La venue du président au Kennedy Center intervient alors qu’il a repris les rênes de l’institution pour y installer une direction faite de fidèles.
Un président qui envoie l’armée face à des manifestants, devant un spectacle célébrant un soulèvement populaire contre un despote : Donald Trump va assister mercredi à la comédie musicale Les Misérables, une sortie culturelle prévue de longue date mais qui prend, l’actualité aidant, un relief tout particulier. La pièce, adaptée du roman de Victor Hugo, emmène les spectateurs sur les barricades à Paris pendant la courte insurrection de juin 1832 contre la monarchie, réprimée dans le sang par l’armée et la garde nationale.
«J’aime les chansons, j’aime la pièce», avait récemment affirmé le président républicain, ouvertement accusé mardi de dérive autoritaire par le gouverneur de Californie Gavin Newsom.
Selon CNN, des comédiens pourraient refuser de participer à la représentation au Kennedy Center, prestigieuse salle de spectacle de Washington dont le président américain a pris récemment les rênes, et où il a installé une direction faite de fidèles, chargée d’imprimer un tournant résolument anti-progressiste à la programmation.
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Soirée de gala
Le spectacle de mercredi n’est pas une représentation ordinaire : la comédie musicale est donnée dans le cadre d’une soirée de levée de fonds, destinée à garnir les caisses de l’institution. Selon le Washington Post, il en coûte 2 millions de dollars pour participer à une réception et prendre une photo avec Donald Trump, en plus d’assister au spectacle dans une loge.
La plus célèbre chanson de cette comédie musicale, créée en France en 1980 puis devenue un phénomène mondial après son adaptation à Broadway, est un appel au soulèvement populaire, qui s’intitule en anglais Do you hear the people ? Dans la version française, La volonté du peuple. Donald Trump l’avait fait jouer avant d’annoncer, le 15 novembre 2022, qu’il se présentait à nouveau à l’élection présidentielle.
« Un assaut généralisé contre les valeurs américaines »
C’est juste après avoir envoyé des milliers de soldats à Los Angeles, suite à des heurts entre les forces de l’ordre et des manifestants opposés à sa politique migratoire, que le président américain va s’installer dans la loge du Kennedy Center. Dans son discours le plus virulent à ce jour sur ces débordements, Donald Trump a affirmé mardi qu’il allait « libérer » la mégapole californienne de ceux qu’il appelle des « insurgés » et des « ennemis étrangers ». Le gouverneur démocrate de Californie Gavin Newsom, opposé à ce déploiement de l’armée, a répondu mardi par une allocution très sombre, en parlant d’un « président qui ne veut être tenu par aucune loi ou constitution, menant un assaut généralisé contre les valeurs américaines ».
La soirée au Kennedy Center, prévue avant ces heurts, illustre la volonté du républicain d’affirmer son emprise sur le monde de la culture et du spectacle. Engagé dans une croisade ultra-conservatrice contre ce qu’il appelle la « propagande antiaméricaine » dans l’art mais aussi dans la recherche et l’histoire, le président américain a aussi repris le contrôle de plusieurs grands musées de Washington. Il a par ailleurs renvoyé les dirigeantes de deux prestigieuses institutions, la National Portrait Gallery et la Librairie du congrès.