Avec l’exode des parisiens, la taille moyenne des foyers de la capitale continuera de se contracter dans les années à venir, d’après les projections de l’Insee publiées mardi.
La tendance n’est pas près de s’inverser. La population parisienne devrait poursuivre sa mutation dans les décennies à venir, sur fond de saignée démographique bien installée. Les derniers exercices de projection de l’Insee sur le nombre de ménages parisiens — c’est-à-dire un ensemble de personnes qui partagent la même résidence principale — en témoignent. L’institut dévoile une nette accélération des tendances. Paris perdra en moyenne 2600 ménages par an. Soit une baisse moyenne annuelle de 0,24% sur les 25 prochaines années. Cette baisse annuelle moyenne contraste avec celle de 0,07% observée entre 2008 et 2018. Un signe du changement profond de la manière dont les Français vivent dans la capitale.
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Entre chute démographique et éclatement des familles
Elle est d’abord liée à l’exode des Parisiens, depuis le début des années 2010. Paris a perdu plus de 100.000 habitants entre 2010 et 2021, soit une baisse de 5% en 11 ans. Ce sont principalement des jeunes actifs et des familles poussés par le coût de l’immobilier. «Face à la flambée des prix de l’immobilier et à la saturation du bâti , les ménages en quête d’un logement investissent des territoires auparavant peu attractifs, voire dévalorisés», expliquait Lydie Launay au Figaro en 2019. Une dynamique qui pourrait amener Paris sous la barre des 2 millions d’habitants entre 2050 et 2060, d’après une autre étude de l’Insee. «La baisse démographique est enclenchée depuis 2011, entraînée par de nombreux départs au profit de la banlieue proche et de la province», rappelle Marie Acs, cheffe de service adjointe au service des études de la branche francilienne de l’Insee.
L’étude montre aussi que la composition des familles et des foyers parisiens va poursuivre sa mutation dans les années à venir. D’abord avec le vieillissement des ménages. Sur la période, la part des 15-59 ans dans la population de la capitale a diminué au profit des personnes de plus de 60 ans. La part de ces derniers est passée de 19,9 % à 22,6 %, contre une baisse de 65,7 % à 64,2 % pour leurs cadets.
De plus, entre 2018 et 2050, le nombre de personnes vivant seules devrait ainsi passer de 51,7% à 54,5%, tandis que la part des familles monoparentales passera, elle, de 7,4% à 7,6%. Au global, la taille moyenne des ménages continuera de se contracter en passant de 1,88 à 1,76 personne par foyer. Un record, à l’échelle de l’Hexagone.
«Quand les foyers vieillissent, les enfants quittent le nid pour fonder leur propre foyer. C’est la même logique quand un couple se sépare : un foyer disparaît pour donner lieu à deux nouveaux», explique Marie Acs. Le vieillissement, ainsi que l’augmentation du nombre de familles monoparentales et de personnes vivant seules, devraient ainsi entraîner une hausse annuelle de 0,19% des ménages. Mais cet éclatement ne suffit par ) compenser la décroissance démographique de la capitale, estimée à -0,44% en moyenne annuelle.
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L’exception parisienne
La tendance à la baisse du nombre de ménages n’est pas nouvelle. Déjà, entre 2013 et 2018, Paris perdait en moyenne 2,3 ménages pour mille chaque année. Pourtant, entre 2008 et 2012, le nombre de ménages était en croissance de 0,09% par an. Une inversion de tendance difficile à caractériser selon la statisticienne : «Il est difficile d’expliquer ce retournement. Depuis 1968, le nombre de ménages à Paris a connu plusieurs évolutions, à la hausse comme à la baisse, avec des changements parfois brutaux.» «D’ailleurs, précise-t-elle, notre note contient des projections et non des prévisions. Nous ne faisons que “tracer un trait” en reproduisant les tendances déjà observées sur la période 2013-2018.» Un sursaut est donc toujours possible.
Par la plus faible taille moyenne de ses ménages et par sa décroissance démographique, Paris fait office d’exception en Île-de-France. «Contrairement aux autres départements de la région, Paris serait le seul à connaître une diminution du nombre de ménages chaque année entre 2018 et 2050», souligne l’Insee. «En effet, à l’exception de Paris (-0,24%), le nombre de ménages progresserait entre 2018 et 2050 à un rythme assez soutenu : 0,49% en moyenne (hors Paris).» Portés par leurs démographies très dynamiques, « la Seine-Saint-Denis (+0,58%), la Seine-et-Marne (+0,53%) et le Val-d’Oise (+0,50%) seraient les départements avec la croissance la plus élevée.»