Avec « Mikado », la réalisatrice Baya Kasmi s’intéresse à un couple et ses deux enfants qui vivent en marge de la société, dans un van, sur les routes de France. En panne, ils atterrissent chez un enseignant veuf qui tente d’élever sa fille. C’est la rencontre entre deux mondes, peuplés d’âmes cabossées.
Mikado (Félix Moati) forme un couple avec Laetitia (Vimala Pons), placée comme lui en foyer pendant sa jeunesse. Tous deux se sont construits contre leurs souvenirs d’enfance. Ils vivent avec leurs enfants Nuage et Zéphyr sur les routes, dans un camion aménagé, en marge de toute institution ou autorité.
Une panne de moteur les amène à s’installer le temps d’un été chez Vincent (Ramzy Bedia), un enseignant qui vit seul avec sa fille Théa. C’est le début d’une parenthèse enchantée qui bouleverse l’équilibre de toute la famille alors que Nuage se prend à rêver d’une vie normale et s’inscrit au collège, comme Théa.
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De scénariste à réalisatrice
En 2010, avec le scénario du film « Le nom des gens » (César du meilleur scénario), inspiré de sa propre vie, Baya Kasmi s’était fait un nom. D’abord comme scénariste pour les films de son mari, le réalisateur Michel Leclerc, puis pour les d’autres comme Thomas Lilti, avec qui elle a signé « Hippocrate ».
Puis, elle s’est distinguée comme réalisatrice en imaginant deux longs métrages: « Je suis à vous tout de suite » (2015) et « Youssef Salem a du succès » (2023). Avec la même équipe de comédiens et comédiennes, elle revient avec « Mikado », drame poétique et sensible sur la peur, l’éducation et les choix.
L’histoire de « Mikado » est née de la rencontre de Baya Kasmi avec des personnes ayant elles-mêmes vécu un parcours d’aide sociale à l’enfance. « Elles m’avaient énormément touchée dans l’injustice de leur parcours et aussi dans la vitalité qu’elles avaient pour inventer leur vie, leur famille. Au départ, elles n’avaient pas forcément eu les bases: partir sur du vide et inventer quelque chose, je trouvais cela beau », indique la réalisatrice dans le 12h45 du 5 juin.
>> A écouter, l’interview de Baya Kasmi à propos de « Mikado » : 
Film dramatique aux personnages cabossés, « Mikado » a été tourné dans le sud de la France, ce qui lui confère un air lumineux et doux. Un contraste revendiqué par la réalisatrice, qui n’apprécie pas les drames sociaux qui font dans le misérabilisme. « Cette famille essaie de créer une utopie et en même temps, elle est au bord du monde. [Mikado et Laetitia] savent qu’ils sont en fuite et qu’à un moment, ce système va prendre fin. Mais j’avais besoin que l’on soit en empathie avec mes personnages, même s’ils vivent à la marge. Donc le sud me paraissait une évidence ».
Dans le dossier de presse du film, Baya Kasmi rappelle que les mots « parent » et « séparation » détiennent une racine latine commune. « A un moment, pour être des bons parents, il faut accepter de lâcher son enfant. C’est ce que j’ai toujours trouvé magnifique: vous voyez votre enfant être heureux sans vous, vivre sa vie propre. Il y a quelque chose d’un deuil, quelque chose de douloureux et en même temps de très beau, parce que c’est ça le bel amour », conclut-elle.
Propos recueillis par Julie Evard
Adaptation web: Melissa Härtel
« Mikado » de Baya Kasmi, avec Félix Moati, Vimala Pons, Ramzy Bedia, Patience Munchenbach, Saül Benchetrit, Louis Obry. A voir aux cinémas du Grütli à Genève les 12,13, 14 et 16 juin 2025 et au CityClub de Pully les 10, 13, 15, 16 et 21 juin 2025.