Un ministre de la Santé antivax qui part en guerre contre « Big Pharma » ? Impossible… sauf dans l’Amérique de Donald Trump. En charge de la Santé et des Services sociaux aux États-Unis, Robert Kennedy Jr a enchaîné les polémiques, que ce soit à propos du Covid-19, de l’autisme ou de la rougeole.

Lors d’une interview sur Fox News ce 8 mai, il lance une nouvelle bombe : les produits pharmaceutiques seraient la troisième cause de mortalité aux États-Unis après le cancer et les arrêts cardiaques. Il l’avait d’ailleurs déjà affirmé au Sénat le 30 janvier. Sans surprise, l’info est reprise sur les réseaux sociaux. L’extrait de Fox News fait plus de 460.000 vues sur ce post X, plus de 100.000 sur celui-ci et quelques dizaines de milliers d’autres ici ou . La vidéo se retrouve aussi sur Facebook et Instagram.

La vidéo de Fox News reprise sur X.La vidéo de Fox News reprise sur X. - Capture d’écran X

Avant de vider votre armoire à pharmacie dans les toilettes, restez avec nous le temps de vérifier.

FAKE OFF

À toutes fins utiles, on commencera par rappeler que les médicaments non utilisés ne doivent surtout pas être jetés, mais ramenés à la pharmacie.

Ce point étant fait, penchons-nous sur la source du ministre américain : lors de son audition au Sénat, il a précisé qu’il s’agissait d’une « étude récente » d’un certain Peter Gøtzsche. Ce médecin danois est lui aussi habitué des polémiques, au point d’avoir été expulsé en 2018 de l’ONG scientifique qu’il avait cofondée vingt-cinq ans plus tôt. Quant à l’étude citée, elle n’est pas si « récente » que ça puisqu’elle remonte à 2014. Selon le site Newsguard, qui a pu la consulter, ce qu’elle affirme n’est étayé par aucune donnée fiable.

De surcroît, elle contredit les chiffres institutionnels. Selon le CDC (l’agence américaine de protection de la santé publique), les dix principales causes de mortalités outre-Atlantique en 2014 étaient bien les arrêts cardiaques et les cancers… suivis des troubles respiratoires, des blessures accidentelles, des AVC, de la maladie d’Alzheimer, du diabète, de l’influenza et de la pneumonie, des troubles rénaux et des suicides. Nulle trace, dans ces statistiques, des produits pharmaceutiques. Des données plus récentes, qui remontent à 2022, voient les accidents prendre la troisième place du classement… mais n’évoquent toujours pas les médicaments (et ce, d’ailleurs, malgré la crise des opiacés qui frappe le continent nord-américain).

Par curiosité, penchons-nous sur les chiffres français : en 2022, le « top 5 » des causes de mortalité était chez nous constitué des cancers, des maladies cardiovasculaires, des maladies de l’appareil respiratoire (hors Covid-19), des accidents, suicides et homicides, et enfin du Covid-19.

Et au niveau mondial ? Pour l’année 2021, les statistiques de l’OMS évoquent les troubles cardiaques, le Covid-19, les AVC, les troubles pulmonaires, les infections respiratoires, les cancers, la maladie d’Alzheimer, le diabète, les troubles rénaux et la tuberculose… mais toujours pas les produits pharmaceutiques.