Publié le
10 avr. 2025 à 7h12
C’était une crainte exprimée lors du débat, organisé en 2007, sur l’opportunité de réaliser un grand contournement de Toulouse : à l’époque, le risque de voir le périphérique toulousain dans le rouge à horizon 2020 était déjà clairement établi. « En 2020, les temps de parcours moyens pour traverser l’agglomération toulousaine se dégradent sensiblement par rapport à la situation actuelle (en 2007, NDLR). Ainsi, en l’absence de contournement, mais en tenant compte de l’ensemble des mesures en faveur des transports en commun et des investissements routiers prévus par ailleurs, ce parcours prendrait en moyenne une vingtaine de minutes de plus à l’heure de pointe aussi bien pour une liaison entre Montauban et Martres-Tolosane que pour un parcours entre Montauban et Castelnaudary », indique alors une synthèse de la commission du débat public.
L’année 2020 est passée, et les craintes se sont malheureusement révélées exactes. Chaque jour, les automobilistes ressentent de plus en plus la difficulté pour circuler sur l’anneau toulousain. Le constat est inquiétant : poussée par une croissance démographique constante depuis 25 ans (entre + 15 et + 19 000 habitants dans l’aire urbaine chaque année, depuis 2000), la circulation sur le périphérique a littéralement explosé sur ce premier quart du XXIe siècle. Et malgré des aménagements structurants comme la mise à 2X3 voies de la rocade à l’ouest de Toulouse (2008), l’aménagement de l’échangeur du Palays en 2007, puis la mise à 2X3 voies de la rocade sud entre 2015 et 2021, ou encore la création d’une seconde ligne de métro (2008) et d’un téléphérique (2022), ce périphérique toulousain est en passe de ne plus pouvoir absorber la surcharge de trafic quotidienne en provenance de tout le département, voire de la région. Voici, avec les derniers chiffres connus, comment ce trafic a explosé en moins de dix ans, et à quel niveau, sur la base des dernières modélisations, cela va empirer ces prochaines années.
Les derniers chiffres : les tronçons du périph’ les plus circulé
La synthèse est sortie en février 2025 sous l’égide de l’Agence Urbanisme et d’Aménagement Toulouse aire métropolitaine (AUAT). Elle fait état du trafic routier sur les voies rapides urbaines de l’agglomération en 2023. Après une pause de la hausse liée à la crise sanitaire et au confinement, l’AUAT qui exploite les données de l’État et d’ASF, résume :
« En 2023, les tronçons du périphérique sont supports de 110 000 véhicules par jour. En 2023, les flux les plus importants sont concentrés au sud-ouest, entre les échangeurs de La Cépière et d’Empalot. Par rapport à 2019, au global, les flux sont stables. Ils ont augmenté sur la période 2019-2023 pour retrouver les niveaux de trafics de 2019, l’année où les niveaux de trafics les plus élevés ont été enregistrés sur le périphérique ».
Le trafic sur les voies rapides urbaines en 2023
Les tronçons où le trafic explose
Cette photographie de l’AUAT montre clairement les tronçons de périphérique où le trafic explose :
Entre 2014 et 2023, la partie du périphérique située à Croix-Daurade a enregistré 10 000 véhicules supplémentaires, passant de 111 123 véhicules /jour à 121 700. Une hausse dopée par la hausse du trafic sur l’A68 dont le nombre de véhicules est passé de 33 410 en 2014 à 49 100 véhicules chaque jour, en 2023.
D’autres secteurs sont sous tensions. Il y a le tronçon entre Empalot et Rangueil qui a gagné plus de 10 000 véhicules en dix ans (de 116 804 véhicules/jour en 2014 à 127 900 v/j en 2023).
Spectaculaire vers Borderouge
Le secteur de Lespinet a gagné 7000 véhicules par jour, passant d’environ 100 000 véhicules en 2014 à 106 800 en 2023.
Le Secteur de Sesquières connaît également une hausse de 10 000 véhicules/jour entre 2014 et 2023, passant de 126 755 véhicules/j à 136 200 véhicules/j.
C’est encore plus spectaculaire au nord de Toulouse dans le secteur de Borderouge. Là, entre les sorties de Borderouge et des Izards, ce sont 138 000 véhicules qui transitent chaque jour contre environ 116 000 en 2014.
En forte hausse sur l’autoroute A 64
Le trafic est également en forte augmentation sur l’A 64 où l’on est passé de 104 000 véhicules/ jour en 2014 à 117 200 véhicules par jour en 2023.
La rocade Est est également plus empruntée avec + 10 000 véhicules dans le secteur de Montaudran avec 105 300 véhicules/jour en 2023 contre 95 467 en 2014.
Des chiffres qui recoupent globalement les données Google Maps, déjà utilisées par l’AUAT pour déterminer les endroits de l’agglo où l’on perd le plus de temps dans les bouchons.
Fortes inquiétudes pour les prochaines années
Plus inquiétant, dès 2017, dans le cadre des études multimodales portées par l’État, Toulouse Métropole, le Département, la Région, et Tisséo, et visant à déterminer les projets routiers et de transports à prioriser pour limiter la casse des bouchons, une évolution du trafic sur le périphérique a été modélisée en tenant compte des projets devant aboutir d’ici 2030.
Cette modélisation a tenu également compte de projections socio-économiques issues du Plan de Déplacements Urbains (PDU) annonçant 245 000 habitants supplémentaires (+ 16% par rapport à 2017) sur l’aire urbaine et 194 000 emplois supplémentaires (+ 29% par rapport à 2017) sur cette même aire urbaine.
Et malgré la réalisation de la 3e ligne de métro (fin 2028), de la connexion ligne B (2027), du tramway express vers l’Aéroport (2026), de la mise en service de nouvelles lignes de bus Linéo, et de différents projets routiers dont la Jonction Est, la situation risque bien d’empirer.
Dégradation à venir sur le périphérique
Ce scénario modélise une dégradation de la circulation aux heures de pointe, le soir, sur l’ensemble du périphérique est, l’un des derniers endroits qui reste relativement fluide sur l’anneau toulousain en 2024, mais aussi au sud. La situation se bloquerait littéralement vers Empalot, Balma-Gramont et Sesquières par rapport à 2017.
Évolution de la congestion sur le réseau routier entre 2017 et 2030 (situation de référence) en heure de pointe du soir
Évolution de la congestion sur le réseau routier entre 2017 et 2030 (situation de référence) en heure
de pointe du soir (©CITEC)« Un périphérique saturé dans son ensemble »
Les conclusions pour 2030 y sont limpides :
« Grâce aux projets mis en œuvre, les transports collectifs et les modes actifs absorbent l’essentiel des déplacements supplémentaires sur le cœur d’agglomération. Cependant, les
déplacements continuent également de s’accroître fortement en périphérie, y compris sur des relations pour lesquelles les modes alternatifs à la voiture restent insuffisamment efficaces à 2030. La situation sur le réseau routier continue de se dégrader avec un périphérique désormais saturé dans son ensemble en heure de pointe du soir,
la densification de la circulation sur les pénétrantes autoroutières (RN124, A64, RD2, A621, RD916, RD50…). Les autorités poursuivent : dans l’ouest toulousain, une saturation du réseau routier qui s’étend davantage qu’à l’est et de manière plus marquée par rapport à 2017 (jusqu’à 15 kilomètres du centre-ville de Toulouse sur la quasi-totalité des voies) ».
Un scénario noir qui a été envisagé dès les années 2000, qui inexorablement prend forme année après année depuis 25 ans, et qui promet une fin de décennie 2020 à s’arracher les cheveux dans l’agglomération toulousaine.
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