Par
Adrien Filoche
Publié le
6 juin 2025 à 7h58
Une nuit cauchemardesque. Quatre hommes âgés entre 20 et 37 ans ont été convoqués devant le tribunal de Rouen ce jeudi 5 juin 2025. Il leur est reproché de s’être rendus cagoulés, dans la nuit du 12 au 13 avril 2025, au domicile d’une famille à Sainte-Marie-des-Champs (Seine-Maritime), près d’Yvetot et d’y avoir commis des violences. Dans ce dossier, complexe, qui se perd dans les divergences de version entre les quatre prévenus, il est question d’une mystérieuse dette de 500 euros.
Un couteau sous la gorge
Retour sur les faits. Il est 3 heures 30 du matin cette nuit-là. Sam*, son compagnon Thibault* et son frère Matthieu sont réveillés en pleine nuit par des cris et des jets de pierre. Quatre hommes se présentent devant le domicile. Ils sont alcoolisés. Jérôme*, le plus âgé et déjà condamné à de la prison dans le passé, explique qu’il s’est rendu sur place afin de récupérer une dette de 500 euros que lui doit Thibault, à la suite de l’achat d’un véhicule. Il demande à s’expliquer avec lui.
Sans succès. Les quatre individus éméchés repartent. Dans une première version, ils seraient à pied, dans une deuxième, ils seraient en voiture. Finalement, ils reviennent sur les lieux quelques instants plus tard. Cette fois-ci, les parents de Sam et Matthieu sont arrivés sur place.
S’en suit des violences, des coups portés à l’encontre du père et de la mère. Les victimes racontent que les agresseurs ont voulu pendant un temps voler un véhicule, avant de se raviser. Matthieu, lui, est plaqué sur le sol, un couteau sur la gorge. L’un des individus finit par attraper son téléphone. Il repartira avec, comme gage de la dette toujours non remboursée.
Dans une situation confuse et après la scène de violence, les quatre individus repartent. Ils seront interpellés le lendemain matin par les gendarmes, plusieurs ont été reconnus par la famille.
Le point de départ : une soirée alcoolisée
À la barre, Bastien*, l’un des prévenus, raconte : « On était en pleine soirée. On a bu des verres de trop. J’étais au courant de l’histoire de dette. Je ne voulais pas laisser Jérôme* tout seul. On y est allé sur un coup de tête. »
Kevin*, le plus jeune des quatre, relate que Bastien était à l’initiative de l’expédition punitive : « J’ai suivi mon pote. » Les deux ne cachent pas que l’objectif de cette sortie était de s’en prendre à Thibault.
« On est juste parti pour le tabasser », confie sans sourciller Kevin, qui indique toutefois n’avoir pas connaissance de l’histoire de dette. Il reconnaît également avoir essayé de mettre « une balayette » au père de Sam et de Matthieu.
C’est parti en vrille.
Bastien,
l’un des prévenus.
Interrogé, Adrien* maintient ses déclarations et soutient qu’il n’était pas présent lors de cette expédition punitive. « Mais pourquoi les trois autres indiquent que vous étiez présent lors des faits ? », questionne le président. « C’était pour mettre les choses sur moi », répond le prévenu, déjà condamné à de multiples reprises pour des délits routiers.
Jérôme, qui réfute les intentions de violences, reconnaît avoir eu l’idée de se rendre là-bas. Aucun des quatre mis en cause ne reconnaît l’utilisation d’un couteau. Pourtant, le médecin qui examine Matthieu le lendemain confirme que celui-ci à bien des traces de couteau sous la gorge. Le spécialiste lui donne quatre jours d’ITT, et deux pour son père et sa mère. Restés à l’intérieur du domicile, Sam et Thibault n’ont pas été violentés.
Entendus par les forces de l’ordre, trois des prévenus reconnaissent l’essentiel de faits, même si les versions ne concordent pas en tout point. Seul Adrien, lui, conteste fermement avoir participé à cette expédition punitive.
La famille est traumatisée
« Il y avait autre chose à faire que la violence », témoigne Sandra, la mère à la barre, qui a reçu des coups au torse lors de la rixe. Traumatisée par les évènements, elle indique encore en faire des cauchemars. Matthieu, lui aussi, raconte vivre lui aussi dans la peur depuis cette nuit.
Lors de sa prise de parole, l’avocate de la famille se dit « surprise » des quatre discours des prévenus et estime qu’ils « n’assument pas les faits, ils ne sont pas convaincants ». Pour ses clients, elle réclame des sommes de dommages et intérêts allant de 500 à 2400 euros, ainsi que le remboursement de mobiliers de jardin, détruits lors de la scène.
À son tour, le procureur de la république évoque une « affligeante expédition punitive » et soutient que « les différences de version ne changent rien sur le plan juridique ». Le ministère public réclame la condamnation des quatre individus, la peine la plus lourde étant de 30 mois de prison assortis pour la moitié d’un sursis probatoire d’une durée de deux ans pour Jérôme, déjà multiple condamné et « le seul avec un réel mobile ».
Les conseils des trois prévenus Jérôme, Kevin et Bastien soutiennent que leurs clients sont désolés de la scène qui s’est déroulée ce soir-là, soulignent qu’ils reconnaissent et assument les faits, mais nient l’utilisation d’un couteau. Quant à l’avocate d’Adrien, elle plaide la relaxe et affirme qu’il « n’y a pas suffisamment d’éléments dans le dossier pour le condamner », sa participation à l’expédition punitive n’étant selon elle pas avérée.
Le tribunal doit rendre prochainement son délibéré et fixer la peine** des prévenus.
*prénoms d’emprunt
**Ces peines sont susceptibles d’appel. Tout justiciable demeure présumé innocent tant que toutes les voies de recours n’ont pas été épuisées
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