Pour les personnes contraintes de porter un masque encombrant chaque nuit pour éviter les complications potentiellement mortelles de l’apnée obstructive du sommeil (AOS), l’idée de pouvoir simplement avaler un comprimé au coucher relevait jusqu’à présent du fantasme. C’est pourtant à portée de main grâce aux résultats encourageants d’un vaste essai clinique dévoilés cette semaine.
Un milliard de personnes affectées
L’apnée obstructive du sommeil affecte environ un milliard de personnes dans le monde. Cette pathologie se caractérise par des arrêts respiratoires répétés durant la nuit — parfois des dizaines ou centaines de fois — provoquant une chute du taux d’oxygène dans le sang avant que le patient ne se réveille inconsciemment. Les risques à long terme incluent les accidents vasculaires cérébraux, la maladie d’Alzheimer et la mort cardiaque subite.
Le traitement de référence actuel repose sur les machines à pression positive continue (CPAP), qui soufflent de l’air dans la gorge pour maintenir les voies respiratoires ouvertes. Cependant, ces dispositifs nécessitent le port d’un masque nocturne que de nombreux patients peinent à tolérer ou n’utilisent pas de manière régulière.
Des scientifiques de Boston ont identifié il y a une décennie une combinaison de deux médicaments existants capable de maintenir les voies respiratoires supérieures ouvertes en stimulant conjointement les muscles concernés, notamment le génioglosse, un muscle essentiel qui forme la majeure partie de la base de la langue.
Le premier composé, l’atomoxétine, approuvé en 2002 par l’Agence américaine des médicaments pour traiter les troubles de l’attention avec hyperactivité, augmente les niveaux du neurotransmetteur norépinéphrine. Chez les patients apnéiques, la diminution de cette substance pendant le sommeil contribue à la perte de tonus des muscles des voies respiratoires supérieures. Le second, l’aroxybutynine, est une version chimiquement modifiée d’un médicament utilisé contre l’hyperactivité vésicale. Il bloque certains récepteurs de l’acétylcholine, empêchant ce neurotransmetteur d’inhiber le nerf qui innerve le génioglosse.
La société Apnimed, créée en 2017 pour commercialiser cette découverte, a mené un essai de grande envergure en 2023. L’étude a porté sur 646 personnes souffrant d’AOS, réparties aléatoirement entre un groupe recevant le médicament AD109 et un groupe placebo, pendant six mois. Les participants traités ont connu 56 % d’épisodes en moins d’arrêt ou de ralentissement respiratoire durant leur sommeil par rapport au groupe placebo.
Plus impressionnant encore, 22 % des patients traités ont atteint un contrôle complet de la maladie, défini par moins de cinq épisodes obstructifs par heure. L’entreprise rapporte également qu’AD109 a provoqué une réduction significative de la profondeur et de la durée des périodes de faible oxygénation sanguine, un indicateur important lié aux complications cardiovasculaires.
Néanmoins, un essai de six mois ne permet pas d’évaluer les effets du médicament sur les risques cardiovasculaires à long terme associés à l’AOS. Des scientifiques mettent en garde contre les effets secondaires potentiels de l’atomoxétine, un stimulant qui peut légèrement augmenter le rythme cardiaque et la pression artérielle diastolique.
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