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Rédaction Lyon

Publié le

25 mai 2025 à 8h24

Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné ce mardi 20 mai 2025 un jeune « un peu écervelé » à dix mois de prison avec sursis pour avoir fait « une blague pas drôle » sur Facebook sur Kfir Bibas, le « bébé otage » qui avait été kidnappé par le Hamas dans un kibboutz israélien lors des attaques terroristes du 7 octobre 2023.

Une très mauvaise blague antisémite

Sasha X. vivait en effet chez son grand-père à Jonage (Rhône) le 20 février 2025 quand la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) avait signalé aux autorités lee post qu’il avait publié cinq jours plus tôt avec son compte Facebook personnel. « Quelle est la différence entre Kfir et une pizza ? Le temps de cuisson », avait cru bon de répondre « en commentaire » à un post cet « étudiant en alternance » au sein d’un groupe de construction alors que le Hamas venait de remettre la dépouille du bébé à sa famille.

L’internaute de 25 ans avait donc été placé en garde à vue le 26 février 2025, avant d’être remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire dans l’attente de son procès le 15 avril 2025.

« Quelle est la différence entre un Juif et une pizza ? »

Outre la LICRA, s’étaient constitués parties civiles contre lui le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme et le Conseil représentatif des institutions juives (CRIF) de France. D’un point de vue pénal, il n’avait que deux condamnations à son casier, une pour un « usage illicite de stupéfiants » et l’autre pour des « blessures involontaires » sur la route.

Le jour venu, Sasha X. avait donc assuré aux juges avoir juste voulu « reprendre une blague connue ». « C’est « Quelle est la différence entre un Juif et une pizza ? Le temps de cuisson » », avait-il tenté d’expliquer aux trois magistrats lyonnais. « J’ai juste remplacé « Juif » par le prénom de cet enfant, sans savoir qui c’était. »

« Quand j’ai écrit, j’ai pas réfléchi »

« Vous voulez faire croire ça à moi ? », l’avait alors repris de volée la présidente du tribunal correctionnel de Lyon. « Il y a des milliers de prénoms dans le monde, le calendrier en est plein, et vous choisissez celui-ci ! Vous n’avez pas compris que le sujet était grave ? Avec ce contexte géopolitique, cette guerre, ses victimes et ses otages ? »

La magistrate lyonnaise lui avait donc demandé si ce possible « humour noir » n’était d’abord pas « très antisémite ». « Quand j’ai écrit, j’ai pas réfléchi », avait coupé court ce jeune homme, qui n’a « pas d’avis particulier sur les Juifs » mais qui a déclaré en garde à vue lire des « médias alternatifs » comme « des chaînes Youtube » qui ne sont « pas mainstream ».

Il « s’abreuve » de médias « plutôt à tendance complotiste », avait complété un avocat des parties civiles, puisqu’il avait admis lire par exemple « Alain Soral », un essayiste d’extrême-droite franco-suisse.

« Il n’aime pas les Juifs, je ne sais pas pourquoi »

« Il n’aime pas les Juifs, je ne sais pas pourquoi », avait d’ailleurs avoué aux policiers son propre grand-père, qui a pourtant « plutôt de bonnes relations » avec ce petit-fils « gentil », « agréable » mais « un peu écervelé » et qui a « déjà eu des propos antisémites ».

Et Sasha X. n’aime « pas  les homosexuels et les transsexuels » non plus, avait fait savoir un avocat des parties civiles au cours de son procès. En garde à vue, le jeune homme s’était d’abord dit « ému par le nombre de morts palestiniens » dans le conflit entre Israël et le Hamas.

En attendant, sa « blague » sur Facebook a eu « des conséquences » sur sa vie, a dû admettre ce jeune alternant : après que sa blague ait été médiatisée, son téléphone a « commencé à sonner » à son réveil et a été « saturé de messages vocaux et d’appels Whatsapp » avec « des centaines et des centaines de menaces de mort ». « Ca a été un enfer », a-t-il soufflé.

Licencié « sur le champ » par son entreprise

Surtout, un « chargé d’affaires » de son entreprise est venu le trouver « à 14h » sur le chantier où il travaillait ce jour-là et l’a « licencié sur-le-champ ».

« Ils ont succombé à la pression médiatique des réseaux », avait soupiré Sasha X. à propos du groupe de construction Fayat. Lui-même a préféré quitter le domicile de son grand-père à Jonage pour déménager chez sa mère « en Ardèche ».

« J’ai quand même honte d’avoir écrit une chose comme ça », a finalement lâché ce jeune qui est avant tout « quelqu’un qui aide et qui aime aider ».

« Une blague pas drôle » qui « n’a fait rire personne »

Me Corine Serfati-Chetrit, l’avocate du Bureau national de Vigilance contre l’Antisémitisme, a elle rappelé que ces « messages d’une extrême violence et d’une extrême ignominie » ont « particulièrement marqué la communauté juive ». Elle voulait donc que la condamnation du jeune homme soit publiée dans « au moins deux journaux » comme par exemple « Le Monde et Le Figaro ». Me Adrien Bertomeu, l’avocat du CRIF, avait lui aussi dit que cette « phrase soi-disant humoristique » était surtout « une blague pas drôle » qui « n’a fait rire personne ».

« On fait référence aux fours crématoires avec une légèreté désarmante », s’était lui aussi lamenté Me Bertrand Sayn, l’avocat de la LICRA.

« Ce n’est pas parce qu’on est derrière un écran qu’on peut tout dire », avait-il ajouté à propos des réseaux sociaux, cette « caisse de résonance énorme et presque illimitée ». La procureure de la République avait requis pour sa part douze mois de prison avec sursis simple, une inéligibilité de cinq ans et une inscription au Fichier des auteurs d’infractions terroristes (FIJET).

« Vous avez raison de dire qu’on ne peut pas plaisanter avec certains sujets », avait conclu l’avocat de ce jeune « honteux » qui a promis qu’il « ne fera plus jamais de commentaires » sur le sujet.

Condamné à dix mois de prison avec sursis

Ses propos sont en effet « abjects », « détestables », « regrettables » et « regrettés ». Sasha X. a finalement été condamné à dix mois de prison avec sursis et sera inéligible pendant trois ans pour sa « provocation publique à la haine ». Il a été en revanche été relaxé pour « apologie publique d’un acte de terrorisme ».

Sur le plan civil, ce jeune « électricien monteur » qui n’a « toujours pas d’activité » devra verser 1.000 € de dommages et intérêts à chacune des quatre parties civiles et 500 € pour leurs frais de justice.

GF et MJ (PressPepper)

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