Dans le parc des Argoulets, au nord de Toulouse, une centaine de brebis, quelques agneaux et un bélier patûrent paisiblement sous l’oeil expert de leur protecteur, Jean-Noël. Ancien berger d’estive, il est devenu « berger urbain » pour la société Ecozoone, propriétaire du troupeau.

Même en ville, la pratique pastorale est plus exigeante qu’il n’y paraît. Jean-Noël passera les trois mois du printemps dans sa caravane installée au milieu du parc, au plus près des bêtes sur lesquelles il veille jour et nuit, aidé par quatre chiens dont Jack, son fidèle Border Collie. Seul, il gère les aléas, les intempéries comme les heureux événements. Chaque matin, il déplace le troupeau, prenant soin de délimiter la zone avec des filets électrifiés. La journée s’écoule ensuite au « rythme de travail » de ses protégées (et leurs petits). « En fin de journée, elles mangent bien, alors je les rentre le plus tard possible », énonce-t-il.

La pastoralité au cœur de la cité

« On appelle écopâturage l’entretien de la végétation par des animaux domestiques », explique Louise Covemaeker, codirigeante d’Ecozoone. En 2005, l’entreprise fondée par Marjorie Deruwez faisait partie des pionnières. Aujourd’hui, l’écopâturage est entré dans les mœurs. « Dans les marchés publics, c’est presque devenu une obligation », se réjouit-elle.

Car, mise à part l’originalité de son matériel de motoculture, Ecozoone travaille comme n’importe quelle entreprise d’espaces verts, offrant ses services à des sociétés privées ou des collectivités, de plus en plus nombreux à se laisser séduire. D’abord, par l’aspect écologique de l’écopâturage, respectueux de la biodiversité. « L’animal mange quelques touffes, avance, se pose pour ruminer… Il ne détruit jamais tout sur son passage comme le ferait une machine », explique l’experte. Mais aussi par son volet social : la présence animale en milieu urbain induit un lien constant avec le public. « En montagne, on est seul au monde. En ville, il y a une grosse part de médiation et de pédagogie avec les habitants et les promeneurs », précise Louise Covemaeker.

Et le danger ? Aux Argoulets, le parc jouxte une barre d’immeuble. À part « quelques altercations sans gravité avec des chiens », Jean-Noël ne déplore aucun incident. « La malveillance existe, mais jamais envers le berger ou les bêtes. En revanche, de temps en temps, du vol de matériel », complète Ecozoone.

Face à l’engouement pour l’écopâturage, l’entreprise a lancé en 2018 une formation inédite au métier de berger urbain, principalement destinée à des publics en insertion.

Marie-Dominique Lacour

Sur la photo : Jean-Noël et Jack surveillent leur troupeau, dans le parc des Argoulets à Toulouse. Crédit : Marie-Dominique Lacour/ToulEmploi.