Sous les paillettes, le métal froid des barreaux de prison. Le rappeur marseillais Mamadou M’Baye, connu sous le pseudonyme de Dadinho, a été condamné ce jeudi 5 juin par le tribunal correctionnel de Marseille à une peine de 5 ans de prison ferme pour des violences commises le 23 septembre 2024 sur Paul*, un jeune chef de rang, sur fond de soirée alcoolisée. Un unique coup de poing au visage – reconnu par le rappeur – aux conséquences effroyables : hématome cérébral, opération en urgence, réanimation et rééducation, séquelles neurologiques lourdes et définitives.

Cette nuit-là, vers 3h du matin, le chemin des deux protagonistes s’était croisé devant une alimentation de la place Paul-Cézanne, dans le quartier de Notre-Dame du Mont, à Marseille. Paul, accompagné de plusieurs amis, venait y acheter de l’alcool, pour poursuivre la soirée. Déjà ivre, il titubait. Devant le commerce, une rixe s’était déclenchée pour un motif futile. Dadinho lui aussi semblait « déchiré », selon des témoins, ce qu’il a contesté au procès. Il a raconté avoir reçu une gifle – ce que les amis de Paul n’ont jamais confirmé – et s’être fendu d’un crochet dont la victime ne s’était pas relevée. Paniqué, le musicien avait tenté de le réveiller, avant que les pompiers n’interviennent.

Membre du collectif 13 Organisé

Dans le box des prévenus, ce jeudi 5 juin, Dadinho semblait effaré d’en être arrivé là. Quelques heures après la rixe, la police était venue le cueillir pour une tout autre raison : sous le coup d’un sursis probatoire lié à une précédente condamnation, il n’avait pas respecté ses rendez-vous avec le service pénitentiaire d’insertion et de probation. Retour en prison. « J’avais des concerts, des clips… », a éludé devant ses juges l’artiste originaire de La Castellane, membre du collectif 13 Organisé et figure connue de la scène rap phocéenne. Sa notoriété lui avait valu d’être reconnu par des témoins de la rixe, et placé en garde à vue à sa sortie de détention en décembre 2024.

« Tout ce qu’il s’est passé n’est pas voulu, je m’excuse à la famille. […] Devant l’alimentation, il y avait un attroupement et une bagarre. J’y suis allé pour séparer, j’avais un ami qui y travaillait… Je vais pour parler, je reçois un coup, je mets un coup. J’ai cash répondu. », s’est-il remémoré. Avait-il conscience de la puissance de son geste ? La police le pensait, rappelant que le rappeur avait été militaire dans l’infanterie et pratiqué la box thaï. « Juste pour des stories, pour le marketing ! » « Je ne suis pas un homme violent », a assuré Dadinho dans le box. Un ombre au tableau, pourtant : son casier judiciaire porteur de plusieurs condamnations, dont une pour violences habituelles sur son ex-conjointe…

Cinq ans de prison requis

Autant d’éléments qui ont conduit le procureur Nicolas Ruby à demander son incarcération pour cinq ans, assortis de la révocation d’un précédent sursis de 5 mois. Il a été suivi à la lettre par le tribunal. Quelques instants auparavant, l’avocate de Paul, Me Julie Requin, était venue dépeindre les conséquences « irrémédiables » sur l’ancien chef de rang, « enfermé dans un monde où il n’arrive même plus à désigner les objets, reconnaître les gens, s’exprimer. […] C’est une vie brisée. ».

En défense, Me Thomas Galtier, avait pourtant tenté d’adoucir la peine, convaincu que son client avait bien reçu une gifle, qui l’avait poussé à réagir, mettant en avant son remords pour la victime et sa famille. Et avait encouragé le tribunal à ne pas choisir la sévérité. « Sur l’autel d’une soirée de beuverie tragique, on sacrifiera plus une, mais deux personnes. », avait-il conclu.