Depuis ses débuts, l’influenceuse Léna Situations se trouve régulièrement au cœur de violentes vagues de cyberharcèlement, de commentaires misogynes et de remarques haineuses. Pour ses coupes de cheveux parfois, ses tenues souvent. Nouvel épisode cette semaine, en plein festival de Cannes, quelques jours après la publication d’un rapport gouvernemental alarmiste sur «l’entrisme» des Frères musulmans.
Lundi 19 mai, à l’occasion du gala organisé par la marque Chopard en marge de la 78e édition du Festival, Léna Mahfouf s’affiche avec une longue robe blanche, assortie d’un voile dans les cheveux. La robe est signée The Row, marque de luxe américaine créée par les sœurs Olsen et connue pour ses créations minimalistes.
Deux jours plus tard, mercredi 21 mai, la secrétaire générale du groupe Ensemble pour la République (EPR) Deborah Abisror-De Liem publie un message sur le réseau social X en s’en prenant directement à cette tenue. «Léna situation 2024 vs 25 : l’entrisme passe d’abord par les codes vestimentaires, c’est pourquoi l’imposer à des fillettes c’est le fondement d’infiltration de nos sociétés. Nos mères se sont battues pour que nos jupes puissent être courtes», écrit la macroniste dans un post aujourd’hui supprimé.
Son message est agrémenté de deux photos de l’influenceuse de 27 ans aux près de 5 millions d’abonnés, l’une prise en 2024, sur laquelle Léna Mahfouf porte une robe fendue et aux épaules dénudées ; et une autre prise cette année, avec la fameuse robe, plus ample et couvrante. Une comparaison censée illustrer un soi-disant «entrisme». Sur le plateau de CNews, la formule est reprise par Christine Kelly, qui accuse Léna Situations de «s’habiller à la mode des Frères musulmans».
Rapidement, la polémique enfle. Les fans de l’influenceuse se mobilisent. Le monde politique réagit lui aussi. «Léna Situations choisit sa robe. Vous, vous imposez vos fantasmes sur les musulmans. Le vrai danger pour les libertés, c’est pas la longueur des jupes. C’est la petitesse des esprits», rétorque François Ruffin, député de la Somme. Et d’appeler à ce «que le Président retrouve ses esprits et recadre ses troupes». Manuel Bompard, député LFI, affiche lui aussi son soutien : «Alors non, la robe n’a pas été faite par les Frères Musulmans mais par les Sœurs Olsen.» Nicolas Cadène, ex-rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité, dénonce, lui, «une obsession maladive».
Deborah Abisror-De Liem s’enfonce encore, et précise qu’elle ciblait avec son message des «codes vestimentaires», des codes utilisés pour «véhiculer toute une façon de vivre, comme l’était l’abaya».
Mais face au tollé provoqué par son tweet, Deborah Abisror-De Liem finit par présenter, jeudi, ses excuses à la jeune femme. «J’ai voulu aborder la mode du “modest” qui se déploie sur les réseaux sociaux et concerne d’ailleurs différentes religions. Je l’ai fait maladroitement en citant en exemple une personne déjà largement ciblée par le harcèlement en ligne et c’était une erreur», écrit la cadre du parti Renaissance dans un message publié sur X.
Jeudi soir, Léna Mahfouf a elle-même fini par prendre la parole sur ses réseaux sociaux. Dans une publication Instagram, la jeune femme, qui était restée silencieuse jusqu’ici, déclare : «Pendant ce Festival de Cannes, j’ai appris que selon certains […] j’avais rejoint les Frères musulmans. Une pensée à nos mères qui ont marché pour que nous puissions CHOISIR nos vêtements. Merci.» L’influenceuse, également femme d’affaires et youtubeuse, ajoute avoir une pensée pour toutes les femmes musulmanes «qui vivent ces jugements au quotidien mais sans le soutien d’Internet pour les défendre».