René Bouan est un ovni dans la petite galaxie des nouveaux patrons. Le trentenaire fonctionne davantage comme ses aînés – David Ozdemir et consorts : il n’est pas spécialement attaché à un concept ni à un type d’établissement. L’inverse des jeunes loups qui marquent leurs empreintes avec des positionnements forts : bars à tapas, grands complexes en périphérie… Bouan, lui, est un couteau suisse. Après avoir commencé dans les bars à bière, il a enchaîné sur les bistrots à tapas, cantines ou encore bars-restos… Un mélange des genres qui le place en « simple financier » ? Pas question pour autant de bâcler ses investissements. D’ailleurs, il l’assure, il n’a jamais rien vendu. « J’essaie d’être le meilleur dans tout ce que je fais », souligne ce détenteur de cinq troquets à Rennes et un à Nantes. La progression de ce serial acheteur ? Il la doit au feeling. « Je marche par opportunités. »

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La success story de René Bouan commence en 2018 avec un pari un brin cavalier : lâcher cinq ans de carrière chez Decathlon -dont trois en tant que cadre- pour atterrir rue de la Soif. Pas l’idéal pour se faire une réputation dans un contexte où les bars à tapas et à cocktails fleurissent dans toute la ville. Qu’importe, il n’est pas là pour la gloriole. « Si j’avais eu le choix, j’aurais certainement acheté autre chose », concède-t-il. Mais l’opportunité est là. Pas chère. Un luxe, à deux pas de la place Sainte-Anne, pour laquelle on annonçait, à l’époque, une gentrification expresse. Qu’à cela ne tienne. René Bouan rachète le bar Le Sympatic, qu’il transforme via une franchise de l’enseigne de bière en libre-service, Monsieur le Zinc. Sept ans plus tard, Bouan ne regrette pas son choix. « A posteriori, c’était un bon choix, même si la rue Saint-Michel est devenue “ghettoland”. Grâce à Monsieur le Zinc, j’ai pu commencer à me développer. » Et à se former derrière la tireuse.

Trois ouvertures en deux ans

Trois ans et un petit pécule plus tard, il lance La Maison, un bar à bières artisanales, dans les anciens locaux du Café Laverie, rue de Robien. L’essai est transformé. « Sans fausse modestie, je pense qu’on est le meilleur bar à bières de Rennes », se targue l’humble patron. En 2021 toujours, l’entrepreneur brasse encore le filon du houblon en ouvrant Café Landru, à Nantes.

Mais c’est 2023 qui marque son entrée dans une autre dimension, avec deux ouvertures quasi simultanées. Cette fois, exit le tout bière. Avec d’autres associés -dont Benjamin Chedeville – il reprend, en juillet, le poussiéreux bar-brasserie Le Valy, fief des supporters rennais, pour le transformer en Roazhon pub. Le mastodonte, de plusieurs centaines de couverts, ne désemplit pas les soirs de match.

Discrétion

Le midi, il est aussi prisé par les travailleurs du coin, séduits par le côté guinguette revendiqué, à mille lieues de l’ancienne brasserie à papa. Deux mois plus tard, le Rennais rachète une autre institution : L’épicerie de Ginette et son bistrot à tartines, rue des Fossés. Un rachat en toute discrétion, qui lance une nouvelle stratégie. Racheter sans (trop) toucher à l’existant.

Même recette pour le dernier bébé de la nébuleuse Bouan, rue de Dinan. Détenu par Benjamin Chedeville et Alexandre Marais, Le Hangar entre dans son escarcelle en septembre 2024. Comme ses homologues du genre, le troquet fait bistrot le midi et bar à tapas le soir. « C’est plus simple en gestion de personnel. On a un cuistot qui bosse en restauration du lundi au vendredi midi. Et le soir, ça demande moins de qualification. Les serveurs font le boulot. » De quoi réduire les coûts. Et faciliter de prochaines reprises ? Aucun projet n’est sur le feu, promet-t-il. « On attend les opportunités. »