Publié le
5 juin 2025 à 18h32
« Déranger le match ». Voilà l’immense défi qui se dresse devant Marion Waller, candidate surprise à la primaire socialiste depuis le 16 mars 2025 pour la mairie de Paris. Dans moins d’un mois maintenant, la franco-allemande de 32 ans devra avoir complètement inversé la tendance pour « déjouer les pronostics » face au poulain choisi par Anne Hidalgo, Rémi Féraud, et à l’ancien Premier adjoint, Emmanuel Grégoire. Les 30 juin et 1er juillet prochains, elle devra avoir convaincu une majorité des quelques 3700 militants du PS. Un pari qu’elle aborde avec une envie débordante. « Aujourd’hui, en France, il n’y a que 20 % de femmes maires. C’est qu’on ne nous donne pas le pouvoir. Il faut le prendre ! », a-t-elle lancée, imperturbable, mercredi 4 juin 2025, à l’occasion de la présentation de son programme.
« Je suis une femme libre »
« Il est cinq heures. Paris… s’éveille. » Gobelet en plastique dans une main, Jacques Dutronc en fond sonore, Marion Waller invite ses militants à venir l’entourer derrière le pupitre installé à l’intérieur de la péniche Le Mazette, amarrée à deux pas du métro Gare de Lyon (12e). La présentation de son programme pour les Municipales 2026, baptisé « Partager Paris » et imprimé sur papier cartonné, touche à son terme.
Féminisme, Grand Paris, urbanisme… Durant une grosse heure, l’ancienne plume d’Anne Hidalgo a dessiné les grandes lignes de « son Paris ». Elle a surtout parlé de sujets qui ont façonné son parcours et a marqué ses différences avec ses concurrents : elle est femme et jeune. « En arrivant à Paris à 17 ans, j’ai découvert ce qu’était une vraie ville de gauche. J’ai pu circuler en Vélib’, prendre le Noctilien pour rentrer de soirée, aller à des manifestations féministes, rencontrer des gens très différents », a-t-elle rembobiné.
La socialiste Marion Waller, première candidate à dévoiler un programme complet, mercredi 4 juin 2025. (©AD / actu Paris)
Parmi ses soutiens, la conseillère municipale (PS) de Romainville (Seine-Saint-Denis), Soraya Jebari, n’a pas tari d’éloges : « Elle n’a tout simplement pas attendu qu’on l’autorise à se lancer. » Celle-ci a également rappelé leur première rencontre : « C’était lors d’un événement militant, où l’on a fait de la boxe. Je peux vous dire que c’est une battante sur le ring. » Son père ne nous a dit pas autre chose : « Quand elle a une idée, elle va au bout… Son féminisme s’est exprimé très tôt ».
Marion Waller va, effectivement, droit au but. Comme lorsqu’elle était ailier droit au football : « Je suis une femme libre et j’entretiens l’espoir d’une gauche éveillée, qui dénonce haut et fort les inégalités de race, de sexe, etc. Une gauche qui n’a pas peur d’être traitée de woke. » Dans son programme, elle propose notamment l’expérimentation d’un congé parentalité pour le deuxième parent, égal en durée et en statut à celui du premier parent, pour les agents de la Ville : « une avancée majeure pour l’égalité entre les sexes et la reconnaissance de toutes les familles ».
« Penser l’avenir des villes, c’est mon métier »
La benjamine de la primaire socialiste assume s’inscrire totalement dans la continuité des deux mandats d’Anne Hidalgo. C’est d’ailleurs en 2014 que son engagement parisien a démarré : « Avoir eu une maire, femme, de gauche, c’est quelque chose qui m’a rendu extrêmement fière. Ça a été fantastique de pouvoir voter pour elle et d’ensuite faire sa campagne ». Elle intègre à cette époque l’équipe programme, puis coécrit un livre rassemblant les propositions citoyennes, avant de réaliser son stage de fin d’étude comme conseillère de l’adjoint en charge de l’urbanisme, de l’attractivité et du Grand Paris.
Marion Waller a contribué aux chantiers des rues aux écoles et les forêts urbaines à Paris. (©AD / actu Paris)
Au cours de celui-ci, elle travaille sur des dossiers emblématiques comme Saint-Vincent-de-Paul ou pilote le concours Réinventer Paris. « J’ai aussi contribué à de grands chantiers, comme les rues aux écoles, les forêts urbaines, les logements sociaux, etc. », ajoute-t-elle. Elle rejoindra, plus tard, le cabinet de la maire, où elle sera en charge des affaires funéraires et suivra, entre autres, la création d’un outil entièrement public : la Société publique locale funéraire de Paris (SPL FP).
Désormais directrice du Pavillon de l’Arsenal, centre d’urbanisme et d’architecture de Paris, elle s’appuie sur un socle de compétences solides. « Penser l’avenir des villes, c’est mon métier », argue-t-elle. Et rejette l’idée que le combat des 30 juin et 1er juillet prochain est perdu d’avance : « Le PS n’est pas une monarchie, où l’on intronise son successeur. On vote pour un projet, un élan ! »
« Le logement, les transports, ça se règle à l’échelle du Grand Paris »
Celui-ci aura pour fil rouge « partager » et comme condition : le Grand Paris. « C’est la seule candidate qui a conscience qu’il y a une vie après le périphérique. Que le logement, les transports, ça se règle à l’échelle du Grand Paris », note Soraya Jebari. La diplômée de Sciences Po et de l’ENS-Ulm dit, en effet, faire du Grand Paris « une nécessité absolue du prochain mandat : « Nos mesures, on va les porter avec d’autres élus du Grand Paris ».
Abel Guggenheim, militant soixante-huitard a été séduit par la voie alternative offerte par Marion Waller : « On assistait à une guéguerre entre deux hommes [il fait référence à l’opposition médiatique entre Rémi Féraud et Emmanuel Grégoire]… Mais c’est la seule qui parle réellement d’urbanisme… »
Une direction qui prend racine tant dans son parcours professionnel, que dans son vécu. « Elle a grandi à Maisons-Laffitte (Yvelines). De là-bas à Paris, la piste cyclable… c’est n’importe quoi. Elle a expérimenté le passage de la banlieue à Paris », rappelle son père.
« Comment on poursuit cette belle histoire ? »
« Ce qu’on attend du PS aujourd’hui, c’est de bâtir l’avenir, d’être d’avant-garde », plante la troisième candidate socialiste. Elle évoque notamment un « droit au ciel », avec la création d’un grands réseau de toits publics et partagés, avec des guinguettes et de l’agriculture urbaine sur les musées, gymnases ou grandes institutions.
La drag queen Maxima, résidente de la péniche Le Mazette et soutien de Marion Waller. (©AD / actu Paris)
Mais aussi une taxe des vols entrants : « Nous n’allons pas faire de grands travaux, nous serons dans la continuité. Et nous irons chercher l’argent là où il est, en taxant le transport aérien, utilisé par les plus aisés, pour financer la transformation écologique. » Rappelons que la dette de la Ville de Paris est attendue à 9,3 milliards d’euros pour la fin de 2025. Elle conclut : « Face à la droite réactionnaire, montrons qu’à gauche, nous faisons confiance à la jeunesse et à l’avenir ! » Le compte à rebours est lancé.
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