Ciblée dans un rapport français dévoilé ce mardi par Le Figaro, la confrérie des Frères musulmans est en réalité dans le collimateur de nombreuses autorités dans le monde, qui l’estiment «populiste» et dangereuse.
Jordan Bardella et Manuel Valls ont demandé à l’interdire en France – le gouvernement entendra-t-il leur appel? La confrérie des Frères musulmans, organisation promouvant une «islamisation par le bas» des sociétés dans lesquelles elle s’active, a fait l’objet cette semaine d’un conseil de défense lors duquel a été abordé un long rapport des autorités françaises, dévoilé mardi 20 mai par Le Figaro.
Décrits par les rapporteurs français comme un groupe secret dont les membres portent des «stratégies» de «dissimulation» et d’«institutionnalisation», les Frères musulmans pourraient également prochainement subir le courroux des forces de l’ordre, alors qu’Emmanuel Macron a exigé des propositions à la hauteur de la «gravité des faits». De là à les interdire en France? L’organisation fait en tout cas d’ores et déjà l’objet d’un bannissement dans de nombreux pays du globe.
«Source de tous les maux»
La Russie a par exemple été le premier pays du monde à classer la confrérie parmi les groupes terroristes, en 2003, dans un contexte d’insurrection islamiste en Tchétchénie. Considérant l’idéologie frériste comme potentiellement déstabilisatrice, Moscou a décidé de la bannir.
Ce n’est toutefois que dix ans plus tard, que certains pays du Proche-Orient décide de suivre l’exemple moscovite. La Syrie de Bachar al-Assad, allié de la Russie, prend les mêmes mesures en 2013, alors qu’elle connaît une guerre civile meurtrière. Le dictateur syrien craignait un scénario similaire à l’Égypte où, en 2012, la confrérie a fait élire leur candidat à la présidentielle, Mohamed Morsi. Il est renversé en 2013 par son successeur Abdel Fattah al-Sissi, qui décide alors d’interdire le mouvement et de réprimer ses membres.
En 2014, l’Arabie saoudite interdit à son tour la confrérie, alors que le ministre saoudien de l’Intérieur avait accusé les Frères après les attentats du 11 septembre 2001 d’être la «source de tous les maux» du royaume. Bahreïn et les Émirats arabes unis suivent peu après. Ces monarchies du Golfe, qui considèrent que seule l’hérédité peut permettre d’accéder au pouvoir, estiment que le «populisme» promu par la confrérie menace le régime en place. En outre, cette interdiction s’inscrit également dans un contexte de rivalité régionale avec le Qatar, et dans une moindre mesure la Turquie, suspectés de soutenir le frérisme.
«Financement du terrorisme»
En 2021, c’est au tour de l’Autriche de prendre des mesures contre les Frères musulmans, quelques mois après l’attentat djihadiste de Vienne, qui a fait quatre morts. Les autorités autrichiennes mènent dans un premier temps des dizaines de perquisitions dans des lieux liés à la mouvance, en raison de «soupçons de formation d’organisation terroriste, de financement du terrorisme et de blanchiment d’argent». L’Autriche décide dans un second temps d’inscrire le mouvement sur sa liste noire des organisations liées à la «criminalité à motivation religieuse». Son emblème, deux sabres croisés surmontés du Coran et la bannière en arabe signifiant «Préparez-vous», est interdite, comme ses slogans et sa littérature. Leur détention devient ainsi passible de 4000 euros d’amende et d’un mois de prison.
La Jordanie est le dernier pays à date à avoir interdit la confrérie, en raison de leurs activités «de nature à déstabiliser le pays». Plusieurs jours après la saisie d’armes et l’arrestation de 16 personnes, soupçonnées de vouloir «nuire à la sécurité nationale, à semer le chaos et à commettre des actes de sabotage en Jordanie», Amman annonce le 24 avril «confisquer les actifs du groupe, interdire la promotion de ses idées sous peine de poursuites, et considérer l’adhésion à ce groupe comme un acte interdit».