Née à Gand, en 1964, où elle vit et travaille aujourd’hui mariée au sculpteur Peter Buggenhout, elle est fille unique. Son père tenait une boucherie, aidé par sa mère. « C’est vrai, nous disait-elle, que je suis habituée depuis mon enfance au contact des carcasses de viande et à ne pas craindre la mort. Mais ce que je fais est tout différent. Chez moi, ce n’est plus du tout de la viande, je redonne vie à l’animal mort, je lui témoigne du respect. Il n’y avait jamais eu d’artiste chez nous, même si à leur manière, mes parents et grands-parents étaient très créatifs. Mon grand-père était fermier et très innovant dans la manière avec laquelle il greffait les arbres et bouturait les fleurs. »
Ses premières œuvres montraient des femmes repliées, cachées sous les couvertures qui réchauffent et protègent, mais aussi qui étouffent et occultent les visages.
Berlinde De Bruyckere conjugue le tragique et la beauté
Impressionnée par des images de chevaux morts le long des routes pendant la guerre 14-18, elle a beaucoup travaillé avec des corps et des peaux de chevaux qu’elle pend comme des drapés ou qu’elle gonfle et recoud.
Elle représenta la Belgique à la Biennale de Venise 2013, occupant tout le pavillon belge avec un énorme arbre couché dans la pénombre, comme un corps blessé. Un Saint-Sébastien fait d’un orme frappé par une tempête en France. Elle avait repris l’arbre dans son atelier pour en faire un double en cire. Cautérisant les plaies, bouturant les branches, disposant des coussins et des bandages entre les blessures de l’arbre.
Ces derniers mois, elle a montré de Venise à Mons, d’Essen à Maastricht ses « Arcangelo » debout sur la plante des pieds, la tête et le haut du corps recouverts de couvertures grises, imitant des peaux. Ils semblent décoller ou atterrir.
Elle puise son inspiration dans l’actualité comme dans l’histoire de la littérature et de l’art, de Grünewald, Cranach, Antonello da Messina ou Giorgione à l’œuvre de Pasolini et Coetzee. Le chorégraphe Alain Platel est pour elle une « âme sœur » dans « l’expression de l’être humain en perpétuelle recherche. »