Par

Antoine Grotteria

Publié le

20 nov. 2024 à 19h06

« Une mauvaise pratique de dépenses de l’argent public » ou « un investissement nécessaire pour créer une école de champions » ? À Paris, une nouvelle infrastructure sportive a mis le feu aux poudres du Conseil régional d’Île-de-France. En cause, l’allocation de 200 000 euros à une salle de boxe votée le vendredi 15 novembre 2024 au siège de l’institution, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis).

Un contexte budgétaire incertain

Opposé à cette subvention, le groupe de la gauche communiste, écologiste et citoyenne s’est fendu d’un communiqué pour dénoncer une aide versée à une « salle de boxe ultra-luxueuse, aux tarifs inaccessibles pour la quasi-totalité des Francilien. nes ». Un équipement éloigné, selon l’opposition, de « l’intérêt régional » avancé par l’exécutif.

Nommée Blackroc, cette structure se situe sur l’avenue Foch, dans le 16e arrondissement de Paris. Ouverte en septembre 2024, elle a représenté un coût de 675 492 €. La Région a décidé de financer à près d’un tiers cette infrastructure. Des subventions accordées trois mois après les Jeux olympiques, soldés par trois médailles olympiques françaises en boxe, soit l’un des plus faibles totaux au cours des dernières Olympiades.

Dans les rangs de l’opposition, ce choix ne passe pas. « On a déposé un amendement en commission permanente pour dire que c’est une mauvaise pratique de dépenses de l’argent public », explique la présidente du groupe, Céline Malaisé. « Les réponses de l’exécutif et du vice-président à nos questions étaient hasardeuses », poursuit-elle.

Outre les accusations de dépassement du « plafond maximum autorisé pour ce type de projet », la gauche regrette une aide s’inscrivant dans un contexte de resserrement budgétaire. Début novembre, la présidente de la Région, Valérie Pécresse, n’a pas fait mystère de sa volonté de réaliser des économies en 2025. Une situation qui résulte de la baisse attendue des recettes, conséquence du projet de loi de finances (PLF) débattu à l’Assemblée nationale.

Vidéos : en ce moment sur ActuLa Région évoque un « centre unique »

« Certains secteurs semblent épargnés par les coupes budgétaires », persifle l’opposition dans son communiqué. Dans son viseur, le vice-président de la Région chargé des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques (JOP), des Loisirs, de la Jeunesse, de la Citoyenneté, de la politique de la Ville et de la Vie associative, Patrice Karam.

Contacté par actu Paris, l’un des bras droits de Valérie Pécresse se défend. « Je regrette que la gauche ait cette réaction quand on parle de sport. Elle me harcèle lorsqu’on évoque les sports de combat », clame-t-il.

Pour le conseiller régional LR, la subvention en question doit permettre la création d’un « centre unique pour les futurs champions et les jeunes boxeurs franciliens en quête de professionnalisme ». L’élu assume une politique du ruissellement, se traduisant par un investissement conséquent dans le sport de haut niveau censé profiter au monde amateur.

La boxe s’insère dans ce paradigme, comme l’explique le président de Blackroc et promoteur de combats professionnels, Jérôme Abiteboul. « Le modèle public et associatif montre ces limites. Il faut des structures privées pour augmenter le nombre de boxeurs français dans les plus grands rendez-vous. Cela se fait déjà dans plusieurs pays, comme aux États-Unis », expose-t-il.

Pour une clientèle aisée ?

« On veut créer une école de champions. Les boxeurs seront accompagnés par des entraîneurs et des préparateurs physiques. On va mettre en place une détection à l’échelle francilienne pour attirer les meilleurs talents », ajoute-t-il.

Pourtant, cette fonction apparaît difficilement perceptible sur le site de la salle. Y sont mentionnés des programmes de « personal training », de « small group training » ou encore de « team building », avec une offre de spa, de sauna, hammam et jacuzzi « haut de gamme ». Les tarifs ne sont pas précisés. « On a aussi l’intention d’attirer des personnes résidant dans le quartier », reconnaît Jérôme Abiteboul. Le 16e arrondissement concentre une population de ménages dotés de hauts revenus.

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