Tadej, il y a deux grands favoris pour le Ronde : vous et Mathieu van der Poel. On doit vous mettre sur un peu d’égalité ?

« Je ne sais pas car à San Remo, il m’a battu assez largement (sourire) mais le Ronde est une course fort différente, beaucoup plus fatigante, où les jambes seront un peu moins fraîches dans le final. L’aspiration joue aussi un peu moins. Mais a contrario, c’est son terrain de jeu : les pavés, les petites montées etc. Il a beaucoup de punch et sera, encore une fois, très difficile à battre. Mais je vais tout donner pour y parvenir. Il faudra être intelligent tactiquement et rendre la course la plus difficile possible. »

Vous imaginez un nouveau sprint face à lui ?

« Ah, ce serait difficile… C’est un bon sprinteur, meilleur que moi. Il performe toujours dans ce genre de contexte. Si je dois arriver avec lui, je ferai de mon mieux. Mais si la course est difficile et qu’il est fatigué, la différence entre nous sera peut-être moins grande… On connaît tous les qualités techniques de Mathieu. Il est en super forme et ce sera très difficile de la battre. Mais dans une course, il peut se passer beaucoup de choses. Avant un potentiel sprint, il y a 250 kilomètres lors desquels il y aura des opportunités et je devrai les saisir. »

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Vous avez un sentiment de revanche par rapport à la Primavera ?

« Non, pourquoi serais-je amer ? Personne n’a rien fait de mal donc il n’y a rien à venger. »

guillement

J’aime rouler contre Mathieu mais je préfère quand même être à la maison avec ma petite amie.

Van der Poel dit qu’il aime courir contre vous car vous faites ressortir le meilleur de lui. Est-ce réciproque ?

« Bien sûr. Chaque course contre lui est un grand défi, que j’aime tenter. J’admire le style de course de Mathieu. Mais ce n’est pas de tout repos. Si je devais choisir entre rester chez moi avec Urska ou courir contre Mathieu, je préfère être à la maison avec ma petite amie (rires). »

Il connaît mieux le parcours que vous. Cela peut également être un avantage ?

« C’est vrai que je ne suis pas celui qui le connaît le mieux. J’ai couru le Tour des Flandres à deux reprises seulement, en plus de quelques courses dans la région lorsque j’étais chez les U23. Pour les coureurs qui vivent à proximité, c’est plus simple de tout connaître par cœur car les routes changent très peu d’année en année. Mais dans mon équipe, j’ai quelques régionaux (NdlR : comme Tim Wellens ou Florian Vermeersch) et j’écoute beaucoup leurs conseils, tout comme ceux des directeurs sportifs. »

On vous sent impatient.

« C’est le cas. Le Tour des Flandres est une des courses les plus amusantes de la saison. Avec une ambiance fantastique au bord des routes, où l’adrénaline est présente à tout moment, et un parcours qui n’est jamais reposant. Cela va être génial. »

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On vous sent aussi très impatient pour Paris-Roubaix. On vous a vu aller reconnaître les pavés de Roubaix, mercredi. Et vous êtes allé chercher quelques records Strava (KOM) sur les segments pavés. Vous étiez derrière une moto ?

« (il rigole) Dans certains secteurs, j’avais un vent très favorable. C’était très agréable car cela m’a permis de rester rapide du début à la fin de certains secteurs. Et dans d’autres parties, j’étais derrière la moto…. mais pas souvent. C’était une super journée. Vivement dimanche prochain. »

guillement

Je suis assez optimiste sur mes chances de faire quelque chose à Roubaix.

C’est un plus grand objectif pour vous que le Ronde, que vous avez déjà gagné en 2023 ?

« Je ne peux pas vraiment dire ça. C’est la première fois que je me mesurerai à l’Enfer du Nord et je dois d’abord tester. Voir comment la course se passe et comment je me sens. Mais je suis assez optimiste sur ma capacité à y faire une belle course. »

Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez pris la décision de participer à Paris-Roubaix ? N’est-ce pas trop dangereux pour un coureur qui vise le Tour de France ?

« Une course comme les Strade est également très dangereuse. Il y a des chutes chaque année, et je suis bien placé pour le savoir. La première étape de sprint d’un grand tour est également très dangereuse. Le placement avant la Cipressa à Milan-San Remo aussi. Une petite erreur peut avoir d’énormes conséquences. Et Roubaix fait partie de ces courses où le risque est évidemment présent. L’entrée de la Trouée d’Arenberg me faisait peur mais après l’avoir fait plusieurs fois, je me dis que c’est bien mieux qu’on l’aborde avec un peu moins de vitesse. C’es moins dangereux. Mais la peur peut faire perdre beaucoup d’énergie et cela reste une des meilleures courses du monde et après avoir fait une reconnaissance en février, j’ai décidé que je voulais y aller avant qu’il ne soit trop tard. J’aime garder la motivation et ne pas m’ennuyer. En ce sens, je veux profiter de chaque expérience que le cyclisme peut me donner. »

Certains disent que vous êtes un peu trop léger pour Paris-Roubaix.

« On verra dimanche prochain. Je ne suis pas le coureur le plus lourd mais je ne suis pas le plus léger non plus. Je me situe dans une catégorie intermédiaire. Et peu importe le poids, il faut toujours avoir des bonnes jambes. »

guillement

Wout van Aert a toujours un supplément de motivation sur le Ronde.

Avez-vous vu les images du final d’A Travers la Flandre, en rentrant de votre reconnaissance ? Qu’avez-vous pensé de la défaite des trois coureurs Visma face à Powless ?

« Honnêtement, je n’ai pas regardé. J’ai juste vu le résultat et j’ai entendu ce qu’il s’était passé. Je ne peux pas en dire trop. Je pense qu’ils ont juste fait une petite erreur en étant trop confiants. Il n’y a rien de mal à cela. Powless était vraiment fort. »

Pour Wout van Aert, cela a été compliqué à digérer. Le considérez-vous toujours comme un favori avec qui il faudra compter ?

« Tout à fait. Le Ronde est son objectif principal et il a toujours un supplément de motivation en prenant le départ de cette course. Il arrive toujours à se surpasser sur les monuments. Je pense donc qu’il sera en pleine forme. »

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Demi Vollering lui a apporté son soutien par rapport aux critiques qu’il a reçues. Elle a souligné l’immense pression qui était exercée sur les coureurs. Vous la ressentez parfois aussi ?

« Oui, elle a raison. Aujourd’hui, tout le monde a son avis dans la presse ou sur les réseaux sociaux. Ces derniers sont d’ailleurs un cancer pour notre société. On y trouve beaucoup de choses positives mais aussi énormément de négatives. Et cela peut vraiment gâcher votre journée. Parfois, il vaut mieux ne pas s’en soucier. Chaque coureur ressent de la pression, encore plus quand vous avez axé votre calendrier sur certaines grandes courses comme c’est le cas de Wout. Ce qui s’est passé mercredi, ça craint pour lui. Mais il n’aura pas ça en tête en prenant le départ de la prochaine course. »

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