“Le président Donald Trump a eu droit samedi” à la parade militaire “de ses rêves”, constate le Washington Post : “Une grande démonstration de puissance militaire et de zèle patriotique, le long du National Mall [à Washington] à l’occasion de son 79e anniversaire”.
“Mais ce défilé a eu lieu lors d’une journée nuageuse, qui a clôturé l’une des semaines les plus tumultueuses de sa présidence : déploiement de troupes dans les rues de [Los Angeles] la deuxième ville du pays, lancement de missiles au Moyen-Orient et, moins de 24 heures avant le début du défilé, meurtre ciblé d’une élue et de son conjoint dans le Minnesota”, tempère le quotidien de la capitale.
CNN précise que “Melissa Hortman, 55 ans, représentante démocrate du Minnesota et son mari ont été tués à leur domicile samedi au petit matin”, dans un “acte délibéré de violence politique”, selon Tim Walz, gouverneur de l’État. Le suspect, un homme blanc de 57 ans, était toujours activement recherché samedi soir. Les enquêtes ont trouvé dans son véhicule une liste de 70 cibles potentielles, “démocrates pour la plupart”.
Mais si ce samedi 14 juin était à marquer d’une pierre blanche, c’est aussi et surtout parce qu’il a vu “des millions d’Américains à travers le pays” participer “aux plus grandes manifestations coordonnées contre le président depuis le début de son deuxième mandat”, souligne Politico.
Un défilé militaire à 45 millions de dollars
Plus de 2 000 défilés étaient organisés dans les cinquante États du pays sous le slogan “No Kings” (“ Pas de rois”), à l’appel de plus d’une centaine d’organisations excédées par “la répression des immigrés, les coupes budgétaires fédérales” et ce fameux “défilé militaire” au budget royal de 45 millions de dollars, relève le New York Times.
Les manifestants “ont envahi les places, les rues et les parcs de tout le pays, organisant une mobilisation de masse appelant à protéger la démocratie américaine face à un président que de nombreux opposants accusent d’abuser des pouvoirs de sa fonction”, rapporte le quotidien.
À Los Angeles, objet de tous les regards après une semaine de manifestations en réponse aux raids musclés des agents de l’immigration dans la mégapole et ses environs, “des dizaines de milliers de manifestants” ont défilé dans une ambiance généralement bon enfant, avec force slogans et messages “dépeignant le président comme un aspirant monarque violant les règles de la démocratie”, raconte le Los Angeles Times.
Pour le quotidien de la côte ouest, les images de Los Angeles, avec ses banderoles “faisant référence à la fondation de la nation en 1776, ses drapeaux américains, mexicains, guatémaltèques et salvadoriens”, ou ses pancartes proclamant “protester est patriotique”, “contrastaient fortement” avec celles de Washington, où le seul défilé était celui des militaires, “soigneusement orchestré” par la Maison-Blanche, avec “ses chars et ses soldats en treillis”.
Peu de débordements
Selon USA Today, peu de débordements ont été constatés à travers le pays et les confrontations entre manifestants et policiers ont été rares. À Los Angeles, la tension est montée brièvement en fin de journée entre manifestants et forces de l’ordre, qui ont lancé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule rassemblée devant un bâtiment fédéral du centre-ville. Les autorités ont affirmé que les manifestants avaient jeté “des pierres, des briques et des bouteilles” contre les forces de l’ordre.
Portland et Atlanta ont également été le théâtre d’affrontements, tandis qu’à une centaine de kilomètres de Washington, “un homme a intentionnellement lancé son SUV sur des manifestants qui commençaient à se disperser, percutant au moins une personne”, rapporte le quotidien américain.
Si les chiffres de participation variaient d’une source à l’autre, l’association des droits civiques ACLU estimait samedi soir que les manifestations avaient rassemblé “plus de cinq millions” de personnes, relève The Guardian.
“Les manifestations d’aujourd’hui lancent un message retentissant : les gens à travers le pays ne se laisseront pas intimider par les tactiques d’intimidation du président Trump”, a déclaré Deirdre Schifeling, l’une des responsables de l’ACLU. “Les Américains sont des gens courageux et épris de démocratie, qui ne resteront pas les bras croisés pendant que l’administration Trump réduit en miettes notre Constitution”.
Le défilé militaire, “un spectacle pour le président”
Mais le locataire de la Maison-Blanche ne semblait guère intéressé par la marée humaine criant sa colère à travers le pays, réservant son attention à “l’extravagant défilé militaire” qu’il avait imaginé “avant même son premier mandat”, observe le très conservateur Washington Examiner.
La parade a réuni “plus de 6 000 soldats, environ 150 véhicules et 50 avions” et célébrait officiellement “le 250e anniversaire de la création de l’armée américaine”, précise le quotidien.
Mais pour El País, c’était en réalité “une sorte de fête privée”, organisée “comme un spectacle pour le président”, qui fêtait ses 79 ans et pour qui certains membres de l’assistance ont entonné un “Bon anniversaire”.
“Protégé par une vitre pare-balles, Trump est resté assis la majeure partie du temps dans la galerie d’honneur, avec le ministre de la Défense Pete Hegseth à sa droite et la Première dame Melania Trump à sa gauche”, remarque le quotidien madrilène. Un “petit concert” a clôturé l’événement, durant lequel “les artistes tournaient le dos au public et se produisaient pour le président et son entourage”.
Dans l’histoire américaine, peu friande de défilés militaires, “aucun président ne s’était risqué à une telle personnification du pouvoir”, analyse Le Soir. “Les chefs d’État sont toujours restés relativement prudents et consensuels sur la question militaire. Mais dans un style qui lui est propre, Donald Trump aime briser les codes”.