On pourrait les croire aussi bien payés que des pilotes de ligne. Pourtant, à partir du 29 mai, les équipages de l’hélicoptère du Samu resteront au sol pour un mouvement de grève national illimitée. Ils appartiennent à une société privée, Babcock, une entreprise qui a décroché le marché du transport public sanitaire régional pour le Samu.

La réalité est tout autre. Le copilote est rémunéré au Smic. Le pilote, pour sa part, fait partie de la catégorie de la profession la moins rémunérée d’Europe, selon un audit réalisé par leur syndicat. Moins payé qu’un pilote roumain.

Depuis leur base, située sur le toit de l’hôpital l’Archet 2, les équipages dominent la ville et la baie des anges. Leur machine, le H145 conçu par Airbus Helicopter, est un bijou de technologie. Un nouvel appareil puissant, maniable, qui offre un volume habitable permettant de nombreux gestes techniques. Voilà pour le côté carte postale. Mais l’envers du décor est plus effrayant. Le copilote, rémunéré au Smic, ne dispose que d’un canapé pour se reposer lors de gardes de plusieurs jours. Ce qui interroge sur la sécurité des vols, tant on sait que l’aérien nécessite des équipages en pleine forme.

Le pilote, quant à lui, est moins payé qu’un jeune pilote assurant un vol VIP entre Saint-Tropez et Nice. « À travail égal, sur la base des rémunérations européennes, nous sommes le pays le moins bien rémunéré », explique Jean-Bernard Petroni, chef de base Samu 06, adjoint à la branche nationale hélicoptères du Samu du syndicat SNPL. La base Samu de l’hôpital L’Archet, dont l’hélicoptère jaune est très reconnaissable, assure près de 400 interventions par an. Ils sont six, trois pilotes, trois copilotes pour des permanences de sept jours de 8 heures à 20 heures.

Ces pilotes ont beau appartenir à une société privée – Backock – un groupe mondial basé en Angleterre, ils se trouvent sous tutelle du ministère de la Santé pour le budget.

Le 29 mai, et c’est tout à fait exceptionnel de la part d’une branche dont on n’entend jamais parler, ils seront en grève. Concrètement, l’hélicoptère du Samu restera cloué au sol.

« Notre préoccupation première c’est de faire du secours. Mais, face à l’indifférence du ministère et de notre patron, nous n’avons d’autre choix que de faire grève », se désole Jean-Bernard Petroni, 32 ans d’ancienneté. Un crève-cœur pour ces hommes qui ont le secours chevillé au corps. « Ce qu’il faut comprendre, c’est que nous sommes des CDI intérimaires. Le contrat décroché par notre entreprise n’est que de dix ans. Et il n’y a aucune obligation de faire de reprendre les équipages si notre société perd le contrat au moment du renouvellement. Dans ces conditions-là vous imaginez bien qu’il est compliqué de décrocher un crédit auprès d’une banque… »

Des équipages qui se sentent oubliés

Les équipages se sentent totalement délaissés, oubliés. Leur salaire n’a pas été augmenté depuis huit ans. L’ancienneté des pilotes n’est pas prise en compte. C’est une des raisons de leur mobilisation à partir du 29 juillet. En tel cas, le préfet des Alpes-Maritimes peut les réquisitionner les obliger à travailler, malgré le préavis déposé. « Nous verrons bien, mais nous voulons nous faire entendre. »

Le préavis est illimité. La section hélicoptères du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) réclame « de meilleures conditions de travail pour les Personnels navigants techniques SAMU (pilotes et assistants de vol). Ainsi « qu’une juste revalorisation de leurs salaires et l’instauration d’un réel dialogue social, tant au sein de leurs compagnies aériennes qu’au niveau de leur Convention collective nationale. Les PNT SAMU ne sont ni écoutés, ni considérés: ils sont à bout, très en colère et déterminés! », indique le syndicat.

Face à ce qu’ils estiment être un mépris de la part de leurs employeurs et du gouvernement, les membres de la base Samu 06 se disent prêts à engager le combat.