La troisième conférence des Nations Unies pour l’océan (Unoc 3) a été officiellement lancée, ce lundi matin, au port de Nice, dans le tout nouveau palais des congrès nommé Nicea. Quelques notes de kora, un instrument de musique à cordes originaire du Mali, ont précédé les interventions des deux coprésidents de ce sommet, Emmanuel Macron pour la France, le pays hôte, et Rodrigo Chaves Robles, pour le Costa Rica.

« Le nom de Nice vient de Victoire, niké en grec, et, dans ce port fondé par des marins phocéens au bord de la Méditerranée, c’est aujourd’hui une victoire que nous célébrons pour nos océans, a introduit le président de la République Emmanuel Macron. Une victoire que nous soyons tous réunis. Une victoire sur l’inertie et l’indifférence aussi, sur la dégradation de notre environnement, sur la tendance au désengagement international. Des victoires fragiles car elles requièrent des actions rapides et elles ne supposent aucun recul. Cette mobilisation est une victoire parce que nous connaissons les enjeux ».

Parmi ces enjeux, la protection des aires marines, la limitation de la pollution plastique, l’accélération de la décarbonation du transport maritime, la lutte contre la pêche illégale, la protection des grands fonds marins.

« La biodiversité, ça n’est pas une question d’opinion »

« La seule manière de répondre à ces défis, c’est de mobiliser tous les acteurs, les chefs d’État et de gouvernement qui vont ici parler, mais également les scientifiques qui se sont mobilisés et je veux les en remercier. Il n’y aura pas de bataille pour nos océans si elle n’est pas d’abord fondée sur une science libre, ouverte, partenariale ».

« Le climat, comme la biodiversité, ça n’est pas une question d’opinion, c’est une question de faits scientifiquement établis. C’est pourquoi il nous faut défendre nos chercheurs, leur permettre d’avancer, de chercher de manière libre et d’établir ce qui est le cœur de notre action », a rappelé le chef de l’État, stigmatisant les climatosceptiques.

« Les abysses ne sont pas à vendre »

Sur la protection des grands fonds marins, le président français a rappelé que 33 États ont créé une coalition pour promouvoir un moratoire sur l’exploitation des grands fonds.

« C’est une nécessité, a insisté Emmanuel Macron. Je ne suis pas du tout contre l’activité économique, bien au contraire, mais je pense que c’est une folie de lancer de l’action économique qui va bousculer des grands fonds marins, qui bouscule la biodiversité, qui la détruit, qui libère des puits de carbone irrécupérables. Quand nous n’y connaissons rien. C’est de l’obscurantisme de faire de l’exploitation avant d’avoir commencé l’exploration « .

« Les abysses ne sont pas à vendre, a-t-il rappelé alors que le président des États-Unis Donald Trump, qui a boudé ce sommet, vient de lancer l’exploitation minière des fonds marins. Et pas plus que le Groenland n’est à prendre, pas plus que l’Antarctique ou la haute mer ne sont à vendre, pas plus que les licences de pêche, des pays en développement ne sont à donner, pas plus que les données scientifiques ou la sécurité ».

Avant de donner la parole au président du Costa Rica, Rodrigo Chaves Robles, le chef de l’État français a conclu par ce message: « Je compte sur chacune et chacun d’entre vous, pendant ces cinq jours, pour que notre humanité progresse, pour avoir le plan d’action pour les océans le plus ambitieux possible à Nice ».

« Merci à tous d’être là, à Nissa la bella, ville à la mer d’azur et au ciel pur », a ajouté, en français, António Guterres. Dans son propos liminaire, le secrétaire général de l’ONU a exhorté le monde « à faire bouger les choses » et rappelé « notre profonde dépendance à l’égard de l’océan » qui « produit la moitié de l’oxygène que nous respirons » et « nourrit 3 milliards de personnes ».

Nice, le rendez-vous de « celles et ceux qui refusent de baisser les bras »

« La Méditerranée est le porte-étendard de tous les océans, est intervenu Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Pourquoi? Parce que la Méditerranée est maintenant un épicentre du changement climatique. Son réchauffement est accéléré, près de 20% plus vite que la moyenne mondiale. Ici tout va plus vite, et cette mer presque fermée devient le baromètre de l’état de nos océans. Le présent méditerranéen est le futur du monde. Sauver la Méditerranée, c’est sauver les océans. »

« Celles et ceux qui refusent de baisser les bras, se sont donné rendez-vous à Nice, s’est félicité le maire, Christian Estrosi. Nous, les peuples de la mer, nous qui vivons sur les rivages du monde entier, nous attendons de ce sommet que les accords de Nice deviennent, pour l’océan, ce que les accords de Paris ont été pour le climat il y a 10 ans: un tournant ».

Le traité sur la haute mer adopté au 1er janvier?

En fin de journée, lors d’une conférence de presse, le président de la République est revenu sur les « quelques avancées de ce sommet qui sont d’ores et déjà consolidées ». En tête, « ce fameux traité BBNJ sur la protection en haute mer [qui doit être ratifié par 60 États pour être adopté]. Il y a 1 an, il y avait huit ratifications. Nous avons travaillé d’arrache-pied ces derniers mois. Nous avons d’ores et déjà 55 ratifications effectuées et déposées. Une quinzaine sont en cours avec déjà une date sûre, une quinzaine qui sont en cours et qui se feront d’ici la fin de l’année. Au 1er janvier prochain, ce traité pourrait entrer en vigueur », a annoncé Emmanuel Macron.

Autre grande réalisation, selon le chef de l’État, la création de nouvelles aires marines protégées. « Avant Nice, nous étions à 8% dans les zones économiques exclusives de tous les États du monde. Nous arriverons à environ 12% après cette conférence, ce qui veut dire qu’on aura augmenté de 50% les aires marines protégées », s’est réjoui le Président qui a promis d’annoncer de nouvelles aires marines protégées dans les prochaines semaines.