Depuis 2018, le Château de Versailles accueille chaque printemps le sommet Choose France et la fine fleur des patrons étrangers. Une mise en scène millimétrée pour nourrir le récit d’un président qui se veut premier entrepreneur de la nation, et qui a cette année encore obtenu de ses invités un chiffre record : 40,8 milliards d’euros d’investissements dans l’Hexagone. Un chiffre relayé avec insistance par l’exécutif sur tous les plateaux télé, brandi comme la preuve d’un succès économique pour notre pays et d’un succès politique pour le président. Mais ne nous y trompons pas, derrière ce chiffre et les autocongratulations officielles, le slogan de « pays le plus attractif d’Europe » sonne creux. En 2024, tous les regards étaient tournés vers la France avec les Jeux olympiques et la réouverture de Notre-Dame de Paris. Une occasion historique de promouvoir l’image du pays et de capter de nouveaux investissements. Pourtant, les résultats ne suivent pas : le nombre de projet d’implantation ou d’extension d’investissements étrangers a reculé de 14 % par rapport à l’année précédente. Sur le plan de l’emploi, les postes issus des investissements directs étrangers ont diminué de près de 27 % en un an. Concrètement, quand un projet crée en moyenne 125 emplois en Espagne, il n’en génère que 30 en France.

Ce recul de l’attractivité n’a rien d’un hasard. Il découle directement du climat d’incertitude politique installé au sommet de l’Etat. Et le paradoxe est risible : celui qui se félicite aujourd’hui de notre capacité à séduire les investisseurs est sans doute aussi celui qui, en un an, les aura le plus dissuadés de s’installer dans notre pays, en réduisant considérablement la visibilité économique et fiscale dont ils ont besoin. Ainsi, depuis la dissolution, en l’espace de douze mois à peine, les partis extrêmes ont gagné du terrain, trois Premiers ministres se sont succédé, une motion de censure a été adoptée pour la première fois depuis soixante ans et le budget a été voté dans des conditions inédites. Ce climat d’instabilité se serait déjà soldé par une perte de 4,4 milliards d’euros de PIB en 2024, et les projections anticipent jusqu’à 9 milliards en 2025. Dans le même temps, le pouvoir politique est figé, alors même que la trajectoire budgétaire échappe à tout contrôle : la dette dépasse désormais les 115 % du PIB, le déficit atteint 175 milliards d’euros et les intérêts à rembourser dépassent les 70 milliards cette année.

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Mais cette crise n’est que l’aboutissement visible d’un mal plus ancien. Avant de subir l’immobilisme, Emmanuel Macron l’a choisi. Depuis les gilets jaunes, le président a de fait renoncé à toute ambition de réforme économique. Ce qui, en 2017, devait être le socle de son mandat, à savoir libérer le travail, moderniser l’action publique, restaurer la compétitivité, s’est progressivement effacé au profit d’une gestion à courte vue. A partir de 2019, les « réformes Macron » sont devenues les « chèques Macron » et les électeurs qui avaient appelé de leurs vœux une recomposition autour d’un agenda de transformation ont été trahis.

Voilà pourquoi il est urgent, dès maintenant, que la droite républicaine porte un programme économique solide, structuré, crédible. Un programme fondé sur la liberté d’entreprendre, la valorisation du travail, la compétitivité industrielle et la responsabilité budgétaire. Car le prochain président n’aura pas le luxe de différer les choix. Il devra agir dès le premier jour non pas comme un commercial en chef mais comme un chef de chantiers, comme un responsable politique capable d’assumer les réformes difficiles bien qu’essentielles pour l’avenir du pays. Car les réformes structurelles sont plus que jamais nécessaires pour tirer pleinement profit de notre attractivité : non pas en affichant des milliards annoncés, mais en les transformant en emplois, en implantations, en croissance réelle. Fin des 35 heures, allègement durable des impôts de production, simplification des normes, maîtrise des dépenses publiques, les leviers ne manquent pas. A la droite de s’en saisir avant 2027…

Jean-François Copé, ancien ministre, maire (LR) de Meaux

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