Si l’Hexagone, en pleine construction de son projet de budget 2026, est loin d’être tiré d’affaire, le gouvernement s’est félicité de ce signal jugé encourageant.
L’étau budgétaire se desserre (un peu) pour la France. Ce mercredi 4 juin, la Commission européenne a annoncé, à l’occasion d’un point presse, son verdict sur la procédure pour déficit excessif qui vise la France. « La procédure pour déficit excessif est en suspens pour la France, mais nous constatons quelques petits dérapages. Nous attendons de voir comment ils évoluent », a déclaré le commissaire européen Valdis Dombrovskis. Une nouvelle saluée par Paris, qui se félicite d’une « évaluation positive de ses efforts budgétaires » engagés depuis le budget 2025.
Comme chaque année, la Commission européenne a fourni aux États membres des « recommandations spécifiques pour relever les défis socio-économiques et remédier aux déséquilibres macroéconomiques détectés », à l’occasion du paquet de printemps du « semestre européen ». Un travail réalisé à partir de documents fournis par la France à Bruxelles, fin avril. Cette année, le gouvernement français, comme l’Italie, la Hongrie ou la Pologne, engagés dans une procédure identique, devait également présenter des preuves d’actions « suivies d’effets » visant à améliorer sa situation budgétaire.
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Selon la Commission, à la lumière de ces documents, dans l’immédiat, « aucune mesure supplémentaire ne doit être prise dans le cadre de la procédure pour déficit excessif (…) à ce stade ». Ainsi, dans une nuance assez caractéristique de la communication subtile de Bruxelles, la procédure pour déficits excessifs est « en suspens » mais « pas suspendue », décrypte une source à la Commission. Laquelle ajoute : « Nous utilisons le terme anglais en “abeyance”, qui signifie que l’État membre est en bonne voie pour réduire son déficit budgétaire conformément à la trajectoire décidée par le Conseil sur recommandation de la Commission. »
L’Autriche aussi visée par une procédure
Pour rappel, la France est sous le coup d’une procédure pour déficit excessif depuis juillet dernier, au même titre que l’Italie, la Belgique, la Hongrie, la Pologne, la Slovaquie et Malte, ainsi que la Roumanie. Ces pays, dont les budgets ne respectent pas les engagements européens – dette sous 60 % du PIB, déficit sous 3 % – doivent donc prendre des mesures correctrices au plus vite. Dans son communiqué, la Commission estime que la Belgique doit modifier sa « trajectoire corrective », et accuse la Roumanie de ne pas avoir agi suffisamment fort. Par ailleurs, « l’ouverture d’une procédure de déficit excessif fondée sur le déficit est justifiée pour l’Autriche », indique l’exécutif européen.
La France est dans les clous mais elle doit faire attention
La Commission européenne
La France, pour sa part, demeure bel et bien sous le coup de cette procédure. La mise en suspens ce mercredi, au fond, signifie simplement que le pays tient la trajectoire budgétaire sur laquelle il s’est engagé auprès de Bruxelles « pour l’instant », selon des experts. Et encore, pas parfaitement. En effet, la croissance annuelle des dépenses nettes de la France pour 2025 – un des chiffres clés scrutés par Bruxelles pour évaluer la trajectoire budgétaire d’un pays – s’établit pour l’heure à 0,9 % soit légèrement au-dessus de la trajectoire prévue pour Paris (0,8 %). Malgré ce « petit dérapage », la Commission considère ainsi « que la France est dans les clous mais qu’elle doit faire attention », prévient un connaisseur, « elle reste sous surveillance très rapprochée ».
D’ailleurs, pour l’année prochaine, la prévision de déficit de la Commission demeure largement plus élevée que celle du gouvernement (5,7 % du PIB contre 4,6 %). Cet écart colossal (plus de 30 milliards d’euros) s’explique par le fait que la Commission établit ses chiffres « à politiques inchangées » tant que les mesures d’économies ne sont pas actées. Ainsi, logiquement, elle recommande à la France d’en prendre de nouvelles afin de continuer à se conformer à la trajectoire de rétablissement de ses finances publiques – à défaut, la procédure de déficit excessif risque de ne pas rester longtemps « en suspens ». Bruxelles sera à coup sûr particulièrement attentive au contenu du plan d’économies de 40 milliards d’euros pour l’année prochaine que le premier ministre doit présenter début juillet.
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Bref, l’Hexagone, en pleine construction de son projet de budget 2026, est loin d’être tiré d’affaire. Le gouvernement va devoir poursuivre, voire amplifier des efforts budgétaires déjà polémiques dans un contexte politique pour le moins conflictuel. Toutefois, il s’est félicité de ce signal jugé encourageant. « La France a bien adopté une première série d’actions suivies d’effets en réponse à la trajectoire de correction recommandée par le Conseil et déclare une suspension de la procédure pour déficit excessif », analyse Bercy, dans un communiqué. Le gouvernement Bayrou « prend note de cette évaluation positive de ses efforts », et « demeure pleinement engagé à poursuivre la mise en œuvre et la montée en charge des réformes prévues dans son plan budgétaire et structurel à moyen terme ».