Elle a pendant longtemps été épargnée par la violence avant d’être happée à son tour, gangrenée par le narcotrafic. A Rennes, on ne compte plus le nombre de fusillades à l’arme de guerre qui ont éclaté ces dernières années sur des points de deal, plongeant les habitants de ces quartiers dans la peur d’être des victimes collatérales. « C’est un poison au quotidien quand on vit à proximité et un poison pour la société tout entière » », indique la maire Nathalie Appéré.

A chaque drame, l’élue socialiste ne cesse de répéter que la ville n’a « ni les compétences juridiques, ni les moyens régaliens pour arrêter les trafiquants ». « Mais nous avons aussi un rôle à jouer », assure-t-elle. Cela passe notamment par la prévention des jeunes, « l’angle mort dans cette lutte contre le narcotrafic », estime le docteur Nicolas Prisse, président de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca).

« Le deal, c’est l’ennui et la violence »

Pour les détourner du deal et casser le mythe de l’argent facile, la ville de Rennes a imaginé une campagne avec un clip qui sera diffusé à partir de la semaine prochaine sur les réseaux sociaux et des affiches qui seront placardées dans l’espace public. Avec un message clair : « Y’a rien à attendre du deal. »

Notre dossier sur le narcotrafic

« On ne voulait pas d’une campagne réductrice ou culpabilisante comme cela a déjà été le cas, souligne Charles Guivarch de l’agence de communication La Contrée, qui a signé le clip. L’idée, c’est plutôt de dire aux jeunes que le deal n’est pas une fatalité et qu’on n’a rien à y gagner. Car le deal, c’est l’ennui, la violence, des embrouilles et des drames. » « Il n’y a pas de belles histoires dans le narcotrafic », insiste Nathalie Appéré.

« Ne pas stigmatiser ces jeunes »

Pour viser juste, le clip de 56 secondes met en scène six jeunes Rennais « qui sont les plus à même de s’adresser à d’autres jeunes ». Sans rien cacher, la vidéo montre l’ennui des guetteurs au pied des tours ou la violence des règlements de compte entre trafiquants. « On ne veut pas stigmatiser ces jeunes qui cèdent à l’argent facile mais on veut leur dire que ça finit toujours mal et qu’il y a bien mieux à faire », témoigne Nadjila.

Habitant le quartier Italie dans le sud de Rennes, un lieu de deal bien connu dans la capitale bretonne, la jeune femme a bien conscience que cette campagne n’éradiquera pas le trafic. « Mais si ça peut faire prendre conscience à certains, alors ce sera déjà ça de gagné », espère-t-elle.