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Si les interrogés sont investis, c’est aussi parce qu’ils ne souhaitent pas reproduire les mêmes erreurs que leurs propres pères.
FÊTE DES PÈRES – Depuis la naissance de sa fille, il y a un an, Maxime a changé de regard sur son père. « Il était aimant, mais il travaillait beaucoup, donc il n’était pas super présent physiquement et assez distant émotionnellement », témoigne le jeune homme 33 ans. « Je pense avoir eu avec lui une relation typique des gens de ma génération. »
Un modèle paternel qui a également marqué les souvenirs de Cyril. « C’est surtout notre mère qui nous a éduqués, avec beaucoup d’amour même si elle avait son caractère. Mon père, lui, suivait le mouvement et tentait d’arrondir les angles, même s’il était plutôt en retrait », se remémore l’homme de 36 ans, père d’un fils de 7 et d’une fille de 2 ans. Pour les deux trentenaires, cependant, hors de question de reproduire cette distance avec leurs enfants : l’expérience de la parentalité est, pour eux, l’occasion de se détacher de ce qu’a représenté leur propre père.
Que gardent ces « nouveaux pères » de la paternité à l’ancienne, qu’ils ont connue quand ils étaient enfants, et que refusent-ils de reproduire ? Pour la fête des pères, Le HuffPost a posé la question à quatre d’entre eux.
Des pères aimants mais distants en guise de modèles
Devenir père a aussi permis à Vincent, 44 ans et père de deux enfants de 8 et 5 ans, de porter un autre regard sur son enfance et sur son paternel. « On faisait beaucoup d’activités ensemble. Mais avec le recul, je me rends compte qu’il n’était peut-être pas si impliqué, ni très démonstratif sur le plan affectif », reconnaît-il. Avant d’ajouter : « Ce n’était pas problématique à l’époque : c’était une éducation “à l’ancienne”, où la mère s’occupait des enfants et le père était plus en retrait. »
Même constat du côté de Corentin, 37 ans et deux enfants, qui garde surtout des souvenirs de sa petite enfance avec le sien. « J’ai senti que mon père a un peu décroché à mon adolescence. Lui-même ayant perdu son père quand il avait 14-15 ans, il lui a manqué toute cette tranche de la relation, de l’ado jusqu’à l’adulte. Par ricochet, il ne savait pas comment se comporter avec moi. »
« Je pense que nous sommes un peu une génération pivot, analyse Maxime. Nous avons eu des pères aimants mais pas très présents, eux-mêmes élevés par des pères souvent absents : qui ont fait la guerre, qui travaillaient beaucoup. Maintenant, c’est à nous de définir le père que l’on veut être pour nos enfants. C’est une feuille blanche. »
« Je leur dis “je t’aime” tous les jours »
Quel père veulent-ils être justement, ces hommes que Le HuffPost a interrogés ? Contrairement aux leurs, souvent au second plan dans leur éducation, tous tiennent à s’impliquer autant que leur compagne. « Je vais chercher ma fille chez l’assistante maternelle, je l’emmène chez le pédiatre… Je suis beaucoup plus présent au quotidien que ne l’était mon père », assure Maxime. Même volonté chez Vincent, qui reconnaît néanmoins que le partage des tâches parentales n’est pas toujours instinctif pour lui. « Mais je me fais un devoir de montrer à mon fils que ça fait aussi partie de notre rôle. »
Corentin, lui, essaie tout autant de passer du temps de qualité avec ses deux fils que de s’intéresser à leurs passions. « Je n’ai pas le souvenir que mon père soit jamais rentré pleinement dans mon univers. Même s’il connaît mes goûts, il est encore aujourd’hui étonné de certaines choses que j’aime. Alors je reste connecté et à jour de tout ce qui fait vibrer mes enfants. »
Surtout, tous veulent briser cette distance affective dont ils ont pu souffrir quand ils étaient plus jeunes. « J’essaie de leur apprendre à exprimer leurs émotions. Ce n’est pas une critique envers mon père, insiste Vincent, mais plutôt une envie : celle de donner à mes enfants les outils que je n’ai pas toujours eus. » « Mon père était un peu une caricature, ajoute Maxime : un homme qui ne pleure jamais, ne laisse jamais transparaître ses émotions. Je ferai autrement avec ma fille, en n’hésitant pas à me montrer vulnérable. »
Les quatre papas ont aussi le sentiment d’être bien plus démonstratifs dans l’amour qu’ils portent à leurs enfants. Par leurs câlins, leurs bisous, mais aussi leurs mots. « Mon père m’a dit une seule fois “je t’aime” quand j’avais 15 ans. Moi, je le dis tous les jours à mes gamins », remarque Cyril, pendant que Corentin souhaite que ses enfants gardent de lui son « amour inconditionnel pour eux ». « J’ai envie qu’ils retiennent que j’ai fait tout ce que je pouvais pour eux, que j’étais présent, et que je l’ai fait sans attendre une quelconque reconnaissance de leur part », complète-t-il.
Une bonne dose d’introspection
De quoi leur donner le sentiment d’être de bons pères pour leurs enfants ? S’ils estiment que ce n’est pas à eux d’en juger, tous assurent faire des efforts pour être perçus comme tels. « Je ne suis pas parfait, mais je fais au mieux tout en restant fidèle à mes principes », estime Corentin. Même chose pour Maxime qui a bien conscience qu’il a déjà fait des erreurs et en fera encore, mais souhaite « faire le maximum » pour sa fille. « Et je veux prendre l’habitude de me poser régulièrement la question : qu’est-ce que je peux faire mieux pour mes enfants, pour ma compagne ? », ajoute le jeune père. De son côté, la paternité a aussi appris à Cyril à faire preuve de plus de compréhension envers ses parents, à qui il a « pardonné tous les manquements ». « Être père, ce n’est pas une mission évidente », reconnaît-il.
Tous gardent d’ailleurs en mémoire les valeurs que leurs pères leur ont transmises et qu’ils espèrent, à leur tour, enseigner à leurs enfants. « Faire de son mieux, être à l’écoute, trouver des terrains d’entente », liste Cyril. Maxime, lui, retient de son père « l’honnêteté, le goût de l’effort », tandis que Corentin se rappelle que son père « était parfois maladroit, mais toujours sincère ». « C’est une valeur que je garde avec moi aujourd’hui », conclut-il.