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Thibault Nadal

Publié le

26 janv. 2025 à 7h20

C’est ce qui s’appelle viser dans le mille. Diffuseur officiel des fléchettes, La Chaîne l’Équipe a confirmé ce vendredi 24 janvier 2025 qu’elle allait retransmettre la nouvelle saison à partir du 6 février.

Il faut dire que la discipline, nouvelle à la télévision française, a rapidement trouvé son public, puisque selon Marc Las, le directeur de la chaîne, ce sont 18 millions de personnes qui ont suivi les derniers championnats du monde, qui se déroulaient du 15 décembre 2024 au 3 janvier 2025 à Londres.

« Luke Littler a mis la lumière sur les fléchettes »

Une chaîne qui a donné « l’étincelle » à un sport qui n’attendait que ça. C’est ce qu’a constaté « Gigg’s » suiveur assidu des fléchettes et véritable porte-drapeau en France de la discipline sur les réseaux sociaux avec ses 125 000 abonnés sur X. « Je me considère comme un arriviste, car j’ai commencé à suivre de manière assidue fin 2023 », tempère le jeune homme, joint au téléphone par actu Paris.

« Pris d’affection » pour « le phénomène » Luke Littler, il estime que le jeune anglais de 18 ans, tout juste sacré champion du monde, a « donné encore plus de lumière à ce sport ».

Les fléchettes, « Gigg’s » ne se contentent pas uniquement de les regarder à la télévision. « J’y joue souvent dans le garage d’un ami », avoue-t-il. Mais celui qui vit dans les Hauts-de-Seine souhaiterait désormais installer son propre jeu chez lui, après en avoir reçu un, il y a près d’un an. « C’est ma frustration du moment, car je ne sais pas où l’installer chez moi. Ça dégraderait forcément le mobilier et je perdrais ma caution », assure-t-il dans un éclat de rire.

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Pour s’exercer de manière plus assidue, « Gigg’s » « envisage de prendre une licence dans un club ». Mais le choix ne sera pas immense, puisque l’Île-de-France compte moins de dix clubs.

Un sport « accessible à tous et convivial »

Parmi eux se trouvent les Dolina Darts de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), l’un des plus vieux de clubs de France, créé en 1984. Le président, Antoine Longevialle, a constaté ces derniers mois l’intérêt grandissant pour son sport.

Chaque semaine, on a des nouveaux joueurs qui viennent découvrir. Au début de la saison, on comptait une vingtaine de membres, aujourd’hui une trentaine et on table sur une quarantaine de joueurs avant la fin de la saison en juin prochain. On va doubler notre nombre, c’est fabuleux.

Antoine Longevialle
Président des Dolina Darts de Boulogne-Billancourt

Les derniers arrivés, ce sont Alexandra, Fabien et leur fils de 7 ans, Milo. « Mon mari suivait déjà depuis longtemps et il a converti la famille », confie-t-elle. « Durant les vacances de Noël, on a tous regardé les championnats du monde et ça déclenché chez nous l’envie d’en faire en club. C’est ce qui lie notre famille aujourd’hui », développe la mère.

Même s’ils ont déjà plusieurs cibles à leur domicile de Maisons-Laffitte (Yvelines), la famille a tout de même souhaité « apporter un cadre à sa pratique pour se perfectionner ».

Chez les Darts de Boulogne, l'un des plus vieux clubs de France, les fléchettes se pratiquent de 7 à 77 ans.
Fabien, Alexandra et leur fils Milo, ont décidé de s’inscrire dans un club pour assouvir au maximum leur passion pour les fléchettes. (©TN / actu Paris)

L’autre aspect qui les a séduits, c’est le côté pratique et simple de la discipline. « C’est accessible à tous, convivial et il n’y a pas besoin de matériel », confirme Alexandra. En effet, lors de l’entraînement ce mardi 21 janvier, certains joueurs sont encore en tenue de ville. Et à Boulogne-Billancourt, la licence ne coûte que 75 euros pour l’année. Un tarif bien éloigné des autres sports où les prix atteignent aisément plusieurs centaines d’euros.

Les clubs submergés et pas assez préparés ?

Ce tarif, c’est ce qui a séduit Manu, pratiquant de longue date. Après avoir beaucoup joué dans les bars, il a fait le choix de s’inscrire dans un club. « Entre la consommation et les fléchettes, l’addition peut vite grimper », avoue-t-il.

Mais cet afflux peut s’avérer compliqué à gérer pour les clubs de la région. « Il y a un risque de submersion, alerte Antoine Longevialle. Nous n’avons pas forcément, dans tous les clubs, les infrastructures pour accueillir tout le monde », prévient-il.

Actuellement, 151 personnes possèdent une licence en Île-de-France, selon des chiffres communiqués par le comité régional de la Fédération française à actu Paris, contre 142 avant le Covid. « Après la pandémie, on était tombés à moins de 100, explique Élodie Valentin, sa présidente. On vient juste de repasser au-dessus de notre niveau, mais on s’attend évidemment à une hausse dans les prochains mois ».

Pour faire face à cette arrivée de joueurs, de nouveaux clubs pourraient bientôt voir le jour. « On reçoit des demandes chaque semaine pour toute la France », assure Antoine Longevialle.

Les bars profitent aussi de l’engouement

L’autre solution est de se tourner vers les bars, même si la pratique y est radicalement différente de l’aveu de tous les joueurs interrogés. Et là aussi, le succès semble au rendez-vous. Après avoir ouvert son premier établissement en 2019 dans le 11e arrondissement de Paris, les petites flèches viennent d’inaugurer fin 2024 à Pigalle (9e), leur troisième lieu dédié aux fléchettes.

« On voit qu’il y a de plus en plus d’intérêt. On a une forte demande des joueurs et aussi des entreprises. Ça fait partie des raisons qui ont compté au moment d’ouvrir notre troisième bar », développe Léa Maréchal, responsable du développement commercial. Consciente de l’intérêt croissant pour le sport, elle souhaite que les établissements retransmettent les meilleures compétitions mondiales pour offrir une expérience complète aux consommateurs.

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Nicolas, lui, est un « ancien » dans le monde des fléchettes, puisqu’il y joue depuis cinq ans. Fin décembre, cet habitant de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) a décidé de traverser le périphérique pour s’inscrire aux Dolina Darts de Boulogne afin de « progresser ». Dans son entourage, il a évidemment remarqué que ses amis s’y intéressaient de plus en plus, notamment lors des sorties aux bars.

Avant, on ne se disait pas forcément qu’on allait jouer. Maintenant, c’est incontournable.

Nicolas

Une discipline qui souhaite devenir un sport

Avec cette nouvelle notoriété, le « petit monde » des fléchettes espère ainsi se défaire d’une image qui lui colle à la peau depuis toujours, celle d’être un « sport de bar ».

Une situation qui agace Marianne, licenciée à Boulogne. « Ceux qui ont passé le cap de venir en club ces derniers mois, ne s’attendaient à voir que c’était aussi sérieux », affirme-t-elle. Inscrite dans un club depuis 2002, elle a vu le virage s’opérer. « Avant les fléchettes, c’était mal vu. Aujourd’hui, même dans ma famille, je sens que le regard est différent ».

Une cible de fléchettes.
Une cible de fléchettes. (©TN / actu Paris)

Pour Élodie Valentin, « cette médiatisation offre aux fléchettes la reconnaissance qu’elles n’avaient pas ». Et de développer au maximum la discipline qui souffre d’un manque de moyens financiers, puisqu’elle n’est pas considérée comme un sport.

« On espère attirer plus de sponsors, avoir plus de salles qui veulent nous accueillir », ajoute Antoine Longevialle. Marianne, elle, souhaiterait que chaque cible traditionnelle (différente des électroniques que l’on retrouve dans les bars) soit accompagnée d’une tablette numérique qui comptabilise les points. pour compter les points et ne plus avoir à le faire de tête. Pour le sport du moment, « ce serait déjà un bon début ».

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