Un vent mauvais souffle sur l’édition française. Après un mois de controverses, l’ouvrage Face à l’obscurantisme woke, dirigé par les universitaires Emmanuelle Hénin, Xavier-Laurent Salvador et Pierre Vermeren, paraîtra bien aux Presses universitaires de France (PUF) le 30 avril.
C’est ce qu’a annoncé Paul Garapon, responsable éditorial de la maison dans une lettre aux contributeurs, consultée par Libération. S’abritant derrière un contexte jugé défavorable, les PUF, qui appartiennent désormais au groupe Albin Michel, avaient d’abord suspendu la publication de ce livre qui dénonce l’assaut présumé du wokisme sur la science en Amérique du Nord et en Europe.
La mise au jour par l’Humanité d’un partenariat entre l’Observatoire d’éthique universitaire (ex-Observatoire du décolonialisme), dont sont membres les trois coordinateurs du livre, et le milliardaire catholique d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin, ainsi que la prise de parole de l’historien Patrick Boucheron lors du rassemblement Stand up for science, n’ont finalement pas suffi à faire pencher la balance.
Chez Plon, maison du groupe Editis contrôlée par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, viennent de paraître les Origines françaises de l’islamogauchisme, attaque en règle de Michel Onfray contre la gauche radicale.
La main de Bolloré
Chez Fayard, filiale du Groupe Hachette Livre, propriété de Lagardère et donc de Vivendi, le groupe de Vincent Bolloré, on annonce pour le 14 mai la parution du livre Un autre Rousseau d’Alain de Benoist, chef de file de la Nouvelle droite, courant idéologique partisan d’une « Europe blanche », préfacé par le même Michel Onfray.
Un pas de plus vers l’affirmation d’une ligne éditoriale droitière décomplexée, marquée par l’arrivée à la tête de la maison, le 5 juin dernier, de Lise Boëll, l’éditrice d’Éric Zemmour passée par Albin Michel et Plon. Après Philippe de Villiers (Mémoricide, octobre 2024) et Jordan Bardella (Ce que je cherche, novembre 2024), Fayard a publié le 5 mars Bannie, de Xenia Fedorova, ancienne présidente de Russia Today France, chaîne de télévision pro-Poutine interdite de diffusion dans l’Union européenne depuis 2022.
Dans ce livre, sous-titré « liberté d’expression sous condition », la journaliste se présente comme une victime de la censure et de la « désinformation en France », alors qu’elle a table ouverte dans les médias de Vincent Bolloré, anime une chronique hebdomadaire sur CNews et écrit régulièrement dans le JDNews, hebdomadaire du JDD.
Pour les élus du CSE central d’Hachette Livre, la « ligne rouge » a été franchie : « En la publiant, Fayard se fait le porte-voix du pouvoir autoritaire russe qui emprisonne ses opposants et est soupçonné d’avoir causé la mort de certains (A. Navalny et A. Politkovskaïa, entre autres) », pointent-ils dans un communiqué envoyé aux salariés le 18 mars.
Après des mois de silence, dans un climat de peur, le texte met noir sur blanc ce qui se murmurait sous le manteau : « La