Le président Trump n’est pas connu pour sa passion pour l’histoire. Il n’a pas invité d’historiens à dîner à la Maison-Blanche pour débattre en toute liberté, comme Barack Obama, pas plus qu’il ne s’est vanté de dévorer de copieuses biographies, comme George W. Bush quand il se lançait dans des concours de lecture avec son conseiller Karl Rove.
Pendant sa première campagne, une plaque, apposée dans un de ses parcours de golf et qui commémore une bataille de la guerre de Sécession qui n’a jamais eu lieu, lui a valu des railleries. Il a beau régulièrement en appeler à la grandeur de l’Amérique, il ne se réclame que rarement des Pères fondateurs, et a un jour prétendu que si George Washington et Abraham Lincoln s’étaient présentés contre lui sur une même liste, il les aurait écrasés.
Reste qu’il est parfaitement conscient de la puissance de l’histoire. Et depuis qu’il est revenu dans le Bureau ovale, il a pris des mesures radicales pour promouvoir la vision qu’il en a – et bouleverser les institutions culturelles américaines qui influent sur le roman national américain.
En mars, dans un décret intitulé “Rétablir la vérité et la raison dans l’histoire américaine”, il s’en est pris à ce qu’il considère comme un dangereux “mouvement révisionniste” qui tenterait de saper les “accomplissements remarquables des États-Unis” et leur “contribution sans équivalent à la défense de la liberté, des droits individuels et du bonheur de l’humanité”.
Mainmise sur les préparatifs
Au-delà de la rhétorique, le président a décidé de remettre en question ou de prendre le contrôle d’institutions culturelles fédérales associées au domaine de l’histoire, dont la Smithsonian, le Service des parcs nationaux [qui gère les parcs naturels, mais aussi les monuments et propriétés historiques à l’échelle fédérale] et la Fondation nationale pour les sciences humaines.
Il souhaite également s’assurer la mainmise sur les préparatifs du 250e anniversaire de l’indépendance des États-Unis, qui doit avoir lieu l’an prochain, et a relancé son idée d’un Jardin national des héros américains, un parc orné de statues dédiées à des personnalités du passé.
Aux yeux de nombre de spécialistes, les décisions de Trump constituent une attaque contre la discipline qu’est l’histoire, dans l’espoir d’en écarter toute réflexion critique et ainsi purger le passé de faits gênants. “Il ne s’agit pas d’un retour à la raison, a rétorqué il y a peu l’Organisation des historiens américains dans une réponse au décret de Trump. Mais plutôt d’une tentative de rationaliser la destruction de la vérité.”
Contre les supposés défaitistes
Selon des sondages récents, les Américains, dans leur grande majorité et quelle que soit leur couleur politique, ne sont pas hostiles à une histoire complexe qui montre aussi bien les bonnes que les mauvaises choses. Pourtant, à en croire certains observateurs, par ses agissements, Trump s’efforce de plus en plus d’utiliser l’histoire comme un moyen de séparer les “vrais” Américains des défaitistes qui menaceraient le corps politique.
Pour Johann Neem, historien à la Western Washington University, Trump ne cherche pas à vanter un passé mythique uniquement blanc, comme l’affirment plusieurs de ses détracteurs. L’objectif est de s’en prendre à des ennemis actuels soupçonnés de déshonorer la grandeur de l’Amérique.
“De son point de vue, le problème, ce n’est pas que l’on célèbre Harriet Tubman. Ce sont les gens qui, aujourd’hui, pensent que les héros, ça n’existe pas.”
La succession de déclarations de Trump au sujet de l’histoire américaine coïncide avec les célébrations auto