Il est accusé d’avoir « discrédité l’armée » russe. Lev Chlosberg, homme politique de 61 ans et l’un des rares opposants à Vladimir Poutine resté en Russie, a été arrêté mardi pour avoir appelé à un cessez-le-feu en Ukraine.

L’opposant se trouve actuellement dans une prison à Pskov, dans l’attente d’une audience sur son possible placement en détention provisoire avant un procès. Selon les informations communiquées par son parti Iabloko, il fait l’objet d’une procédure pénale pour « discrédit de l’armée » en raison d’une vidéo publiée en janvier sur les réseaux sociaux russes dans laquelle il défend la « nécessité d’un cessez-le-feu immédiat en Ukraine ». Cet article de loi est régulièrement utilisé pour museler les opposants à la guerre déclenchée par la Russie en 2022.

Une enquête en 2015

Lev Markovich Chlosberg, de son nom complet, est membre du parti d’opposition libéral Iabloko, « La Pomme » en russe, depuis 1994. Deux ans plus tard, il devient le responsable de la branche de la région de Pskov, dans l’ouest de la Russie, puis est élu au parlement local de 2011 à 2015. Il s’est également présenté plusieurs fois aux élections législatives afin d’être élu à la Douma, chambre basse de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie. En 2021, le tribunal de Moscou annule sa candidature, notamment en raison de liens supposés avec la Fondation anticorruption, une ONG créée par Alexeï Navalny. Une décision condamnée trois plus tard, en septembre 2024, par la Cour européenne des droits de l’homme.

En 2015, Chlosberg publie dans le journal local « Pskovskaïa Goubernia » des informations confidentielles sur la mort de soldats russes, présumés tués en combattant dans le Donbass. A cette époque, Moscou avait pourtant nié avoir envoyé des forces de l’armée régulière soutenir les rebelles prorusses qui se battaient en Ukraine. Lors de son enquête, il avait été violemment attaqué par un groupe d’individus et blessé à la tête et aux yeux. Par ailleurs, sa dénonciation du silence des autorités autour de la présence de soldats russes en Ukraine lui avait valu d’être démis de ses fonctions par un tribunal et par un vote des députés. Il retrouvera son mandat régional l’année suivante jusqu’en 2021.

« Agent de l’étranger »

Lev Chlosberg est l’un des rares opposants au Kremlin à s’être exprimé publiquement contre le conflit en Ukraine tout en restant en Russie. La majorité d’entre eux étant déjà en détention, en exil, voire décédés. Certaines de ses positions sont cependant controversées : il a notamment été critiqué par d’autres figures de l’opposition pour sa désapprobation des attaques ukrainiennes de représailles sur le territoire russe.

Ce n’est pas sa première procédure : il avait déjà reçu deux amendes pour la même accusation de « discrédit de l’armée ». Catégorisé comme « agent de l’étranger », une étiquette utilisée par le Kremlin contre toutes les voix critiques, Lev Chlosberg a également été accusé en octobre 2024 de ne pas respecter les contraintes administratives liées à ce statut. Il risque jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.