« Sans aucun droit, vous avez réalisé, avec l’argent public et les services de la commune, des travaux pour une association privée. » Lundi 28 avril 2025, en plein conseil municipal de Saint-Laurent-du-Var, l’accusation fuse des bancs de l’opposition. Patrick Villardry (Union des droites pour la République) interpelle la majorité sur des travaux entrepris en 2024, aux frais du contribuable, pour le compte du Club Var Mer. « Mais la Ville n’est plus gestionnaire des terrains où se trouve le centre nautique » (lire par ailleurs), souligne le conseiller municipal.

« Ces travaux me semblent tout simplement inappropriés, voire illégaux », charge donc l’opposant. Avant d’annoncer qu’il va porter plainte, au titre de l’article 40 du code de procédure pénale (1): « Le procureur pourra analyser si ces faits sont fondés et dire si cela s’assimile à du détournement de fonds publics pour une entreprise privée, avec abus de pouvoir et prise illégale d’intérêts. Et voir pour engager les poursuites nécessaires. »

« Ça pourrait être du détournement de fonds publics »

Silence dans l’assemblée. S’ensuivent quelques hésitations dans les rangs de la majorité. Finalement, la contre-offensive est déléguée à Danielle Hébert, adjointe aux Travaux: « Nous avons effectivement fait des travaux. Une pompe de relevage a été changée. On a également constaté à cette occasion des problèmes de branchements électriques. Il fallait intervenir rapidement. » Ces réalisations, la Ville les chiffre à 15.000 euros, quand Patrick Villardry avance « 20.000 ou 30.000 euros ». Sans facture à l’appui, il précise avoir entendu ce montant en commission des Finances. Une observation partagée par Sandrine Belot, opposante étiquetée au Rassemblement national.

« Pour ce qui est du domaine public maritime, c’est très complexe », reprend avec indécision l’élue de la majorité. Avant de concéder que « la commune, aujourd’hui, n’est plus titrée sur ce domaine public maritime. Nos services sont en train de travailler là-dessus pour que la commune soit titrée. Et pour qu’on puisse accompagner le Club Var Mer d’une façon réglementaire. »

« Il y avait une urgence sanitaire »

Esclandres et esclaffades dans les rangs de l’opposition. « Ils admettent qu’ils sont dans l’illégalité, c’est un boulevard, hallucine le socialiste Marc Orsati. Ça pourrait être du détournement de fonds publics et maintenant ils sont pris de court pour se justifier. »

Son aparté terminé, il demande, à la cantonade, si « tout cela est bien légal? »

« Si on pensait que c’était à nous de faire ces travaux, oui », tente l’édile. « Sa bonne foi ne suffira pas face à la loi », commente l’élu de gauche. « Non mais attendez, on parle d’un club en souffrance. Il y avait une urgence sanitaire [les eaux usées remontaient] », continue de plaider le maire. Patrick Villardry se renfrogne et grince: « On verra à quoi aboutira la plainte. »

1. « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »

Le club occupe-t-il illégalement le domaine maritime ?

À qui appartient le terrain sur lequel se trouve Var Mer ? Sur les plans cadastraux mis en ligne par le gouvernement, le club nautique apparaît sur le domaine maritime public. Une information que les services de la préfecture se sont refusés à confirmer, malgré nos relances multiples.

Depuis janvier 2024, l’État concède ces plages à la Métropole Nice Côte d’Azur, désormais chargée d’attribuer les sous-concessions, ce qui relevait jusqu’alors des compétences de la municipalité. En toute logique, le centre nautique occupe donc l’une de ces sous-concessions aux mains de l’intercommunalité. Mais cette dernière dément toute paternité : « Nous ne gérons pas l’autorisation d’occupation du domaine délivré au club. »

Mais alors qui s’en occupe ? L’adjointe au maire de Saint-Laurent-du-Var déléguée aux Travaux, Danielle Hébert, a laissé entendre, lors du conseil municipal du 28 avril, « qu’apparemment, le club n’a pas d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public. »

« Var Mer occuperait donc illégalement le terrain ? », s’interroge la conseillère municipale (RN) Sandrine Belot. Sollicité, Hervé Expert, président du centre nautique, n’a pas souhaité répondre.