L’annonce par Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg, d’un projet de jumelage entre sa ville et la commune palestinienne d’Aida, a suscité des réactions tranchées, les unes soulignant son courage, les autres l’accusant de soutenir ainsi les terroristes du Hamas. Une dialectique banale depuis le massacre anti-israélien du 7-Octobre et la sanglante offensive de Tsahal dans le territoire de Gaza qui en a résulté.
Il est difficile pour un élu local de trouver le bon chemin pour parler du drame qui se joue au Proche-Orient. Gaza n’est pas qu’une question de politique internationale. À Strasbourg, la communauté juive est, par son histoire et son nombre, une constituante majeure de l’identité de la ville. Tout comme les communautés d’origine turque ou maghrébine, naturellement solidaires du peuple palestinien. Tout faux pas peut entailler profondément le tissu social de la cité. L’équilibre n’est possible qu’à condition d’oublier la politique et de la remplacer par deux vertus spécifiquement humaines : la mémoire et la morale.
La mémoire parce que nul ne peut dénier le droit au peuple juif, après trois millénaires de souffrances, de disposer d’un État refuge. Israël, cet État, n’est plus sûr, il vacille, et c’est autant la faute de l’extrémisme du clan Netanyahou que du cynisme des terroristes du Hamas. Israël sous sa forme initiale, démocratique et ouverte, doit impérativement survivre à ce chaos. En refusant de mettre fin au jumelage avec la ville israélienne de Ramat-Gan et en s’abstenant d’intervenir dans le dossier du partenariat entre Sciences Po Strasbourg et l’université Reichmann de Tel-Aviv, la ville de Strasbourg maintient cette porte ouverte sur l’avenir. La morale, elle, s’impose d’elle-même, les images et les témoignages suffisent : l’enfer sur Terre infligé aux Gazaouis doit cesser au plus vite. Pour les Palestiniens, pour les Israéliens et pour l’Humanité tout entière. Sans mémoire, ni morale, il n’y a pas de justice possible, de Strasbourg à Gaza, en passant par Tel-Aviv.