C’est une image dont le tribunal n’a pas l’habitude : une femme, dans le box des prisonniers… qui est la victime. Ce jeudi après-midi 5 juin, Nadège, la soixantaine, a été extraite de la prison des Baumettes à Marseille pour assister au procès de sa codétenue Sabrina, 33 ans. Cette dernière est soupçonnée de lui avoir volé plusieurs milliers d’euros en remplissant frauduleusement ses bons de cantine. Sabrina a refusé de sortir de sa cellule et réclamé un renvoi, sans pour autant qu’un avocat ne soit présent pour la représenter. Le procès devant le tribunal correctionnel se tient donc sans elle.
Nadège est non voyante. Condamnée à purger 17 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de sa mère en 2018, elle a fait confiance à sa codétenue, voisine de coursive, pour remplir quelques bons, sur lesquels elle « cantine » grâce aux quelques sous de son allocation adulte handicapée, c’est-à-dire acheter de menus objets et denrées pour améliorer son ordinaire carcéral.
« Elle continue les arnaques »
La sexagénaire dit avoir arrêté rapidement, et accuse Sabrina de l’avoir menacée. C’est l’assistante sociale qui a remarqué que près de 3 000 euros de bons de cantine avaient été détournés par la codétenue. « Elle continue les arnaques avec les autres », précise-t-elle. De fait, le dossier carcéral de Sabrina mentionne plusieurs conflits avec d’autres détenues.
« On l’a dépossédée du peu d’argent qu’elle avait, utile à son quotidien », remarque Me Anna Rosso-Roig, l’avocate de Nadège. Depuis son perchoir, le procureur Nicolas Ruby réclame huit mois de prison ferme ; il en obtient six, qui s’ajouteront à la peine de Sabrina. Elle devra rembourser 2 738 euros à sa codétenue, lui verser 500 euros de dommages et intérêts et a désormais interdiction d’entrer en contact avec sa victime. De quoi adoucir – un peu – le quotidien de Nadège derrière les barreaux.