Par
Brian Le Goff
Publié le
4 juin 2025 à 18h16
C’est un geste que les nouveaux pilotes vont de plus en plus apprendre à faire dans les prochaines années : brancher leur appareil. À l’aéroport de Rennes, l’arrivée de la nouvelle école d’aviation Airskol signe l’introduction d’un engin inédit, un avion 100 % électrique qui se raccorde au réseau électrique pour se recharger comme une voiture.
Cet aéronef, un Vélis élektro, loué à la société brestoise Green Aérolease et fabriqué par le constructeur slovène Pipistrel, est le premier avion électrique certifié au monde par l’AESA (Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne). Il permet ainsi de former les pilotes privés, c’est-à-dire ceux qui ne prennent les commandes que pour eux ou celles d’un tout petit avion.
Un avion « 14 fois moins bruyant »
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce véhicule tranche par sa signature sonore beaucoup moindre, « 14 fois moins bruyante (soit seulement 60 décibels d’intensité sonore) qu’un avion classique », selon Nicolas Rousseau, fondateur d’Airskol.
Nicolas Rousseau, fondateur d’Airskol. (© Brian Le Goff / actu Rennes)
« Il y a une très grosse réduction du bruit qui fait qu’on a moins l’impression de bourdon dans la tête après une journée de formation. On peut aussi voler dans une zone urbaine sans déranger », constate Vincent, pilote-instructeur au sein d’Airskol, 1 500 heures de vol à son actif.
Ce que l’on entend surtout, c’est la rotation des hélices et le vent contre la carlingue. En revanche, contrairement aux avions thermiques, quand tu veux de la puissance, tu l’as immédiatement avec l’électrique. Ç’a un côté très rassurant, il n’y a pas de temps de latence.
Vincent
Pilote-instructeur
Seul bémol, l’autonomie de cet avion de 425 kg, dont 160 de batteries, n’est que de 45 minutes. « Pour ce que l’on en fait aujourd’hui, ça suffit amplement, tempère toutefois Vincent. Une séance de formation dure entre 30 et 45 minutes. » Avec cet aéronef, Airskol forme les pilotes sur le décollage, l’atterrissage, la maniabilité, les procédures d’urgence, etc.
À l’aéroport de Rennes, les pilotes en herbe peuvent dès à présent apprendre à naviguer dans l’air dans un avion électrique. (© Brian Le Goff / actu Rennes)« Rester sur du thermique, c’est être dans le déni »
« On manque de pilotes. Il n’y en a pas assez pour combler tous les départs en retraite. C’est une écurie de plus », note de son côté Benjamin Herfray, autre pilote-instructeur d’Airskol, qui entend prendre en compte la gestion de l’humain dans le cadre de la formation. « Il y a tellement d’éléments à suivre et à connaître quand on pilote que l’on peut parfois oublier l’essentiel. Il faut donc apprendre aux néo-pilotes à gérer tous les paramètres sans être dans une pression constante. »
L’avion électrique, c’est quelque chose qui va arriver un de ces jours sur les lignes commerciales. Ce serait dommage de ne pas en profiter. Rester sur du thermique, c’est être dans le déni.
Benjamin Herfray,
Pilote-instructeur d’Airskol,
Néanmoins, la première formation de base de 45 heures ne peut pas s’effectuer totalement sur le Vélis électro. « Un tiers de la formation doit se faire sur un appareil thermique qui permet de former à la navigation plus longue. « On va par exemple apprendre à nos futurs pilotes comment bien atterrir d’urgence en dehors d’une piste d’atterrissage classique », continue Benjamin.
Airskol a déjà réalisé 43 vols découverte avec le Vélis électro, premier avion électrique certifié au monde par l’AESA (Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne). (© Aéroport de Rennes)« Quatre tonnes de CO2 économisés »
Airskol travaille ainsi avec neuf pilote-instructeurs. Les premières heures de formation ont été dispensées à partir du 1er mars 2025, une fois l’avion électrique arrivé.
L’avion a depuis volé 40 heures, « ce qui a permis d’économiser quatre tonnes de CO2 », précise Nicolas Rousseau, passionné par l’aviation très jeune, revenu vers cette discipline à 40 ans avec ce projet en tête.
Cette nouvelle école d’aviation suit cinq élèves en licence actuellement. C’est le cas de Yann, âgé de 42 ans. « J’étais parti vivre à l’étranger et c’est à mon retour que je me suis dit que c’était l’occasion de changer de vie, comme de carrière, en me dirigeant vers l’aéronautique. » Ainsi, après ses toutes premières de vol, la quadragénaire s’émeut encore : « C’est un petit, mais on se croit aux commandes d’un grand. »
Yann est l’un des premiers élèves de l’école d’aviation Airskol à Rennes. (© Brian Le Goff / actu Rennes)
C’est complètement différent que d’être passager. C’est un ressenti fois 10 en étant aux commandes. Puis, avec cet appareil électrique, on entend le vent, c’est d’autant plsu impressionnant. La seule que vous ne faites pas dans cet avion, c’est l’annonce aux passagers.
Yann
Néo-pilote
Airskol a par ailleurs réalisé 43 vols découverte auprès de particuliers. Ces vols découverte sont accessibles à n’importe qui. Vous pouvez réserver le vôtre en ligne, moyennant un prix à partir de 165 euros. « Pour apprendre à piloter un avion, il n’y a pas de budget prédéfini. Cela dépendra de chaque personnage et de la façon dont se passe son apprentissage. »
« On veut donner un maximum de notoriété à Airskol »
Pour le directeur de l’aéroport, Yannick Bouiller, cette nouvelle proposition vient renforcer l’attractivité de l’infrastructure régionale aux « 18 000 mouvements (comprenez atterrissages et décollages, N.D.L.R.) d’aviation générale chaque année ».
On ne retrouve pas cette possibilité d’effectuer cette formation avec un avion électrique dans énormément de situations. Nous, on y croit vraiment et on veut donner un maximum de notoriété à Airskol.
Yannick Bouiller
Directeur de l’aéroport Rennes-Bretagne
L’investissement pour l’aéroport a été de trouver de la place pour accueillir l’appareil et de cofinancer à hauteur de moins d’une dizaine de milliers d’euros la borne de recharge pour l’avion.
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