L’Allemagne envisage d’introduire une taxe sur les revenus publicitaires des géants du numérique, tels que Google et Meta. Ce projet de loi, en cours d’élaboration, vise à rééquilibrer la charge fiscale et à soutenir le secteur médiatique national.

Le ministre des Affaires numériques et de la modernisation de l’État, Philipp Amthor, a affirmé vendredi au quotidien Die Welt qu’il était « juste de s’y atteler rapidement » afin de créer « un système plus équitable ». Il a fustigé les pratiques d’optimisation fiscale des « poids lourds de la tech » qui contrastent, selon lui, avec la pleine taxation des PME et des artisans allemands.

Taxer les revenus publicitaires

La veille, Wolfram Weimer, ministre chargé des Médias et de la Culture, avait déjà levé le voile sur ce projet de loi, qui prévoirait une taxe de 10 % sur les revenus publicitaires des plateformes numériques opérant en Allemagne. Dans une interview accordée à la Süddeutsche Zeitung, Wolfram Weimer a souligné que ces plateformes « ont énormément profité de la performance médiatique et culturelle, ainsi que de l’infrastructure de notre pays ». Il a explicitement cité Alphabet (maison mère de Google) et Meta (propriétaire de Facebook) parmi les cibles de cette mesure.

Le nouveau gouvernement allemand, formé par une alliance entre le conservateur Friedrich Merz et les sociaux-démocrates, s’est engagé à mettre en œuvre une telle taxe, dont les recettes seraient directement reversées au secteur médiatique allemand. Wolfram Weimer, lui-même ancien rédacteur en chef de plusieurs médias allemands, a exprimé son intention de dialoguer avec les représentants du secteur pour affiner le projet.

Une initiative inspirée par l’Autriche

L’Autriche a servi d’inspiration pour cette initiative, ayant instauré dès 2020 un impôt de 5 % sur les revenus publicitaires des géants du numérique. Pour le ministre Weimer, l’urgence est de mise, l’Allemagne devenant « dangereusement dépendante de l’infrastructure technologique des Américains ».

Il a par ailleurs dénoncé les entreprises « de type monopolistique » qui, selon lui, mettent « en péril la diversité des médias » et « la liberté des discours ». En exemple, il a cité le requalification du golfe du Mexique en golfe de l’Amérique par Google, sous la pression d’un décret controversé de l’administration Trump, illustrant ainsi la puissance de ces plateformes. Le syndicat allemand des services Ver.di a salué cette initiative, estimant qu’une « taxe numérique commencerait enfin à rééquilibrer les disparités entre les géants de la technologie et les entreprises de médias traditionnelles ».

L’Allemagne rejoint ainsi la position de la France et d’autres pays européens, qui ont déjà exploré ou mis en place des mesures similaires. Le projet d’une taxe numérique au niveau européen, un temps au point mort, a également refait surface à la suite de l’annonce des droits de douane décrétés par l’administration Trump, soulignant une volonté collective de l’UE de s’affirmer face aux géants américains du numérique.

(Avec AFP, Süddeutsche Zeitung et Die Welt.)