« On se dit qu’on va finir par arriver au travail avec nos déambulateurs ». Chasuble CGT sur le dos, Fahima est employée au pôle service à l’accueil de Carrefour Toulon Grand Var. Elle s’indigne à l’idée d’une retraite tardive pour ses collègues en rayons qui « portent constamment des charges lourdes ». Et pour elle-même, qui travaille en horaires contraignants, jusqu’à 22h.
Fahima fait partie des 250 personnes selon la police, et 500 selon la CGT, à s’être réunies hier à Toulon, à l’appel national de la CGT et de la FSU (Fédération syndicale unitaire). Sur la place de la Liberté, la manifestation interprofessionnelle a démarré à 11h dans une ambiance chaleureuse. Les représentants syndicaux et le PCF (Parti communiste français), venu soutenir la mobilisation, espéraient plus de participants. Mais cette dernière pourrait bien être « le démarrage d’une nouvelle série d’actions », selon Alain Tournay, secrétaire départemental de la FSU Var.
Une mobilisation à point nommé
Car la date du 5 juin n’a pas été choisie au hasard. Au même moment à l’Assemblée nationale, les députés communistes et ultra-marins soumettaient au vote un texte demandant l’abrogation de la réforme des retraites. Un vote qui rimait avec « heure de vérité », pour Pierre Daspre, secrétaire de la fédération varoise du PCF, qui comptait bien « démasquer ceux qui sont réellement pour l’abrogation de la loi et ceux qui la soutiennent ». Cette résolution, non contraignante pour le gouvernement, a été largement adoptée grâce aux votes de l’ensemble de la gauche et des députés du Rassemblement national.
« Je ne sais pas si on se rend compte de la portée symbolique de ce vote. Le gouvernement a contre lui une très grande majorité des Français, et l’Assemblée nationale dans toute sa diversité », se réjouit Alain Tournay. « Le résultat montre que la mobilisation a payé. On attend du gouvernement qu’il abroge la réforme », complète Pierre Daspre, satisfait.
La manifestation, interprofessionnelle, réunissait secteurs public et privé. Dans le cortège, Mathieu « croise les doigts pour que le processus aille jusqu’au bout ». Employé chez Primark depuis neuf ans, il s’inquiète de la différence d’espérance de vie entre cadres et ouvriers et se mobilise « pour ne pas mourir au travail ».
Outre la réforme des retraites, la CGT et la FSU dénoncent « un budget militaire qui atteint des sommets » et des coupes à venir dans les services publics. « Les élèves ont besoin d’enseignants, pas de tanks », ont scandé les représentants syndicaux lors de leur discours devant les manifestants. Pour les Finances publiques, la journée de mobilisation a commencé un peu plus tôt. Dès 8h du matin, avant la manifestation générale, une douzaine d’agents membres de la CGT Finances publiques se sont rassemblés devant l’accueil du Service des impôts des particuliers de Toulon. Ce mouvement complémentaire entendait alerter sur la dégradation continue des conditions de travail dans ce secteur: suppressions de postes, privatisation de missions, fermeture de services, notamment celui de l’accueil physique de Var amendes, remplacé depuis janvier 2024 par un dispositif téléphonique et de courrier électronique.
« Macron mène une guerre contre les salariés »
« On nous vole deux ans de vie en bonne santé, ce n’est pas tolérable », dénonce Françoise Martinez, secrétaire départementale de la CGT Finances publiques. Au-delà de la très contestée réforme des retraites, c’est un mal-être plus profond qui est pointé du doigt: « On assiste à un syndrome France Télécoms, avec des cas de suicides et de tentatives de suicide, complètement occultés et masqués par la direction », alerte-t-elle.
Malgré les annonces du gouvernement, 550 suppressions de postes ont été recensées cette année au sein des Finances publiques. « Macron mène une guerre contre les salariés », accuse la syndicaliste. Françoise Martinez dénonce une logique brutale, menée « au motif de l’économie de guerre », aux dépens des agents, du service public et du contribuable.