Avant les mots, ce sont les images qui reviennent. Des photos en noir et blanc qu’avec le recul on trouvera peut-être un peu kitch, façon Abercrombie & Fitch, mais ne jugeons pas trop sévèrement nos premiers émois. Un homme de dos sous la douche, le biceps gonflé : c’était la Tendresse sous la peau. Deux garçons sur un ponton, chemises ouvertes, regardant vers le loin et se désirant sans doute à bas bruit : c’était Un jeune Américain. Et surtout, oui, ce beau visage baissé exsudant les yeux fermés quelques volutes de fumée, ce visage dont on croyait alors qu’il était sans doute celui de l’auteur (il ne l’était pas, mais on l’apprendrait plus tard), avec en dessous ce titre qui passait pour la beauté même : la Symphonie des adieux. Les couvertures 10-18 des romans d’Edmund White s’alignent dans notre mémoire et n’oublions pas, pour beaucoup, les portes secrètes qu’elles ont ouvertes une fois passée l’épreuve de la caisse, quand les modèles manquaient, quand acheter un livre était déjà un premier pas.
L’écrivain américain Edmund White – romancier, dramaturge, essayiste, critique littéraire – est mort mardi à New York a confirmé auprès du Guardian son agent Bill Clegg. Il avait 85 ans, mais était resté particulièrement jeune d’esprit, sémillant, canaille. Il y a quelques mois, en décembre, plus culte que jamais, il répondait encore aux questions «sexy» du magazine Interview, posées par 18 personnalités gays parmi lesquelles