Donald Trump a ordonné une enquête pour déterminer si des individus «ont menti au public à propos de l’état mental» de son prédécesseur «afin d’exercer les prérogatives et responsabilités du président».
Un complot contre l’Amérique ? Donald Trump a ordonné mercredi 4 juin le lancement d’une enquête contre l’entourage de Joe Biden qu’il soupçonne d’avoir «comploté» afin de dissimuler le déclin de l’ancien président et usurper son pouvoir. L’avocat de la Maison-Blanche, dispose le décret, est ainsi chargé «d’enquêter, dans les limites prévues par la loi, pour déterminer si certains individus ont comploté afin de mentir au public à propos de l’état mental de Biden et exercer de manière inconstitutionnelle les prérogatives et responsabilités du président».
«Ces derniers mois, il est devenu de plus en plus évident que les collaborateurs [du démocrate] ont abusé du pouvoir des signatures présidentielles en utilisant un stylo automatique pour dissimuler [son] déclin cognitif (…) Ce complot constitue l’un des scandales les plus dangereux et les plus inquiétants de l’histoire américaine», appuie le républicain, alors que plusieurs ouvrages parus ces derniers mois ont révélé comment l’état de santé du président démocrate a été sciemment dissimulé aux Américains tout au long de son mandat. Joe Biden, discret depuis son départ du 1600, Pennsylvania Avenue, a aussitôt balayé des allégations «ridicules et fausses», et affirmé que c’était lui qui «prenai[t] les décisions concernant les grâces, les décrets, les lois et les proclamations».
«Autopen»
L’enquête doit en partie déterminer «pour quels documents la signature automatique a été utilisée», en particulier des grâces et des décrets. Juste avant la fin de son mandat, Joe Biden avait effectivement accordé à titre préventif une série de grâces à des élus et des fonctionnaires pour les protéger de potentielles futures «poursuites judiciaires injustifiées et politiquement motivées». Parmi eux, se trouvaient des membres de la commission d’enquête sur l’assaut du Capitole ou des membres de sa famille, notamment son fils Hunter, une cible récurrente du camp trumpiste.
Mi-mars, Donald Trump avait déjà déversé sa logorrhée antidémocrate sur son réseau Truth Social en affirmant que «les “grâces” que Joe Biden l’endormi a accordées (…) sont NULLES, NON AVENUES ET SANS EFFET, parce qu’elles ont été faites par stylo automatique». «En d’autres termes, Joe Biden ne les a pas signées mais, plus important encore, il n’en savait rien ! Les documents ne lui ont pas été remis et les personnes qui les ont signés ont peut-être commis un crime», ajoutait l’ancien magnat de l’immobilier.
Pour autant, la Constitution américaine n’encadre pas l’utilisation de l’«autopen», une machine à signature automatique utilisée par les présidents américains depuis… 1804. Son article 1 section 7 dispose simplement que le président «signe» les projets de loi s’il les «approuve». En 2005, à la demande de George W. Bush, le ministère de la Justice a estimé que «le président n’est pas tenu d’apposer personnellement sa signature sur un projet de loi (…) Il peut le signer au sens de l’article 1, section 7, en demandant à un subordonné d’y apposer sa signature, par exemple par stylo automatique».
Sur ce point-ci, il n’y a rien d’inconstitutionnel à ce que des documents officiels aient été signés par le stylo automatique – une pratique que Donald Trump lui-même a reconnu avoir utilisée, «seulement pour des documents très peu importants».
«Entrave aux actions du gouvernement»
L’enjeu pour Donald Trump, qui promet à ses électeurs de pourfendre «l’État profond», est ainsi de prouver que tout se passait dans le dos du démocrate. En ce sens, le «complot en vue de commettre une infraction ou de tromper les États-Unis» est reconnu par la loi comme un crime fédéral à travers la section 371 du titre 18 de l’US Code of Laws .
«Si deux ou plusieurs personnes conspirent soit pour commettre une infraction contre les États-Unis, soit pour frauder les États-Unis ou l’une de leurs agences de quelque manière ou à quelque fin que ce soit, et qu’une ou plusieurs de ces personnes commettent un acte pour réaliser l’objet de la conspiration, chacune sera condamnée à une amende (…) ou à une peine d’emprisonnement ne dépassant pas cinq ans, ou les deux, dispose la loi. Toutefois, si l’infraction dont la commission est l’objet du complot est un délit seulement, la peine pour ce complot ne doit pas dépasser la peine maximale prévue pour ce délit.»
Si cette définition est très large, elle s’appuie en grande partie sur la définition fournie par la Cour suprême dans deux affaires antérieures, précise le Département de la Justice. Dans un avis rédigé en 1924 dans l’affaire Hammerschmidt vs. United States, le complot peut signifier «tromper le gouvernement pour obtenir frauduleusement des biens ou de l’argent» mais aussi prendre la forme d’une «entrave aux actions du gouvernement légitime, par la tromperie, la ruse, la fraude ou tout autre moyen malhonnête». À l’administration Trump de le prouver.