Le deuxième temps de Marco Bezzecchi lors du test MotoGP d’Aragón est l’expression mesurée et mesurable du gain de performance qu’Aprilia cherche à concrétiser avec sa RS-GP en cette fin de printemps. Jusqu’ici, le constructeur italien a récolté bien moins que ce qu’il espérait : les blessures de Jorge Martín ont lourdement impacté la saison, privant l’équipe du soutien du champion du monde dans le développement d’une moto qui semble pourtant avoir un grand potentiel encore inexploité.

Lors du Grand Prix du week-end dernier, seuls quatre pilotes sont parvenus à passer sous la barre des 1’47 au tour : les trois Ducati de Marc Márquez, Álex Márquez et Pecco Bagnaia, et l’Aprilia de Marco Bezzecchi. Celui-ci était toutefois relégué à la lutte pour la huitième place, loin des trois autres pilotes à avoir tenu ce rythme et qui sont tous montés sur le podium.

La faute à une qualification complètement manquée, pour laquelle le pilote, vainqueur deux semaines plus tôt en Angleterre, se mord encore les doigts. Et le signe, aussi, qu’Aprilia doit de toute urgence résoudre sa faiblesse dans le time attack, exercice dans lequel Bezzecchi ne retrouve pas les qualités de la moto dont il profite en configuration de course.

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Fabiano Sterlacchini, directeur technique, et Marco De Luca, chef de projet, le savent et ils ont réalisé un travail de fond sur l’Aprilia, ce qui a permis d’apporter un paquet de nouveautés techniques à tester. Leur but ? Améliorer le comportement de cette moto historiquement nerveuse, notamment dans la phase critique de l’entrée dans les virages.

D’après les indiscrétions qui ont filtré, il n’y aurait pas eu de recherche spécifique visant à augmenter la charge aérodynamique ou à réduire plus efficacement la traînée, mais plutôt la volonté d’offrir à Bezzecchi et ses coéquipiers une plus grande confiance grâce à une meilleure stabilité dans la phase la plus sensible du virage.

Il s’agit d’une approche différente pour le travail mené en soufflerie, et qui semble produire des résultats très intéressants. Il ne suffit pas d’un simple coup d’œil aux pièces en carbone vierges de toute peinture qui ont été montées sur la moto lundi pour comprendre les évolutions introduites en Aragón. Celles-ci infusent un peu partout.

Le nouveau package aérodynamique validé sur l'Aprilia au test de lundi.

Le nouveau package aérodynamique validé sur l’Aprilia au test de lundi.

Photo de: GPOne

Il y a pourtant un premier élément visuellement évident : le carénage avant. Celui-ci a été entièrement redessiné, avec des lignes moins anguleuses, plus douces, pour aboutir à un large aileron avant plus incurvé devant la prise d’air, avec deux profils affichant un effet de soufflage plus marqué. Les deux flaps révèlent une étude poussée de micro-aérodynamique, avec des formes complexes permettant un comportement différent de la moto, selon qu’elle est en pleine inclinaison ou lancée en ligne droite.

L’aileron placé sur la fourche était initialement apparu comme un petit spoiler ajouté sur une zone de la moto oubliée du règlement, mais il devient aujourd’hui un élément de plus en plus complexe et travaillé. Sur l’Aprilia, il n’est pas fixé au pivot de fourche, mais prend naissance dans la partie supérieure de la suspension. Cela forme un profil vertical qui crée un espace avec la fourche. On retrouve également ici un petit profil bi-plan, avec un flap inférieur nettement plus long que le supérieur, mais ce qui attire l’attention, c’est la courbure particulière visible près de la fixation verticale.

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Les flancs de la moto sont nouveaux eux aussi, avec une partie profilée du carénage qui est non seulement agrandie, mais qui présente aussi une saillie plus marquée vers l’avant, comme si elle devait avaler les turbulences générées par la roue avant. Contrairement à Ducati, qui, derrière son diffuseur, a progressivement créé une sorte de tunnel Venturi qui fonctionne lorsque la GP25 est au plus fort de son inclinaison, Aprilia a choisi une autre direction de développement. Il ne faut donc pas s’étonner de la présence confirmée de deux conducteurs d’air qui dirigent le flux vers le bas.

Les évolutions se dessinent pour la suite de la saison

Toutes ces expérimentations aérodynamiques semblent avoir apporté satisfaction, lundi, traçant donc la voie vers la seconde homologation qui sera permise cette saison. « Dès le premier commentaire, ça a été quelque chose de bon », témoigne le team manager Paolo Bonora pour le site officiel du MotoGP. « Nous devons le tester avec tous les pilotes Aprilia afin d’obtenir leurs commentaires, mais ça semble bon et vous le verrez probablement dans la seconde partie de la saison. »

La moto utilisée par Marco Bezzecchi pendant le Grand Prix, visuellement différente de celle du test.

La moto utilisée par Marco Bezzecchi pendant le Grand Prix, visuellement différente de celle du test.

Photo de: Gold and Goose Photography / LAT Images / via Getty Images

Un retour positif est également venu du nouvel échappement, qui permet de rendre plus harmonieux le moteur. Ce travail, ainsi que celui sur l’aéro, visaient des gains divers : « Pas uniquement en qualifications, mais aussi dans toute la dynamique de la moto, à la fois pendant la course et pendant le time attack », indique Paolo Bonora.

« Pour ce qui est de résoudre complètement la question du pneu neuf pour Marco, nous l’avons un peu fait pendant le week-end parce que ses commentaires sont bons dans la partie freinage. En revanche, nous devons encore travailler sur la phase d’accélération afin d’extraire le meilleur de son talent au moment où il redresse la moto et d’améliorer la phase d’accélération. »

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La photo de Bezzecchi que nous proposons en tête de cet article, prise alors qu’il est en pleine simulation de départ, met en lumière un autre axe de développement : le nouveau variateur de hauteur, mis au point par le pilote d’essais Lorenzo Savadori et qui devrait aider à améliorer les départs de la RS-GP. Les pilotes qui l’ont testé en ont donné des retours positifs, si bien qu’on le verra certainement au Mugello sur toutes les Aprilia.

Après tous ces tests, le team manager se félicite d’une journée « très intéressante », d’autant qu’un travail non perceptible par un regard extérieur a également été mené. « Nous nous sommes concentrés sur le time attack de Marco, et nous avons donc mis en place beaucoup de choses dans de nombreux domaines, en particulier au niveau de l’électronique afin de mieux gérer la phase d’accélération et de garder la moto sous contrôle, qu’elle soit plus stable. »

L’espoir suscité à Noale par cet ensemble de nouveautés est donc que Marco Bezzecchi puisse remonter sur le podium très vite, et confirmer ainsi sa victoire de Silverstone et l’excellent rythme de course affiché à Alcañiz.

Dans cet article

Franco Nugnes

MotoGP

Marco Bezzecchi

Aprilia Racing Team

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