Par
Anthony Soudani
Publié le
6 juin 2025 à 15h39
EXCLUSIF ACTU LYON. C’est l’un des grands dossiers de la Métropole de Lyon. Les transports en commun et notamment leur développement vont être au centre des élections municipales et métropolitaines de 2026 à Lyon. Alors que certains opposants à Bruno Bernard, président du Sytral et de la Métropole, réclament encore et toujours un métro E, ce dernier donne une réponse claire à ce sujet. Futurs tramways, lutte contre la fraude, critiques… le patron écologiste du Grand Lyon répond aux questions de notre rédaction dans une interview exclusive ce vendredi 6 juin.
Le doublement des rames du métro B « maintenu » pour fin 2025
Actu : La modernisation des lignes de métro semble accuser du retard, notamment en ce qui concerne le métro B (doublement de la taille des rames attendu en 2025)… Est-ce que tout sera fini dans les temps ?
Bruno Bernard : Le projet d’automatisation du métro B a pris du retard dans son déroulement depuis son lancement. Nous sommes sur le doublement des rames qui a commencé. Des rames doubles circulent déjà. On est encore en train de tester le système de pilotage automatique avec une nouvelle version qui va arriver. Le doublement des rames complet est maintenu pour la fin d’année 2025.
Où en est-on de l’automatisation du métro A et le remplacement du matériel des métros C et D ?
B.B. : Ce projet de rénovation des métros A, C et D qu’on a prévu va coûter 1,3 milliard d’euros avec des travaux jusqu’en 2035. Il y aura un changement complet des matériels et une automatisation des lignes pour améliorer très fortement les fréquences et le confort de ces métros. Le premier est le métro D en 2030. Pour le métro C, c’est 2033. Le métro A, c’est pour 2035. Concernant ce dernier, il y aura des évolutions avant avec des ajouts de rames. Il devrait il y avoir une 17e et une 18e rame pour améliorer la fréquence.
Les rames du métro B vont être doublées d’ici la fin d’année 2025. (©Nicolas Zaugra/ actu Lyon)Bruno Bernard fait une annonce : le T6 en route dès février 2026
Où en sont les chantiers des tramways T6 Nord, T9 et T10 et du Bus à haut niveau de service ? Quelles sont les dates de mise en service à jour ?
B.B. : Les travaux du T6 seront terminés en fin d’année. Il ouvrira en début d’année prochaine, mi-février 2026. Le BHNS ouvrira en deux phases. Une première phase Part-Dieu – Kimmerling prévue début mars 2026, et Kimmerling – Sept Chemins pour le deuxième semestre 2027.
Les projets T9 et T10 seront plutôt terminés en deuxième partie de 2026.
Selon nos informations, le T9 serait plutôt livré pour début 2027, voire avril-mai, et non 2026…
B.B. : Entre le moment où les travaux sont terminés, il y a deux mois de tests et des marches à blanc sans le public… Je n’ai pas exactement la date en tête, mais ce sera plutôt fin 2026.
« Il n’y aura jamais de métro E »
Le Bus à haut niveau de service (BHNS) devait être livré en une seule phase. Vous avez évoqué des difficultés de discussion avec la Ville de Bron, est-ce que cela s’est amélioré ?
B.B. : Ça suit son cours. On a des expropriations dans ce dossier qui prennent du temps. On essaie de négocier avec les propriétaires pour trouver des solutions qui sont moins violentes. Exproprier quelqu’un, c’est toujours difficile. Dans cette phase de négociation, c’est plus facile quand on est aidé par la commune concernée. Mais ce n’est pas uniquement la raison. Je ne dis pas que le retard est dû au maire de Bron.
Concernant le Tram express de l’ouest lyonnais (Teol), où en est le projet ? Il y a toujours des inquiétudes après le sondage sur le terrain et avant le début des études…
B.B. : La concertation est en cours. L’enquête publique est prévue à l’automne. Nous rencontrons les communes de juin à juillet sur des ateliers très spécifiques d’insertion des stations. Ces rencontres sont menées par les vice-présidents Béatrice Vessiller et Jean-Charles Kohlhass.
Voici le tracé final du futur Teol pour rallier l’ouest lyonnais avec une partie souterraine. (©Sytral)
Certains de vos adversaires promettent toujours le métro E. Vous, vous continuez à faire avancer le Teol. Est-ce que d’ici aux élections, le Teol sera déjà lancé sans possibilité de revenir en arrière ?
B.B. : Nous pouvons toujours revenir en arrière sur des projets. Je pense de toute façon qu’il n’y aura jamais de métro E. D’abord parce qu’il n’est absolument pas justifié en terme capacitaire et que nous n’en avons pas les moyens budgétaires. Cela n’aurait aucun sens.
Une enquête environnementale explicitait déjà que le Teol serait surdimensionné, notamment au niveau de l’impact carbone. C’est une réalité et nous l’assumons. Il n’y a pas d’autres solutions que de passer en souterrain, sous la colline. Les voiries sont trop contraintes pour la voiture. Mais le projet Teol est bien dimensionné. Le milliard économisé entre ce projet Teol et le métro E Alaï – Bellecour représente notre ligne de rocade est. C’est un choix d’équilibre.
Que certains fassent des promesses… on va nous expliquer qu’il faut des métros partout, mais ce n’est pas la réalité.
Un tramway vers Écully ou le plateau nord ? Bruno Bernard répond
Est-ce que l’ouest n’est finalement pas un peu oublié de votre politique alors que vous développez énormément l’est de la métropole de Lyon ?
B.B. : De façon globale, il n’y a pas de développement urbain possible à l’ouest, alors qu’à l’est, nous avons des populations en zone dense qui n’étaient pas desservies, comme Mas du Taureau à Vaulx-en-Velin, Carnot-Parmentier à Saint-Fons. Nous avons encore une capacité de développement urbain d’activité économique ou d’habitation à l’est.
Bruno Bernard, président du Sytral, évoque la solution d’un bus à haut niveau de service ou un tramway vers le plateau nord de la métropole de Lyon. (©Anthony Soudani / actu Lyon)
Le maire d’Écully continue de réclamer un tramway Part-Dieu-Écully…
B.B. : Si on regarde la population, Écully est la ville qui perd le plus d’habitants dans le Grand Lyon au dernier recensement. Depuis le départ de l’EM Lyon, nous avons beaucoup moins de voyageurs sur la ligne C6 centre-ouest vers Écully (20 000 voyageurs par jour). La discussion qu’on a eue avec le maire d’Écully, c’est électrifier la ligne pour améliorer le bus ou aller jusqu’au tramway. Mais le sujet ne se justifie que s’il y a une densification. Sur une quinzaine de fonciers qui avaient été travaillés par nos équipes, le maire était en désaccord sur quatorze d’entre eux. Les conditions n’étaient pas réunies.
Quelles sont les solutions pour améliorer la desserte du plateau nord de la métropole de Lyon ?
B.B. : C’est une liaison très importante à améliorer. Pour l’instant, il n’y a pas de solution sur le plateau nord parce que nous avons des élus locaux qui ont des positions totalement irréalistes. Ils disent : « On veut un métro, mais on ne nous donne pas de métro, alors, on se fout de nous. » Il n’y aura jamais de métro à 3 ou 4 milliards d’euros pour le plateau nord. Mais il faudra trouver une solution pour améliorer cette desserte. Cela fait partie des points faibles du réseau.
Cela pourrait passer par un bus à haut niveau de service ou un tramway.
« Il faut que le métro fonctionne mieux que ça »
Pour vous, le métro n’est donc plus adapté au développement urbain de la métropole…
B.B. : La dernière ligne de métro a été lancée dans les années 1990. Pendant les trois mandats de Gérard Collomb, il y a eu juste deux stations, puis deux autres qui ont été livrées sous notre mandature. Le besoin de métro n’existe plus. Le coût du métro est six fois plus cher que le tramway au kilomètre et il ne correspond pas à nos besoins. Nous faisons le même choix que les équipes précédentes.
Le plus gros besoin, c’est le plateau nord avec plutôt un tramway qu’un métro. Il n’y aura plus de ligne complète de métro en plus dans la métropole.
Il y a eu des améliorations notables, mais il demeure encore des pannes, notamment sur le métro B. Avez-vous des explications ? Êtes-vous satisfait du travail de la RATP depuis leur arrivée au 1er janvier 2025 pour la gestion du réseau (métros, tramways, Rhônexpress et funiculaires) ?
B.B. : Concernant la RATP, oui, je suis satisfait parce que les usagers n’ont pas vu de différence. Tous ceux qui avaient prédit la catastrophe, se sont trompés. Le métro fonctionne à 98,5%. L’objectif est plutôt d’être à 99%, voire 99,5%. Un tiers des incidents sont liés à des faits voyageurs (colis abandonnés, blocages de portes…). Deux tiers des incidents sont à cause de problèmes techniques et de la façon dont a été créé le réseau. On a une électrification du réseau avec les lignes A et B dépendantes l’une de l’autre. Il faut qu’on réinterroge les procédures pour que cela impacte moins longtemps.
Le métro est indispensable au réseau et il faut naturellement qu’il fonctionne mieux que ça.
Bruno Bernard, président du Sytral, souhaite un meilleur fonctionnement du métro dans la métropole de Lyon. (©Nicolas Zaugra/ actu Lyon)La navette fluviale : « Un projet magnifique »
Attendez-vous une forte fréquentation concernant la navette fluviale lancée le 18 juin à Lyon ?
B.B. : Pour la fréquentation, nous verrons en fonction du temps. C’est un nouveau mode de mobilité qui n’est pas le plus efficace en termes de rapidité, mais en termes de plaisir, c’est quelque chose d’assez exceptionnel. Les deux premiers bateaux électriques arriveront au mois d’octobre pour remplacer les thermiques. Deux autres arriveront en mi-2026.
Un nouveau plan de lutte contre la fraude dans les TCL
Vous aviez demandé une hausse des contrôles des usagers des TCL pour lutter contre la fraude. A-t-elle eu lieu entre janvier et ce mois de juin ?
B.B. : Oui, il y a plus de contrôles sur le réseau TCL qu’il y a six mois et on va aller plus loin. On va annoncer un plan de lutte contre dans quelques semaines, avant l’été. Il y a déjà des choses qui ont été faites. Il y aura un plan plus complet avec une communication.
Au-delà des nouvelles lignes, nous avons deux points faibles : la lutte contre la fraude et l’information voyageur en cas d’incident qui ne sont pas satisfaisantes.
La sécurité est un point fort du réseau, mais nous allons encore plus le sécuriser. C’est une priorité absolue. Tout acte de délinquance est de trop. Et nous devons encore renforcer l’accessibilité du réseau aux personnes en situation de handicap, même si nous sommes en avance par rapport à d’autres territoires.
Les contrôles dans les TCL ont augmenté depuis le mois de janvier 2025. (©Anthony Soudani / actu Lyon)
Teol, T8… Quels sont les autres projets de transport que vous allez annoncer pour le mandat prochain en cas de candidature à votre réélection ?
B.B. : Pour l’instant, je ne me projette pas dans une campagne électorale. Je ne suis pas candidat à ce jour. Je pense au transport public jusqu’en 2035 et au-delà. Vous voudriez que j’annonce une ligne forte toutes les semaines ? Il faut continuer à améliorer le transport.
Le bus C3 devient TB 11 : un nouveau nom pour plus d’efficacité ?
Concernant le bus C3, il y a toujours des difficultés constatées…
B.B. : C’est ma ligne, je la connais très bien. Il est essentiel de l’améliorer et je suis heureux d’avoir des annonces à faire. La C23 arrive le 21 juin. Ce bus va partir de Flachet puis va doubler le C3 jusqu’à la Presqu’île avec une fréquence à dix minutes. Donc le C3 + C23 offrira une fréquence de trois minutes. On augmente aussi l’amplitude horaire du C3 (futur TB11) qui ira jusqu’à 1h du matin.
En le passant en TB11 entre Laurent Bonnevay et Saint-Paul, cela va fiabiliser la ligne et éviter des bus qui se suivent quand c’est surchargé. C’est important parce que la ligne C3, c’est 60 000 voyageurs, plus qu’un tramway…
Est-ce que vous regrettez finalement qu’il n’y ait pas un tramway à la place du C3, bientôt renommé TB11 ?
B.B. : Je le regrette qu’on n’ait pas fait le tramway. Il y avait une logique de faire un tram il y a dix ans. Je l’ai défendu lors de la campagne en 2014. Le maire de Villeurbanne Jean-Paul Bret ne le soutenait pas. Nous ne l’avons pas obtenu dans le rapport de force avec Gérard Collomb à l’époque. J’ai refait étudier la possibilité de passer cette ligne en tramway, nous étions sur des coûts très élevés entre 300 et 400 millions d’euros. Quand ils ont refait la ligne C3, ils n’ont pas retenu la solution pour faciliter le passage au tramway avec un surcoût de 10-20 millions d’euros. Pour passer au tramway, il faudrait tout recommencer à zéro.
La ligne va s’appeler TB11 et cela fait réagir. Vous l’appelez tram-bus alors qu’en réalité, c’est un trolley-bus… pourquoi cette appellation ?
B.B. : Un tram-bus, c’est un nom qu’on invente. Personne ne dit que c’est un tramway. En exploitation, la ligne a les mêmes qualités qu’un tramway en termes de fréquence, de vitesse commerciale, de stations. Évidemment que c’est un trolleybus électrique relooké différemment. C’est un entre-deux.
« L’opposition politique a raconté n’importe quoi sur la Presqu’île »
La zone à trafic limité démarre le 21 juin en Presqu’île. Il y a des critiques, vous les entendez. L’opposition et des habitants s’interrogent sur la desserte du centre-ville. Vos choix sont-ils pertinents ?
B.B. : La desserte en Presqu’île est exceptionnelle avec 80% d’usage du métro. Quand on améliore le métro, on améliore sa desserte. Les bus ont un rôle et ils continueront d’avoir un rôle. Certains déplorent qu’on enlève les bus de la rue de la République et qu’il n’y a plus la correspondance de l’hôtel de ville, alors qu’on doit marcher juste une ou deux minutes de plus jusqu’aux quais ou à Cordeliers. C’est de cela dont on parle. Je n’ai aucun problème à dire qu’on améliore les transports en commun en Presqu’île avec des lignes de bus efficaces qui passeront par la rue Grenette.
La rue Grenette, qui traverse la Presqu’île de Lyon, a été transformé en couloir bus après un an de travaux. (©Anthony Soudani / archives actu Lyon)
Expliquez-vous ces critiques par peur du changement ?
B.B. : Je pense que les critiques viennent d’une opposition politique qui a raconté n’importe quoi sur le dossier de la Presqu’île. Vous verrez dès le 21 juin et au fil des mois que ce dossier va être soutenu par les Grands Lyonnais. On a une augmentation de 10% de la fréquentation du métro en Presqu’île depuis 2019.
Propos recueillis par Nicolas Zaugra et Anthony Soudani
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