Des bactéries capables de manipuler le cerveau des
mouches drosophiles pourraient être bientôt diffusées chez des
moustiques. L’objectif ? Réduire la capacité de ces derniers à
transmettre certains virus tropicaux. Cette approche inédite a la
particularité de ne pas s’attaquer directement aux
insectes.

Une influence sur certaines fonctions cérébrales

Aux quatre coins du monde, les moustiques – particulièrement
ceux de l’espèce Aedes albopictus (moustique tigre) – sont
vecteurs de maladies, principalement en zone
tropicale
. Malgré différentes campagnes de prévention et
autres projets de réduction des
populations de moustiques
, certains virus sont préoccupants,
notamment le virus Zika, le chikungunya et surtout, le virus de la Dengue. Une
publication dans la revue Cell Reports du 27 mai 2025
décrit une nouvelle méthode pour tenter de limiter la
transmission des virus
par les moustiques.

Les chercheurs de l’Université de Californie à Santa Cruz
(États-Unis) ont travaillé sur un genre de bactéries en particulier
: les Wolbachia. Ces dernières sont naturellement
présentes chez de nombreux insectes, notamment les mouches
drosophiles. Or, ce type de bactérie agit sur la reproduction des
insectes mais pas seulement. En effet, les auteurs de l’étude ont
observé une influence sur certaines de leurs fonctions
cérébrales.

Les bactéries se transmettent à la descendance exclusivement via
les femelles et donc, favorise la reproduction de ces dernières.
Ainsi, les mouches drosophiles femelles infectées sont davantage
prêtes à s’accoupler et ce, même avec des mâles d’autres
espèces
, donnant ainsi des œufs hybrides souvent sans
intérêt. Selon les chercheurs, les bactéries s’implantent
profondément dans les zones cérébrales en lien avec la prise de
décision et à la reproduction. Or, ceci n’est pas un hasard puisque
les auteurs ont identifié environ 170 protéines modifiées
dans le cerveau des femelles infectées
et plus de 700
directement issues des bactéries Wolbachia.

moustique tigre

Crédit :
iStock

Crédits : mountbatten421 / iStockFreiner la transmission des virus chez les humains

Si l’étude concerne la mouche drosophile, les bactéries sont
source d’espoir au niveau des moustiques. En effet, des travaux
antérieurs ont déjà prouvé que celles-ci étaient capables de
bloquer la réplication des virus tropicaux chez
les moustiques infectés. Autrement dit, diffuser des
Wolbachia parmi ces insectes permettrait de freiner la
transmission de ces mêmes virus chez les humains. De plus, il
s’agit ici d’une lutte biologique n’ayant aucunement recours à des
produits de type insecticide.

Cependant, les essais déjà menés par le passé n’ont pas montré
une grande efficacité et ce manque de succès semble être le
résultat d’une méconnaissance des fondements
moléculaires
de ce genre de solutions potentielles. Pour
Timothy Karr, principal meneur des travaux, ce champ de recherche
est toutefois en progression, si bien que bactéries
Wolbachia ont de l’avenir dans la lutte contre les
maladies tropicales.