Le verdict est tombé : l’agence de notation américaine S & P a maintenu la note souveraine de la France, vendredi 30 mai, tard dans la soirée. L’agence n’a publié aucun commentaire, laissant sa notation telle quelle. Interrogé par l’AFP, le ministère de l’Economie «prend bonne note» de cette décision, sans plus de détail.
Le 28 février, S & P avait assorti sa note AA- d’une «perspective négative» évoquant des finances publiques «sous pression» et «une stratégie budgétaire au-delà de 2025 incertaine». Or aucune annonce de réduction drastique des dépenses n’est survenue depuis de la part du gouvernement. Mais François Bayrou a annoncé mardi 27 mai au micro de BFMTV qu’il allait présenter début juillet un «plan pluriannuel» de redressement des finances publiques. Il s’agira d’un plan «sur trois ou quatre années» qui «va demander un effort à tous les Français. Le plus juste possible, mais un effort suffisant pour que la France sorte de cette situation», a ajouté le Premier ministre, en évoquant notamment la piste de la «TVA sociale» déjà avancée par Emmanuel Macron le 13 mai sur TF1 : à l’étude, une augmentation d’au moins un point du taux de la taxe sur la valeur ajoutée, actuellement fixé à 20 %, qui pourrait rapporter plus de 10 milliards d’euros pour financer la Sécurité Sociale en faisant supporter l’effort à tous les consommateurs.
Mais François Bayrou a aussi admis, mercredi devant le Sénat, «qu’aucune des mesures» que proposera le gouvernement «avant le 14 juillet» pour son plan général de retour à l’équilibre des finances publiques n’était encore arrêtée. Le gouvernement doit trouver 40 milliards d’euros pour le budget 2026 en septembre en réussissant à faire des économies dans les dépenses de l’Etat, de la Sécurité sociale et des collectivités locales.
Le Premier ministre parie toujours sur la concertation avec les partenaires sociaux et les partis politiques, pour éviter une nouvelle censure parlementaire. Mais les syndicats – Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT en tête – sont vent debout contre la TVA sociale, tout comme la gauche et le RN : Marine Le Pen a encore menacé vendredi de censurer le gouvernement Bayrou si une telle mesure était adoptée. Cette incertitude persistante qui plane autour de la capacité de l’exécutif à réduire un tant soit peu la dette n’est pas pour rassurer les agences de notations.
Les deux autres grandes agences de notation Moody’s et Fitch avaient, en avril et mars respectivement, choisi de ne pas modifier leur note pour la France. Moody’s avait déjà dégradé d’un cran le pays en décembre dernier, la classant en Aa3, l’équivalent d’un AA-, et Fitch avait maintenu sa note AA- avec une «perspective négative».
Selon les projections économiques révisées de la Commission européenne, publiées le 19 mai, la France enregistrera le pire déficit public de la zone euro en 2025 et 2026, à respectivement 5,6 % et 5,7 % du PIB, alors que le gouvernement table encore sur 5,4 % en 2025 et 4,6 % en 2026, pour revenir sous 3 % en 2029.
Lundi, la Cour des comptes avait par ailleurs averti d’un risque de «crise de liquidité» de la Sécurité sociale l’an prochain en raison du dérapage «hors de contrôle» de ses dépenses.
Devant le Parlement mercredi, la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a pourtant maintenu l’objectif d’un retour à l’équilibre de la Sécurité sociale en 2029.
Un objectif ambitieux, puisque selon les propres prévisions du gouvernement dans le budget de la Sécurité sociale 2025, son déficit s’élèvera encore à 24,1 milliards en 2028, dernière année de prévision disponible.