Par
Fabien Massin
Publié le
31 mai 2025 à 7h30
La pratique du vélo en ville connait un fort regain d’intérêt depuis quelques années, à la faveur notamment de l’apparition des vélos à assistance électrique (VAE). Cet essor implique des aménagements de l’espace urbain nouveaux, afin qu’automobilistes, cyclistes et piétons puissent se déplacer en harmonie et en toute sécurité. Qu’en est-il de la pratique du vélo à Rouen (Seine-Maritime), ville au centre historique dense ? Quels sont les points noirs qui subsistent et les pistes d’améliorations ? Alors que la FUB (fédération des usagers de la bicyclette) doit dévoiler prochainement son nouveau baromètre*, nous sommes allés vérifier, guidés par des membres de l’association Sabine (société amicale pour la bicyclette en Normandie et dans la Métropole de Rouen).
Pour des aménagements sûrs, lisibles et dans la continuité
Petit point définition tout d’abord. « Un aménagement cyclable de qualité doit pouvoir être emprunté sans difficulté par un collégien de 12 ans ou un cycliste débutant, peu sûr de lui, résument Guillaume Grima et Pierre Héroux, responsables légaux de l’association Sabine. Une infrastructure de qualité doit permettre de se déplacer en sécurité par rapport au trafic routier, offrir une bonne lisibilité et tout cela dans la continuité. »
Réaliser un aménagement cyclable sur une portion puis se retrouver dans une zone de rupture sur 100 mètres, c’est ça ce que nous appelons la discontinuité et c’est dangereux.
Guillaume Grima et Pierre Héroux
Voici quelques points noirs à résoudre ou améliorer dans Rouen et son agglo (liste évidemment non exhaustive) :
Place Cauchoise
Un joli capharnaüm aux heures de pointe. Depuis l’arrivée de la T4, la possibilité pour les cyclistes d’emprunter la voie de bus représente une nette amélioration, c’est certain. Mais arrivé place Cauchoise c’est une autre histoire.
Si l’on vient des quais et que l’on veut rejoindre la rue qui monte à Mont-Saint-Aignan, il faut se déporter sur la gauche en traversant deux voies pour les voitures, se retrouver au milieu du carrefour et laisser passer les voitures qui viennent de la gare.
« Il faudrait aménager des zones de stockage ou de refuge pour les cyclistes, comme cela a été très bien fait boulevard de l’Europe, en face de l’institut national de la boulangerie », estiment Guillaume Grima et Pierre Héroux. Une situation comparable place Beauvoisine.
Bas du boulevard des Belges
Pour les cyclistes qui viennent des quais bas rive droite et qui veulent emprunter le pont Guillaume-le-Conquérant pour rejoindre la rive gauche, il faut être patient, traverser plusieurs voies et attendre devant plusieurs feux avant de pouvoir accéder à la rampe qui monte au pont.
« Dans ce carrefour, les voitures, d’où qu’elles viennent, peuvent le traverser en une seule fois alors que les cyclistes doivent passer par plusieurs feux », notent Guillaume Grima et Pierre Héroux. Les cyclistes estiment par ailleurs que le virage à 90 degrés pour arriver sur le pont n’est pas très confortable.
Une rue Jeanne d’Arc peu lisible
La voie cyclable délimitée par les bordures, dans le sens montant, constitue une véritable amélioration. Mais selon les cyclistes de Sabine il faudrait aller plus loin. « La rue est peu lisible, l’aménagement est un peu entre deux eaux, ce n’est pas encore un véritable espace partagé, jugent-ils. Il faudrait que les voitures ne puissent pas la traverser dans son entièreté, qu’elles soient obligées d’emprunter certaines rues adjacentes afin de casser le transit urbain, et ainsi créer des espaces véritablement apaisés pour les piétons. »
Quais hauts rive droite
Avenue du Mont-Riboudet, il y a désormais une piste cyclable clairement délimitée entre la route et le trottoir, pas de problème, chacun est sur son axe. Mais ce n’est pas le cas du côté du Théâtre des arts et du quai de la Bourse, où se trouvent des arrêts de bus très fréquentés, d’où les « conflits d’usage » récurrents entre piétons et cyclistes.
Entre le Mont-Riboudet et le boulevard Gambetta, il faut également être très vigilant aux abords des nombreuses intersections par où arrivent, dans des sens différents selon les cas, les voitures.
Place Saint-Paul et autres entrées d’agglo
Une entrée de ville et un sacré nœud routier dans lequel les cyclistes qui arrivent du plateau Est n’ont pas vraiment leur place. Dans l’agglo, plusieurs carrefours et rond-point demeurent problématiques pour les cyclistes, ces entrées d’agglo qui accueillent des flux importants de véhicules arrivant en milieu urbain : rond-point des vaches à Saint-Étienne-du-Rouvray, rond-point des Rouges Terres à Bois-Guillaume, rond-point des Alliés au Petit-Quevilly, boulevard Brossolette/zone du Bois-Cany au Grand-Quevilly, rond-point du Chapitre à Bihorel (où un dramatique accident est survenu en 2022), carrefour de la Demi-Lune à Déville/Maromme, etc.
Les voies cyclables bidirectionnelles sur les trottoirs
Ce sont ces pistes cyclables où les deux sens de circulation se trouvent côte à côte. « Quand on sur la voie qui se trouve du côté de la route, l’espace avec les voitures est réduit », constatent Guillaume Grima et Pierre Héroux. En hiver, la nuit, par temps de pluie et avec des lunettes embuées, par exemple, la visibilité est fortement réduite et le danger accru. »
D’où la préférence pour les voies bilatérales, de chaque côté de la route, et bien délimitées par rapport à la chaussée.
Des pistes pour la côte Sainte-Catherine
Une réflexion est actuellement en cours pour mettre en valeur pan incontournable de Rouen, qui attire toute l’année habitants et visiteurs. Mais aujourd’hui il n’y a pas d’aménagement cyclable pour s’y rendre.
« En l’état actuel des choses la voie est trop étroite pour pouvoir y aménager une piste cyclable, rapportent les membres de Sabine. Nous faisons ainsi une proposition : supprimer la voie automobile dans le sens descendant, sauf évidemment pour les riverains, avec la mise en place de bornes escamotables, ce qui libérerait de l’espace pour aménager une piste cyclable. »
Des améliorations notables
Bien sûr, au-delà de ces points noirs persistants il y a eu de nombreuses améliorations dans l’espace urbain ces dernières années, dans le sens d’un meilleur partage des voies entre piétons, cyclistes et automobilistes (sans oublier les trottinettes) : quais haut rive gauche, entre les ponts Guillaume et Corneille, sorte de voie rapide pour les cyclistes qui veulent traverser la ville d’est en ouest ; avenue Jean-Rondeaux et boulevard de l’Europe, avec des pistes cyclables bien délimitées (marquage, couleurs, dénivelés) ; avenue du Mont-Riboudet, etc.
Concernant les tout nouveaux aménagements avenues des Canadiens/Martyrs-de-la-Résistance, en travaux rive gauche depuis de nombreux mois, les cyclistes de Sabine ne se prononcent pas : « Nous ne sommes pas encore allés voir », disent-ils. Mais cela ne saurait tarder, à n’en pas douter.
*Le baromètre de la FUB est une enquête citoyenne conduite auprès des cyclistes, invités, à travers, un questionnaire à donner leur avis et leur ressenti sur la pratique du vélo dans leur commune (points forts et points faibles généraux, aménagements cyclables, question du stationnement, offre de location, vente, réparation, etc). Le dernier baromètre remonte à 2021. Le nouveau est actuellement en cours de réalisation, l’enquête s’achève et le 2 juin et les résultats seront dévoilés ultérieurement.
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