Depuis plusieurs années, la baignade est régulièrement interdite sur des plages de Saint-Laurent-du-Var à cause d’une qualité de l’eau dégradée. Une enquête est toujours en cours concernant une station d’épuration à proximité.

La qualité des eaux de baignade à Saint-Laurent-du-Var, près de Nice (Alpes-Maritimes), est enfin en train de s’améliorer, à en croire l’Agence régionale de santé et la municipalité, qui ont tenu une conférence de presse commune mardi. Cette intervention visait à faire le point sur une polémique croissante ces derniers mois : des rejets d’eaux usées pourraient être à l’origine de cette pollution d’ampleur de la mer Méditerranée.

La baignade, interdite depuis juillet dernier sur deux plages (Beach club et Flots bleus), va être de nouveau autorisée, mais va rester interdite jusqu’à la fin de l’année sur deux autres à proximité (Landserg et Coustaud). Depuis plusieurs années, la qualité de l’eau est dégradée sur le littoral laurentin, entraînant des fermetures régulières et de nombreuses interrogations.

En raison de mauvais indicateurs bactériologiques cinq années de suite, les plages de Landserg et Coustaud subissent une fermeture administrative pour toute la saison à venir selon la législation en vigueur, même si les relevés sont meilleurs. Mais le maire de Saint-Laurent-du-Var, Joseph Ségura, se réjouit quand même des deux réouvertures qui étaient attendues. «On arrive peut-être au bout du tunnel», a-t-il affirmé. «Je ne désespère pas car nous avons trouvé la source de pollution», a assuré l’élu en visant une station d’épuration située à l’embouchure du fleuve Var, entre le centre commercial Cap 3000 et l’aéroport.

Membranes filtrantes

L’origine de la pollution fécale relevée par l’ARS restait jusque-là inconnue, mais celle-ci pourrait venir des rejets de cette station. Après un signalement à la justice de la régie métropolitaine Eau d’Azur, une enquête judiciaire a été ouverte par le parquet de Grasse. La régie accuse son ancien exploitant, la Serex, d’avoir mis en place un circuit de contournement des membranes filtrantes. Les contrôles des rejets auraient alors été faussés, éloignant la piste de la station comme étant à l’origine des mauvais relevés sur le littoral laurentin.

Des contrôles plus poussés ont finalement permis d’identifier un dysfonctionnement au sein de cette station d’épuration métropolitaine. Mais de son côté, le président de la Serex s’était défendu, dans les colonnes de Nice-Matin, en expliquant avoir alerté la régie concernant ces membranes filtrantes défectueuses, qui selon lui, n’auraient pas été changées pour des raisons budgétaires. «L’enquête est en cours et déterminera les manquements de chacun», a simplement commenté Vincent Ponzetto, le directeur général de la régie Eau d’Azur, à l’origine du signalement de cette situation à la justice.

Préjudices pour la commune

«Je souhaite avoir des réponses», a martelé Joseph Ségura. «Cela fait des années, je voudrais vraiment ne plus avoir de problème sur nos plages. C’est un épisode très douloureux pour la commune de Saint-Laurent-du-Var, qui nous a porté préjudice pour notre image, notre économie et pour le tourisme. Si on vous dit partout que l’eau est polluée, vous n’y venez pas en vacances», a-t-il encore déploré. L’activité de deux clubs nautiques a aussi été empêchée depuis février, ce qui a entraîné la commune à accorder des indemnisations à hauteur de 40.000 euros. La navigation est désormais de nouveau autorisée.

Dans le même temps, des élus d’opposition se sont alarmés de cette situation sur l’ouest du littoral azuréen. Quatre députés RN et UDR, autour d’Éric Ciotti, ont cosigné un courrier à la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, pour lui demander l’ouverture d’une enquête par l’inspection générale de l’environnement et du développement durable. «Tandis que la métropole et l’exploitant de la station se renvoient la responsabilité, nos côtes se transforment en égouts à ciel ouvert, sous nos yeux», ont-ils écrit. «Un audit indépendant permettrait d’identifier les éventuelles failles», a aussi réclamé Juliette Chesnel-Le Roux, élue métropolitaine et chef de file des écologistes niçois.

Nouvel exploitant

Suez est désormais le nouvel exploitant de cette station d’épuration controversée. Mais les membranes défectueuses ont été changées pour 4 millions d’euros, a indiqué le directeur de la régie. «Le nouvel exploitant dispose des éléments pour garantir la qualité des rejets. Dès 2022, nous avions lancé les études pour les remplacer», a-t-il ajouté. D’ici 2030, cette structure a néanmoins vocation à disparaître puisque les communes qui en étaient dépendantes vont être raccordées à la grande station niçoise «Haliotis 2», dont le méga chantier a commencé.

Du 1er juin au 30 septembre, l’ARS effectue un prélèvement par semaine sur différents sites pour s’assurer de la qualité des eaux de baignade sur la Côte d’Azur. Plus de 2800 échantillons ont été analysés en mer l’année dernière et 85% ont néanmoins été qualifiés de «bon». Seulement 77 (3%) ont été considérés comme mauvais.