La première est cycliste professionnelle depuis 2020, la seconde est autrice et formatrice sur les questions d’égalité femmes-hommes. Deux rives et une vingtaine de kilomètres séparent ces habitantes de Plougasnou et Locquénolé, dans le Nord-Finistère. Les routes de Marie-Morgane Le Deunff et Aurélie Fontaine ne se seraient peut-être jamais croisées sans la parution de ce livre.

« Roule, rêve, ose », premier tome d’une série de portraits de sportives professionnelles, paraîtra le 13 juin 2025, aux Éditions Goater.« Roule, rêve, ose », premier tome d’une série de portraits de sportives professionnelles, paraîtra le 13 juin 2025, aux Éditions Goater. (Photo Éditions Goater)Un récit « sans cliché » ni « tabou »

C’est le premier tome d’une série de portraits de sportives professionnelles, à paraître le 13 juin 2025, aux Éditions Goater, qui réunit la coureuse cycliste et l’autrice depuis l’automne 2024. Leurs entretiens menés à La Virgule, un établissement culturel de Morlaix (29), ont découlé sur l’écriture de « Roule, rêve, ose ». Cet ouvrage illustré est destiné aux enfants à partir de 7 ans et raconte le quotidien de la coureuse finistérienne. En 2023, Aurélie Fontaine publiait un premier ouvrage jeunesse intitulé « Ce que peuvent les garçons », visant à rompre les préjugés sexistes sur les métiers et activités traditionnellement assignées aux femmes.

Je suis habituée à répondre aux journalistes sur le vélo, un peu moins sur le plan personnel et des choses pouvant être perçues comme taboues. En tant que sportive professionnelle, c’est important d’en parler librement.

Celui-ci se veut « sans cliché » ni « tabou » sur la vie d’une sportive de haut niveau. On y évoque la santé mentale, les blessures, la gestion de l’activité physique durant les règles ou encore le sexisme. « Dernièrement, j’ai adoré que Clarisse Agbegnenou allaite sa fille au bord du tatami et montre que ce n’est pas un souci, confie Aurélie Fontaine. On demande aux mères de travailler comme si elles n’avaient pas d’enfants mais la société dans laquelle nous vivons n’aide pas à trouver sereinement cet équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ».

Jean-Marie Goater, éditeur rennais à l’initiative du projet et féru de cyclisme, abonde : « De plus en plus de sportives parlent ouvertement de ces questions-là. C’est l’un de nos rôles de les accompagner en racontant la société d’aujourd’hui ».

Un pas de côté pour la cycliste

Le projet a rapidement convaincu la cycliste de 23 ans. D’abord parce que Marie-Morgane Le Deunff témoigne régulièrement de son parcours dans les écoles de la région et qu’évoquer des sujets de société ne l’impressionne pas davantage. Puis parce qu’après son bac, en parallèle du cyclisme, elle a suivi une formation de design et de graphisme. Alors, l’idée de « mettre en avant des sportives », sous la plume d’une « femme engagée » et à travers « l’univers coloré » de l’illustratrice Lucie Roullier, lui a paru être une aubaine.

L’occasion aussi d’aller au-delà de l’exercice médiatique du quotidien. « Je suis habituée à répondre aux journalistes sur le vélo, un peu moins sur le plan personnel et des choses parfois perçues comme taboues. En tant que sportive professionnelle, c’est important d’en parler librement… Et de dire aux plus jeunes que ce n’est pas toujours rose mais qu’on vit aussi des moments exceptionnels. »

À travers son témoignage, la Plouganiste souhaite aussi rendre visible les évolutions de sa discipline. « Si on veut devenir maman, des aménagements sont désormais obligatoires dans nos contrats. Ça n’existait pas quelques années en arrière. Avant, les filles n’avaient pas les mêmes moyens, ni les mêmes calendriers. »

Se raconter à l’heure des réseaux sociaux

De cette vie de vélo, la coureuse de l’équipe Winspace Orange Seal en partage quelques bribes sur son compte Instagram. « Je me détache progressivement des réseaux sociaux, confie-t-elle. Ça me prend du temps et certains contenus ne sont pas toujours constructifs. Fin 2024, j’y ai partagé la préparation de mon marathon et les encouragements m’ont fait du bien. »

Ces formats ont été bien utiles à Lucie Roullier, dessinant depuis Rennes, pour se familiariser avec le personnage principal. « J’ai regardé des documentaires sur le cyclisme féminin mais j’ai aussi beaucoup épluché ses stories, confirme l’illustratrice. Ça m’a permis de découvrir qui elle était comme cycliste et comme personne. L’idée était de ne pas véhiculer de préjugés dans la manière de la représenter. Je ne souhaitais pas en faire une femme uniquement badass [dur à cuire, NDLR], ni uniquement girly. Il faut coller à la réalité de son sport et du quotidien. Quand il pleut sur une course, je représente les taches de boue. »

Après une première participation au Tour de France féminin, en 2023, Marie-Morgane Le Deunff « garde dans un coin de [s] a tête », le rêve d’être sélectionnée pour participer, une deuxième fois, à la grande boucle féminine qui comptera deux étapes bretonnes cette année.

Pratique

« Roule, rêve, ose » en librairie le 13 juin 2025, 48 pages, à partir de 7 ans. Une version en langue bretonne sera également disponible. Tarif : 12 €.