Par

Yann Rivallan

Publié le

12 juin 2025 à 20h32

La voix chevrotante par moments, le teint pâle, Tony*, presque 25 ans, fait face au tribunal correctionnel de Rouen, jeudi 12 juin 2025. Il est accusé de corruption sur une mineure de moins de 15 ans. Il avait entre 20 et 21 ans au moment des faits.

Entre février et novembre 2021, de façon presque ininterrompue, cet habitant de Sotteville-lès-Rouen a demandé à Margot*, âgée alors de 13 ans, de lui envoyer à de nombreuses reprises des photos et vidéos à caractère sexuel, aussi appelé des « nudes ». De son côté, il envoyait des photos et vidéos de son sexe en érection, de lui en pleine masturbation ou encore des messages crus et insultants.

Un faux profil Snapchat

Face aux juges, Tony explique que tout a commencé à cause d’une « blague à un de [ses] meilleurs amis ». Pour le « troller », comme il l’a expliqué lors de son audition par les enquêteurs, il a créé un faux profil Snapchat. Il se faisait alors passer pour Marie, une jeune fille de 16 ans. « Vous avez un drôle de sens de l’humour », s’étonne le président du tribunal.

Pour donner du crédit à son faux profil, le jeune homme dit avoir ajouté, via l’onglet des ajouts rapides de ce réseau social, Margot. « Ça s’est fait comme ça », justifie-t-il, penaud. Mais ce qui devait être une blague de mauvais goût le conduit rapidement à engager la conversation avec Margot. Tout en maintenant sa fausse identité, il demande à l’adolescente de lui envoyer des photos d’elle dénudée.

Trompée et se sentant « en confiance », selon son avocate, la jeune Margot obtempère. Dans un second temps, Tony contacte Margot avec son vrai profil et lui explique avoir vu ses fameuses photos. Le jeune adulte dit être un ami de Marie, son faux profil, et vouloir discuter avec elle.

L’adolescente accepte et démarre alors une longue série d’échanges quasiment intégralement tournés autour du sexe. Au départ, elle pense qu’il est lui aussi mineur. Mais très vite, il révèle son âge. Tony sait d’ailleurs depuis le début qu’il échange avec une mineure. « Pourquoi vous n’arrêtez pas ? », le questionne le président. « Parce qu’elle continuait à répondre à mes photos », explique-t-il.

Des messages « à 75 % tournés autour de la sexualité »

Au cours de leurs échanges, Tony fait plusieurs fois référence au fait de rencontrer physiquement Margot pour avoir une relation sexuelle avec elle. Lui, dit aujourd’hui qu’il ne serait jamais passé à l’acte. Mais le contenu des messages laisse le président perplexe.

Selon lui, les échanges retranscrits dans le dossier sont « à 75 % tournés autour de la sexualité ».

Vous lui dites que vous avez envie de lui faire l’amour. On sent que c’est plutôt vous qui avez envie. Vous êtes toujours à l’initiative.

Le président du tribunal

Le prévenu fait aussi référence de nombreuses fois, toujours via Snapchat, à la taille de son sexe ou encore la poitrine généreuse de l’adolescente. Jusqu’à ce que la mère de Margot découvre tout. Messages, photos, vidéos… Elle met fin immédiatement à cette relation et prive sa fille de téléphone.

Il était « très immature »

Mais même après ça, Tony contacte une amie de Margot pour la dénigrer auprès d’une de ses amies. « Vous vous en souvenez ? », demande l’avocate des parties civiles. Le prévenu répond par la négative : « Je ne me souviens plus. Ça fait longtemps. » Pour justifier son comportement, Tony explique qu’il était, à l’époque, « très immature ». Il reconnaît aujourd’hui avoir « fait du mal » et répète à plusieurs occasions qu’il est « désolé ».

Mais à la barre, la mère de Margot montre à quel point ses agissements ont bouleversé la famille de l’adolescente. « Ça a été un choc de découvrir tout ça, dit-elle dans un premier temps. C’est une blessure de honte profonde pour [Margot]. »

Pour elle, cette « première expérience de la sexualité » de sa fille a été traumatisante. À cause de ça, elle aurait perdu confiance en elle, perdu ses amis car elle n’avait plus de portable, ou encore fait l’objet d’un harcèlement.

Ses échanges avec Tony ont aussi conduit la jeune fille à l’internat, car la relation avec sa mère était devenue pesante. Et, un peu plus tard, très gênée par sa poitrine, Margot a décidé de procéder à une opération de réduction mammaire.

10 mois de prison avec sursis

Après en avoir délibéré, le tribunal suit les réquisitions du procureur. Tony, non représenté par un avocat, est condamné à une peine de 10 mois de prison avec sursis**. Il a l’obligation de suivre des soins psychologiques, a interdiction d’entrer en contact avec la victime et d’exercer une activité en lien avec des mineurs. Il est aussi inscrit au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais).

Il est également condamné à payer une somme de 4 000 euros de dommages et intérêts à Margot, 800 euros à sa mère, et 400 euros au titre du préjudice matériel.

*Les prénoms ont été modifiés

** Cette peine est susceptible d’appel. Toute personne est présumée innocente tant que toutes les voies de recours n’ont pas été épuisées.

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