sonnette d’alarme et exprimé leur vive préoccupation au sujet d’une évaluation faussée en matière de droits humains réalisée par un cabinet international d’avocats AS & H Clifford Chance pour la Coupe du monde et publié par la Fifa. Selon ces organisations, l’évaluation aurait fait un usage très sélectif des conclusions des organes des Nations unies sur l’Arabie saoudite, en omettant nombre de jugements préjudiciables. Elle servait seulement de base à la stratégie de l’Arabie saoudite en matière de droits humains pour le tournoi. Pour Amnesty International cela n’est ni plus ni moins qu’une tentative de dissimulation. Mais qu’importe du moment que les caisses de la Fifa se remplissent une nouvelle fois : « Les travailleurs ne sont pas son problème. Les droits sociaux encore moins, que ce soit pour les ouvriers sur les chantiers ou même les travailleurs domestiques qui sont exploités. La Fifa ferme les yeux et regarde ailleurs. Le foot est pourtant un jeu mais, là, on joue avec les vies », rappelle Jean-Pascal François.
Parmi les causes de décès, beaucoup sont ainsi classées comme naturelles et ne font l’objet d’aucune enquête. Par voie de conséquence, ils ne donnent lieu à aucune indemnisation. Interpellée et un peu mise dans les cordes, la Fifa a finalement écrit à Human Rights Watch pour expliquer qu’elle prévoyait de mettre en place un système de protection sociale pour les travailleurs définissant des normes et des mécanismes d’application obligatoires pour les travaux de construction et la fourniture de services en lien avec la Coupe du monde. Elle n’a cependant pas fourni de précisions sur ces mesures concrètes, ni de date.
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