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Augustin Delaporte

Publié le

23 mai 2025 à 20h25

La date était très attendue par les victimes : la mairie de Paris sera jugée fin 2026, après les municipales, pour l’explosion de la rue de Trévise qui avait fait quatre morts et plus de 200 blessés en 2019, selon une décision annoncée vendredi 23 mai 2025 au tribunal.

« La campagne municipale pourrait altérer les débats »

La Ville et le syndic de copropriété comparaîtront du 20 octobre au 7 décembre 2026 à Paris pour homicides et blessures involontaires, ainsi que pour « destruction, dégradation ou détérioration par l’effet d’une explosion ou d’un incendie de biens immobiliers ou mobiliers », a-t-on appris lors d’une audience de procédure.

Avant que le tribunal ne précise ces dates, très attendues par les victimes, les avocats de la Ville de Paris avaient plaidé pour que le procès n’interfère pas avec les élections municipales prévues en mars 2026, alors qu’il avait été envisagé une audience durant la période électorale.

« La campagne municipale pourrait altérer les débats. Il y a un risque de récupération politique », a mis en garde Me Sabrina Goldman tandis que son confrère Patrick Klugman a assuré que « la Ville de Paris ne se dérobe pas » mais n’a pas envie d’un « procès saccagé » par la campagne. « Le ministère public tient à ce que ce procès se tienne en 2026 », avait demandé le procureur, Nicolas Hennebelle.

Un « scandale sans nom »

Mais l’association des Victimes et rescapés de l’explosion de la rue de Trévise (Vret) a dénoncé un « scandale sans nom ». « La mairie de Paris a fait des pieds et des mains pour demander le report après les municipales et la justice a validé sa demande », s’est insurgée sa présidente, Linda Zaourar, interrogée par l’AFP.

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Pour une élection, on recule une date que des endeuillés, des personnes grièvement blessées et des centaines de sinistrés attendent depuis des années. Elle est où la place des victimes là-dedans ?

Linda Zaourar
présidente de l’association des Victimes et rescapés de l’explosion de la rue de Trévise

« C’est difficile pour les victimes d’attendre encore, mais pour la visibilité médiatique du procès, c’est peut-être mieux de le reporter après les municipales », a estimé pour sa part Dominique Paris, responsable de la seconde association de victimes, Trévise Ensemble.

Pour rappel, au matin du 12 janvier 2019, rue de Trévise dans le 9e arrondissement, une violente explosion tuait quatre personnes, dont deux pompiers, en blessait plus de 200, et faisait environ 400 sinistrés. Une quinzaine d’immeubles ont été impactés dans cette rue du quartier touristique des Grands Boulevards.

La mairie de Paris jugée plus de sept ans après le drame

L’information judiciaire a mis en évidence des « fautes d’imprudence et de négligence de la Ville de Paris », qui n’a pas diligenté « les investigations nécessaires pour rechercher les causes de l’affaissement du trottoir », ont noté les juges d’instruction dans leur ordonnance.
Cet affaissement avait entraîné la « rupture brutale » d’une canalisation de gaz à l’origine de l’explosion.

De son côté, le syndic de copropriété a tardé « à faire procéder à la réparation du collecteur d’eaux usées de l’immeuble » alors qu’il était informé « dès le 25 novembre 2015 » d’une fuite, est-il souligné.

« Les expertises judiciaires permettent de conclure que les écoulements d’eau dans la terre ont nécessairement contribué à fragiliser le terrain » et qu’ils sont « la seule cause possible au regard de la configuration des lieux » de l’affaissement, ont indiqué les juges d’instruction.

Une information judiciaire avait été ouverte fin janvier 2019. La mairie de Paris et le syndic de copropriété de l’immeuble avaient été mis en examen. Mais pas l’entreprise de BTP Fayolle, chargée en novembre 2016 des travaux sur le trottoir, ni GRDF.

Les investigations se sont appuyées sur deux rapports d’expertise fin 2019 et 2020, puis une contre-expertise en 2023. Cette dernière avait listé cinq « fautes » sans désigner personne nommément et sans contredire les deux rapports précédents.

« Plus de 300 victimes » se battent toujours pour être indemnisées

Si les sinistrés ont pu regagner leurs logements, à l’automne dernier seulement, « plus de 300 victimes » se battent toujours pour être indemnisées, selon Linda Zaourar de l’association Vret.

Un accord-cadre d’indemnisation conclu en janvier 2022 permet néanmoins à des victimes d’être indemnisées sans attendre les issues judiciaires.

« Mais celles qui n’y ont pas souscrit dépendent de la décision au pénal », a précisé Dominique Paris de Trévise Ensemble.

Avec AFP

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